
- Au jour le jour, janvier 2021
La Prairie au temps des épidémies (suite 2)
Au village, le premier aqueduc, un réseau privé de tuyaux de bois, verra le jour sur le tard en 1885. La chloration de l’eau ne sera implantée qu’en 1925. La construction du réseau d’égouts date de 1912, mais il faudra attendre 1989 pour que les déchets qu’ils transportent soient déviés du fleuve vers l’usine de traitement des eaux usées du bassin de La Prairie. Actuellement au Québec, 7 municipalités sur 10 contaminent toujours les cours d’eau.
À travers la province, apportée par une vague d’immigrants irlandais en juin 1832, l’épidémie de choléra affecta la population jusqu’en octobre. À l’époque, la médecine ne connaissait pas l'origine du choléra ni ses voies de transmission. On croit que ce sont les miasmes (émanations dangereuses de matières en décomposition dégageant une odeur désagréable) et les nuages de gaz qui sont responsables de la maladie. Le choléra était vu comme une maladie de l’atmosphère.
En l’absence de vaccins ou de médicaments efficaces, on connaissait la contagion et on savait qu’il valait mieux isoler les malades. John Snow, un anesthésiste de Londres en Angleterre, a prouvé, en 1854, que le choléra était transmis par l’eau contaminée. Hélas, les instances médicales n’accepteront ses conclusions qu’à la fin du 19e siècle avec l’apparition de la théorie microbienne.
Bien qu’un poste de quarantaine fut installé dès 1832 sur Grosse-Île, une île située à environ 50 kilomètres à l’est de la ville de Québec pour contrôler l'arrivée des nouveaux immigrants, la maladie se répandit à travers tout le Bas-Canada.
En 1832, « Pour l’ensemble de la province, on estime à près de 10 000 le nombre de décès. Le taux de mortalité pendant l’épidémie est de 46/1 000 habitants pour la province avec pointes de 74/1 000 à Montréal et de 82/1 000 à Québec, comparativement à 37/1 000 pour l’ensemble de l’année. » Denis Goulet, page 38,Brève histoire des épidémies au Québec. Du choléra à la COVID-19, Septentrion, juin 2020, 176 pages Le choléra a tué plus de 3 000 personnes dans les villes de Montréal et Québec.
À La Prairie, le bilan est élevé et les écoles sont fermées. Le curé Boucher signale 39 morts du choléra en juin, 18 en juillet, 25 en août et 2 en septembre. Cela représente 84 décès pour 187 sépultures dans l’année soit 45 %.
Dans l’édition du 18 juin 1832 de La Minerve on peut lire : « La semaine dernière on a transporté des troupes à Laprairie à cause du coléra. Hier il en est parti un fort détachement pour l’île Sainte-Hélène. Il est mort beaucoup de soldats et il y a eu un grand nombre d’attaqué. » Faut-il en conclure que les casernes militaires de La Prairie avaient alors servi de lieu d’isolement sanitaire?
Le choléra, devenu l’unique sujet de discussion, sème la terreur dans toutes les classes de la société. Dans son édition du 18 juin 1832, La Minerve dresse un portrait lugubre de la situation à Montréal : « […] Les personnes qui en sont attaquées sont emportées en quelques heures. […] Le fléau a moissonné une foule considérable de nos meilleurs citoyens et la ville est dans un deuil général. […]

- Au jour le jour, janvier 2021
La Prairie au temps des épidémies (suite 1)
La mortalité élevée s’explique par le fait que la population d’alors est très majoritairement née dans la colonie et n’a donc jamais été touchée par cette maladie. Ce qui explique qu’elle ne soit pas immunisée. C’est aussi le cas de plusieurs Français de souche qui ne l’ont jamais eue avant de venir habiter en Nouvelle-France.
Selon le Sulpicien Villermaula curé de La Prairie depuis septembre 1702, « […] la picote [petite verole] commença a faire ses ravages dans les quartiers de montreal. elle dura tout l’hyver Suivant et tout le printems aussi bien que une bonne partie de l’été ce qui fut cause que l’année mil Sept cent troy Se passa a souffrir, les habitans n’etant pas en etat d’agir. tous ceux qui étoient natifs du païs Sentirent les rigueurs de cette cruelle maladies et même plusieurs Francois exceptés quelques uns de plus agés en furent affligés. ainsi chacun ne passa qu’a Soy et le Curé n’eut point le tems de penser a d’autres affaires qu’aux besoins de Ses malades, dont la paroisse n’etoit qu’un hopital. »
À notre grand étonnement et malgré le ton alarmiste du curé Louis-Michel de Villermaula, le registre des sépultures de la paroisse n’a enregistré que 4 décès pour l’année 1702 et 7 pour 1703. Ces derniers étant tous morts durant la première moitié de l’année 1703, cela ne ferait qu’au plus 7 victimes de la petite vérole à La Prairie sur 400 personnes, soit moins de 2 % de la population. Une statistique bien en deçà des 80 décès par 1 000 habitants pour l’ensemble de la colonie.
Choléra et typhus
Le choléra est une infection diarrhéique aiguë provoquée par l’ingestion d’aliments ou d’eau contaminés par le bacille Vibrio cholerae. Elle débute par des diarrhées très sévères et par une super déshydratation. On peut en mourir en quelques heures. Le choléra se transmet par ingestion d'eau ou d'aliments contaminés par les selles d'une personne infectée (transmission fécale orale).
Au cours du 19e siècle, le choléra a rendu malades des centaines de millions de personnes, tuant plus de la moitié de ses victimes. C’était l’un des agents pathogènes les plus rapides et les plus redoutés au monde. C’est sans doute pourquoi dans certains pays on enterre les victimes du choléra avec de la chaux vive.
À l’époque, plusieurs attribuent les épidémies à l’intervention du diable ou encore au châtiment divin. Le clergé organise des processions pour éloigner le choléra. L’eau bénite à l’entrée des églises, censée assurer une protection contre le mal, contribue au contraire à la contagion. D’autres cherchent des boucs émissaires; mendiants, immigrants ou mauvais voisins.
Dans les agglomérations du Québec au 19e siècle, les déficiences sont multiples en ce qui a trait à l’hygiène corporelle et domestique ainsi qu’à la gestion des excréments humains et animaux.
À La Prairie, nombreux sont ceux qui gardent des porcs, des vaches et des poules dans leur cour arrière. Les latrines sont à proximité des puits, les premières ayant contaminé les seconds, car les déjections humaines et animales ne font pas bon ménage avec l’eau potable. Certains achètent de l’eau de vendeurs qui la puisent dans le fleuve. Nous sommes loin de l’eau courante et des cabinets à chasse d’eau.
Les meilleures mesures pour prévenir le choléra sont l’accès à l’eau propre, la gestion des eaux usées et des déchets, ainsi que l’établissement de règles de santé publique. Or, au milieu du 19e siècle on sait qu’à La Prairie on accusait de sérieux retards dans ces domaines et le virus du choléra arrivait ici dans un milieu favorable à son expansion.

- Au jour le jour, janvier 2021
La Prairie au temps des épidémies
Depuis la naissance de l’humanité, la maladie a toujours été présente sous ses multiples manifestations. La dégradation et la morbidité sont inhérentes à la vie et en déterminent la durée.
Outre les drames individuels, en certaines occasions le mal s’est répandu parmi de vastes populations sinon à travers l’humanité tout entière, provoquant des milliers voire des millions de morts.
La première pandémie de peste bubonique connue fut répertoriée entre le 6e et le 8e siècle. Il s'agit de la peste de l’empereur Justinien qui se serait répandue grâce aux échanges commerciaux. Sur deux siècles, elle fit des millions de morts. Plus tard, la peste noire apparue au Moyen-Âge entre 1347 et 1353 aurait été responsable de la mort de 25 à 34 millions de personnes en Europe. Ce chiffre représente entre 25 % et 50 % de la population européenne d’alors.
La médecine d’alors était impuissante. Afin d’apaiser la colère de Dieu, la population, prise de panique, avait recours aux prières et multipliait les processions.
Au cours des siècles qui suivirent, l’humanité devait connaître d’autres épisodes d’épidémies, certains virus étant plus meurtriers que d’autres : la fièvre jaune, le choléra des années 1830, la grippe asiatique, la grippe espagnole, le sida, l’ebola, le zika etc. pour ne citer que celles-là. L’actuelle pandémie de COVID-19 est la dernière en ligne de cette longue suite de maladies fatales qui se répandent à travers les continents.
Les agents pathogènes (virus, microbes, bactéries, etc.) n’ont aucune intention ni plan de dissémination. Ils doivent compter sur les humains qui, par leurs contacts sociaux et leurs modes de vie, favorisent leur expansion. Ainsi, plus la population est importante plus l’épidémie risque de durer longtemps. Les réseaux de transports jouent également un rôle majeur dans la propagation.
Ainsi, sise au carrefour de grandes voies de communication et lieu de transit important, on comprendra facilement que, depuis sa fondation, La Prairie ait connu son lot d’épidémies. Selon la journaliste scientifique Sonia Shah, trois raisons ont contribué et contribuent toujours aux pandémies : les incertitudes médicales, l’absence de règles sanitaires claires et le manque de cohésion sociale (plusieurs refusent de suivre les consignes sanitaires).
La variole
Mise en garde : Au sujet des statistiques présentées plus bas, le lecteur voudra bien tenir compte que les registres de la paroisse de la Nativité de La Prairie indiquent les noms et la date du décès sans jamais en préciser la cause. Nous convenons cependant que plus il y a eu de morts plus la probabilité est grande que beaucoup de ces décès soient attribuables à l’épidémie en cours.
Un premier fléau
Alors que la seigneurie de La Prairie comptait à peine 400 habitants, une épidémie de petite vérole (variole ou picote) ravagea la région au cours de l’hiver 1702-1703. Cette épidémie fut, pour les populations de souche européenne, la plus meurtrière de toute l’histoire canadienne. La moitié de la population totale aurait été touchée et environ 10% des habitants décédèrent en six mois.

- Au jour le jour, janvier 2021
Message important à nos membres …
La situation actuelle prive votre organisme de revenus essentiels à son bon fonctionnement. Nous n’avons reçu qu’un petit nombre de visiteurs au cours de l’été dernier et la vente annuelle de livres usagés a dû être reportée à une date indéterminée.
Nul ne peut prédire à quel moment nos activités régulières pourront être remises en marche. Il faut malgré tout pouvoir faire face à nos obligations.
La Société d’histoire de La Prairie-de-la-Magdeleine fêtera ses 50 ans d’existence dans deux ans et cela mérite d’être souligné de façon grandiose.
Vous comprenez donc l’importance de renouveler rapidement votre carte d’adhésion pour l’année 2021.
Stéphane Tremblay, président

- Au jour le jour, décembre 2020
Renouvellement de la carte de membres
Pour l'année 2021, le prix de nos abonnements demeure inchangé:
Abonnement individuel: 40$
Abonnement familial: 65$
Abonnement étudiant: 10$

- Au jour le jour, décembre 2020
Une nouvelle archiviste à la SHLM
Après avoir roulé ma bosse comme assistante-réalisatrice en télévision à partir de 1994, ma soif d’apprendre et mon désir de réaliser des études à l’étranger me poussent à initier le programme d’Études hispaniques à l’Université de Montréal en 2001. En 2003 et 2004, je poursuis mes études au département de philologie espagnole à l’Universidad autónoma de Madrid tout en saisissant l’opportunité de ce séjour pour assister à des cours d’histoire qui ne sont pas disponibles à Montréal. Puis, j’obtiens une bourse espagnole de la Fondation Sánchez-Albornoz afin d’étudier la paléographie espagnole durant tout l’été 2004 au monastère Santo Tómas à Ávila (Espagne).
À mon retour à Montréal, je termine mon baccalauréat tout en complétant un certificat en archivistique à l’Université de Montréal (2006). Je réalise un stage aux archives des Sœurs Grises de Montréal en 2006 puis, je suis engagée à l’INRS-Institut Armand-Frappier (2006-2007) pour assister l’archiviste responsable dans le projet de mise en place d’un nouveau dépôt d’archives et l’organisation du déménagement des documents. En 2007, un poste de technicienne aux archives s’ouvre au sein de Univers culturel de Saint-Sulpice, la corporation chargée de veiller à la conservation des précieuses archives des Prêtres de Saint-Sulpice de Montréal. J’y travaillerai 13 ans avec deux collègues archivistes, c’est-à-dire jusqu’en 2020. Ce poste à Saint-Sulpice, qui était initialement de 3 jours hebdomadaires, me permet de travailler parallèlement, durant cinq ans, au Service des archives des Sœurs de Sainte-Anne à Lachine (2009-2014).
Et puis me voici ! Heureuse de pouvoir œuvrer au sein d’un organisme dynamique qui a à cœur l’histoire et la volonté de la faire connaître et qui sait toute l’importance que revêtent les archives historiques!

- Au jour le jour, décembre 2020
Le chemin royal de Chambly (suite 1)
Pourtant, plutôt que de traverser à Longueuil, le chemin de retour vers Chambly passera via La Prairie, seul chemin existant d’alors, le « Chemin royal de Chambly ».
Selon l'article no 14 de L'Acte de Capitulation de Montréal, les dirigeants et officiers de la Nouvelle-France se devaient, avant de quitter la colonie, de remettre aux Britanniques « et de bonne foi, toutes les cartes et plans du pays », ce qui fut accordé.
Celles-ci servirent immédiatement à Jonathan Carver, cartographe et capitaine colonial du Massachusetts, pour la confection de sa carte de l'île de Montréal et de ses environs publiée le 7 octobre 1763. Le capitaine Carver situe et nomme explicitement le « Chemin de Chambly » comme étant le seul et unique chemin reliant Chambly à Montréal via La Prairie. (A Particular Survey of the Isles of Montreal ). dit « from The French Surveys » ce qui en fait une carte du Régime français).
Un siècle plus tard en 1863, le British War Office publie une carte de la rive-sud de Montréal basée sur les relevés que le général Charles Gore avait réalisés en 1837. En effet, 75 ans après la Conquête cette carte indique que tous les chemins allant vers l'intérieur des terres à partir des villages de Varennes, Boucherville et Longueuil sont classés comme étant impraticables en été, ce sont tous des « winter roads ». Le chemin de Longueuil est aussi classé comme étant devenu un « planked road », chemin de madriers aplanis et rondins à utiliser à vos risques et périls. Sur cette carte de Gore, le seul chemin qui se rend à Chambly et Saint-Jean en 1837, en été comme en hiver, est toujours le chemin de La Magdeleine de La Prairie, le vieux « Chemin royal de Chambly ».
La nouvelle carte topographique en couleurs de « Data & Imagery Open Street Map » nous indique avec précision « l'hydrographie présumée » où étaient situées ces grandes zones marécageuses autour de Chambly et de la vallée du Richelieu. Et surtout, cette carte indique comment en 1665, les soldats du régiment de Carignan pouvaient éviter ces marécages comme l'ont toujours fait, sur une période d'une décennie (1668-1678), près de 300 Iroquois convertis migrants entre Gandaouagué près d'Albany et Kentaké près de La Prairie-de-la-Magdeleine.
En conclusion, il y a une belle unanimité entre la science moderne et tous ces nombreux cartographes: les Français Samuel de Champlain et Levasseur de Néré, le Hollandais Samuel Johannes Holland, les Anglais John Montressor et le général Charles Gore, l’Allemand Ludwig Cancrinus ainsi que l'Américain Jonathan Carver. Tous s’accordent pour situer le tout premier « Chemin de Chambly » entre le fort Chambly et La Prairie!

- Au jour le jour, décembre 2020
Le chemin royal de Chambly
Le 15 octobre 1673, le capitaine Jacques de Chambly accorda officiellement les concessions de sa seigneurie devant le notaire royal Antoine Adhémar. Les terres les plus à l'ouest par rapport au fort Chambly (en direction de La Prairie) étaient situées sur la côte dite « Mont-Royal », le long de la rivière L’Acadie. La dernière de ces terres fut concédée à René Dumas dit Rencontre, un jeune soldat d'à peine 22 ans.
Après cinq années de durs labeurs, Dumas, insatisfait du rendement de ses terres trop humides se décida à quitter ce milieu plutôt malsain.
René Dumas déménagea à l'été 1678 avec sa jeune famille en un lieu facilement accessible à pied, la seigneurie voisine de La Prairie-de-la-Magdeleine. Il s’y rendit, par le seul chemin qui passait devant sa porte, le « Chemin Royal de Chambly », lequel le menait non seulement à La Prairie, mais, s’il le souhaitait, en canot à Montréal (Lachine) où on lui avait également offert une concession, offre qu'il déclina.
René Dumas dit Rencontre reçut des Jésuites, seigneurs de La Prairie-de-la-Magdeleine, une des terres situées le plus à l'est par rapport au fort de La Prairie, à savoir sur la côte Saint-Claude, à moins de 3 heures de marche de ses nombreuses terres de Chambly qu'il cherchera à vendre.
Trois ans plus tard, lors du recensement de 1681, René Dumas, sa femme Marie Lelong, ainsi que leurs cinq enfants sont bien installés dans leur habitation à La Prairie. En 1687-88, les Dumas seront rejoints à La Prairie par d'autres pionniers de Chambly qui ont également choisi de quitter leurs terres. Ce sont Louis Bariteau dit Lamarche et François Bourassa dit LaRonde. Jean LeBeau dit l'Alouette et quatre autres familles de Chambly sont partis à Boucherville et quatre autres familles migrèrent vers Montréal. Curieusement, aucune de ces familles ne se rendra à Longueuil. Combien de pionniers de Chambly se seraient rendus à pied vers Longueuil si un tel chemin avait existé?
Quelques années plus tard, en mai 1698, Pieter Schuyler maire d'Albany, ainsi que son frère Johannes sont venus ici en mission diplomatique pour le comte de Bellomont, le nouveau gouverneur de New York. Leur mission consistait à se rendre à Montréal avec une vingtaine de prisonniers français et ensuite de poursuivre vers Québec afin de rencontrer le gouverneur Frontenac et lui annoncer que le traité de Ryswick avait mis fin à la guerre en Europe.
Selon le récit de Pieter Schuyler (Journey and Negociation at Canada, July 22, 1698), une fois arrivés au poste de contrôle du fort Chambly le 17 mai 1698, pour atteindre Montréal le lendemain, les deux frères n’avaient d’autre choix que d’emprunter le même chemin qu'ils avaient utilisé en 1690 et 1691, soit le seul chemin reliant Chambly à Montréal via La Prairie!
Le 12 juin 1698, à son retour de Québec, Pieter Schuyler se trouve en présence de Louis-Hector de Callière gouverneur militaire de Montréal. La petite seigneurie de Longueuil est directement face à lui sur la rive-sud du fleuve Saint-Laurent et la seigneurie de La Prairie, elle, est à une lieue et demie (7,3 km) au sud-ouest.

- Au jour le jour, décembre 2020
Le boulevard Taschereau (suite 1)
Tout le long du boulevard, les demeures étaient décorées et les habitants se pressaient à la rencontre du premier ministre Taschereau et de ses collègues. Précisons qu’à cette époque il n’y avait que quelques maisons entre le chemin de la Pinière et La Prairie. La situation devait s’améliorer avec l’ouverture du boulevard Taschereau.
À La Prairie, le convoi fut accueilli par le maire Longtin. Des discours furent prononcés et l’on dévoila le monument de béton qui indiquait clairement que la nouvelle voie porterait le nom de boulevard Taschereau. Ce monument fut longtemps peint en blanc puis décapé. Il disparut en 2009 à l’occasion du réaménagement de l’intersection du boulevard Taschereau et du chemin de Saint-Jean.
Impacts locaux
En 1942, La Prairie comptait déjà pas moins de 290 automobiles et 50 camions.
Or, puisque les gouvernements subventionnaient le transport par autobus sur le chemin d’en bas (Édouard VII), il n’était pas question de payer pour ouvrir le boulevard Taschereau en hiver. Des citoyens de La Prairie se sont donc organisés pour déneiger la voie jusqu’en 1943, alors que le ministère de la Voirie prit les choses en mains.
Le développement de cette artère commerciale qui, avec le temps, deviendra la voie obligée vers La Prairie, n’est pas sans lien avec la création, en 1954, de la paroisse du Christ-Roi et plus tard du parc industriel. C’est ainsi que lentement, au fil des années, tant les services publics que les commerces et les industries, délaisseront le village (le Vieux Fort) pour venir s’installer le long du boulevard Taschereau qui, jusqu'en 1992, s’appelait Saint-Élisabeth à l’intérieur des limites de La Prairie. Depuis le chemin de Saint-Jean, il s’étire jusqu’à l'intersection du boulevard Montcalm et de l'autoroute 15/route 132 à Candiac comme boulevard à 2 voies par direction.
Depuis le réaménagement de l'intersection en 2008, le monument de béton a été remplacé par un arrangement floral. À l'est du chemin de Saint-Jean, le boulevard Taschereau se greffe d'une troisième voie de circulation par direction et devient exclusivement commercial.
Un cri du coeur
L’inauguration du nouveau boulevard fut suivie d’une grande assemblée politique à Longueuil, réunion au cours de laquelle le premier ministre s’attaqua avec fougue à la signature du traité de canalisation du Saint-Laurent.
« La canalisation du Saint-Laurent est un projet néfaste et antinational et quel que soit le gouvernement à Ottawa, que ce soit King, Lapointe ou Bennett, je n’hésiterai pas à me séparer de lui le jour où il voudrait aligner le traité de canalisation. Celui qui osera commettre ce crime national me trouvera sur son chemin, car je place ma race avant mon parti. » Taschereau y percevait une ingérence américaine dans les affaires de la province et du pays.
En mars 1934, le sénat américain rejette le traité de canalisation par 46 voix contre 42. Le président Roosevelt croit cependant que la canalisation se fera et qu’elle ne peut être empêchée parce qu’elle est une amélioration naturelle. Si les États-Unis refusent d’y participer elle restera à faire par le Canada qui en retirera tous les avantages.
Le 24 avril 1959 à Saint-Lambert, la voie maritime du Saint-Laurent s’ouvrait à la circulation devant des milliers de curieux, mais en l’absence du premier ministre du Canada qui avait préféré demeurer à Ottawa pour préparer son programme parlementaire. Deux jours plus tard, le luxueux yacht Britannia franchissait l’écluse en présence de la reine Élisabeth, du président Eisenhower et du premier ministre John Diefenbaker.

- Au jour le jour, décembre 2020
Le boulevard Taschereau
Un nouveau boulevard
Pour des raisons inconnues, en février 1929, le conseil municipal de La Prairie manifeste son désir de voir le futur boulevard Taschereau aboutir, non pas sur la rue Sainte-Élisabeth, mais plutôt à l’angle des rues Notre-Dame et Édouard VII. Une demande qui, heureusement, ne fut pas retenue.
Peu importe, c’est par un radieux après-midi du lundi 12 septembre 1932 que la cérémonie d’ouverture du nouveau boulevard de la rive-sud débuta dans la municipalité de Montréal-Sud sise juste au sud du nouveau pont du Havre (Montreal Harbour Bridge) ouvert deux ans plus tôt. C’est ce pont, rebaptisé quatre ans plus tard pont Jacques-Cartier, qui fut à l’origine de la création du « boulevard Laprairie ». Le nouveau boulevard est au nombre de plusieurs grands travaux publics (édifices, routes, ponts etc.) qui, en pleine crise économique, avaient été mis en marche afin de donner du travail aux trop nombreux chômeurs.
Le nouveau boulevard devait d’abord relier La Prairie à Longueuil, et surtout offrir un accès direct et rapide au pont Jacques-Cartier. La nouvelle route était d’une largeur totale de 60 pieds (18 mètres) et d’une longueur de 9 milles (14,5 kilomètres). C’est la journée même de son inauguration que la nouvelle voie de circulation fut nommée en l'honneur de Louis-Alexandre Taschereau (1867-1952), quatorzième premier ministre du Québec. Dans La Prairie, jusqu’en avril 1990, le tronçon situé à l’ouest du chemin de Saint-Jean s’appelait boulevard Sainte-Élisabeth.
Plusieurs ministres et dignitaires étaient présents à l’inauguration, ainsi que les maires et de nombreux conseillers des municipalités riveraines dont le Dr Joseph-Moïse Longtin, maire de La Prairie de 1912 à 1938.
L’abbé Albéric Corbeil, curé de Montréal-Sud, assura la bénédiction du boulevard selon les rites de l’époque. Ensuite, l’honorable Joseph-Édouard Perreault, ministre de la voirie précisa que la construction de cette nouvelle voie de circulation nécessita une dépense de 140 M$ dont 100 M$ furent versés en salaires et 40 M$ servirent à payer les travaux de conception et les matériaux nécessaires à la réalisation de l’œuvre.
Dès que le premier ministre eut coupé le ruban qui barrait la route, le cortège des dignitaires amorça son trajet vers La Prairie. On s’arrêta dans chacune des municipalités traversée, dont le maire souhaitait la bienvenue au premier ministre ainsi qu’aux nombreuses personnes qui l’accompagnaient.