Sélection d'une édition

    La Commune de La Prairie

    Un livre a déjà été écrit par l’abbé Élisée Choquet, lequel a pour titre “Les Communes de Laprairie”, “Communes” dont l’origine remonte au 19 mars 1694 lors d’un contrat passé devant Me Adhémar notaire. Dans ce livre l’auteur a fourni de nombreux détails sur à peu près tout ce qui s’est passé depuis la date d’acquisition des Communes par la Compagnie de Jésus jusqu’au 25 mars 1936.

    Si j’ai songé à donner une suite au livre de l’abbé Choquet, c’est dans le seul but de compléter l’histoire de la Commune de Laprairie de la Magdeleine de 1935 jusqu’à sa phase finale à laquelle j’ai participé avec beaucoup d’intensité. Toute l’affaire s’est terminée le 8 juillet 1966 après dissolution de la Corporation des Président et Syndics et annulation de la charte.

    Ildège Brosseau

    Syndic et assistant greffier.

    Ainsi de 1935 à 1941 tout se passe de façon habituelle, c’est-à-dire que les censitaires font paître leurs animaux dans la dite commune alors que les Président et Syndics exercent une surveillance et voient à l’entretien des clôtures afin de s’assurer que les animaux soient toujours gardés à l’intérieur des limites de la commune.

    Cependant en octobre 1941, l’honorable Ministre des Munitions et Approvisionnements a requis pour fins de mesures de guerre, (il devait s’agir d’exercices de tir et de cible pour les aviateurs attachés au champ d’aviation de St-Jean P.Q.) l’occupation d’un certain emplacement sis près de Laprairie dans le Comté de Laprairie. L’emplacement précité faisait partie du terrain communément appelé la Commune de Laprairie, c’est-à-dire de toute la partie du lot 673 contenant en superficie 900 arpents plus ou moins.

    La durée de l’occupation des dits lieux fut fixée à toute la période de la guerre ainsi qu’à l’année qui devait suivre, avec effet rétroactif depuis la prise de possession en date du 19 novembre 1941.

    Le bail prévoyait des versements de 2,00$ par arpent en superficie par année ce qui représentait un loyer annuel de 1 800,00$ pour toute la durée de la guerre. Cependant comme le bail fut prolongé jusqu’au 31 décembre 1943, la Corporation reçut donc du gouvernement fédéral un montant total de 4 193,00$. L’acte fut signé le 20 juillet 1944 devant Me Émile Gravel, notaire, résidant et pratiquant en la cité de St-Lambert; étaient présents le président Arthur Lanctot et les syndics Clovis Page, Raoul Lussier, Roch Dupuis et Ernest Régnier ainsi que le greffier Paul Boucher, notaire.

    Faut-il ajouter ici qu’à partie de 1941 les censitaires n’ont plus usé de leur droit de pacage s’étant départis d’un grand nombre d’animaux, et ce pour la durée de la guerre et par la suite, pour un temps illimité.

    Or le 11 juin 1948 la Corporation des Président et Syndics, d’un commun accord avec la Compagnie de Jésus, cède pour la somme de 1,00$ à la Communauté des Frères de l’Instruction chrétienne de Laprairie, pour fins éducationnelles seulement, un lopin de terre mesurant environ huit cents pieds de front, par une profondeur d’environ quatorze cents pieds plus ou moins. Ledit lopin est prélevé sur le lot partie 673 de la Commune de Laprairie.

    L’année suivante la Commune devait subir une nouvelle amputation puisque le 13 juillet 1949 la Corporation des Président et Syndics et la Compagnie de Jésus consentaient à une vente de terrain à la ville de Laprairie pour la somme de 1,00$ et ce pour tous les terrains achetés dans la Commune de Laprairie. Or comme il existait une loi qui stipulait que la Corporation des Président et Syndics de la Commune de Laprairie était autorisée à consentir ces ventes pour les ayants droit, à la condition expresse que la ville paie aux dits syndics une somme de 20,00$ pour chaque arpent vendu. Et tout porte à croire que la Ville de Laprairie a bel et bien payé cette somme.

    Considérant que les censitaires n’usaient plus de leur droit de pacage dans la Commune de Laprairie depuis quelques années et que par voie de conséquence les Jésuites n’en touchaient plus aucun revenu; la Compagnie de Jésus résolut en 1952 de s’adresser au premier ministre Maurice Duplessis afin d’obtenir qu’elle soit désignée comme  la seule propriétaire de la Commune de Laprairie. C’est ainsi qu’en 1953 l’honorable Duplessis fit voter le Bill 204 qui retirait aux ayants droit l’accès au pacage, mais obligeait par contre les Jésuites, au moment de la vente totale de la Commune, à verser 20% du produit de la vente aux censitaires en compensation de la perte de leur droit de pacage.

    Plusieurs ignoraient sans doute que de 1953 à 1963 des acheteurs sérieux s’étaient présentés à la Compagnie de Jésus avec le dessein d’acheter la dite Commune de Laprairie. Or la Compagnie de Jésus ne pouvait donner suite aux offres d’achat sans au préalable avoir conclu une entente définitive avec les censitaires. Par contre le président de l’organisme légal qui naguère les représentait n’avait tenu aucune assemblée des Syndics depuis au moins 10 ans et n’avait tenu non plus aucune élection, alors que le statut juridique exigeait des élections à tous les 2 ans. Qu’il soit bien clair ici que le désir de la Compagnie de Jésus était de mettre fin de façon équitable et définitive à un régime qui ne correspondait plus ni aux besoins, ni aux conditions économiques du temps.

    À noter que déjà, à titre de compensation partielle pour la perte des droits de pâturage des censitaires, la Compagnie de Jésus avait cédé une ferme à la Société d’Agriculture du Comté de Laprairie, à une prix nominal de six mille dollars (6 000,00$).

    C’est ainsi que le 23 février 1963 la Cie de Jésus par l’entremise de son chargé de pouvoirs le révérend père Arthur Dubois s.j., s’adressait au premier Ministre Jean Lesage, et qu’en conséquence le paragraphe 4 du Bill 204 qui obligeait la Cie à verser 20% du produit de la vente de la Commune, fut abrogé et remplacé par le suivant : “la Compagnie de Jésus versera au comptant aux Président et Syndics de la Commune de Laprairie de la Magdeleine, ou à défaut de tel organisme légalement constitué à Me Paul Boucher notaire et greffier dudit organisme, la somme de 200 000,00$. Le versement de la dite somme entraînera l’acquittement de toute redevance aux censitaires pouvant résulter du bail à cens du 19 mai 1694 devant Me Adhémar, par le représentant des Jésuites”.

    Par voie de conséquence une période de neuf mois fut par la suite accordée aux censitaires pour s’identifier légalement et ce à la satisfaction de Me Denis Durocher avocat à Laprairie. Plus tard le 5 avril 1963 la Compagnie de Jésus convoquait les censitaires à une assemblée générale à la salle du Bureau d’Enregistrement de Laprairie, à laquelle assemblée, un très grand nombre de censitaires étaient présents.

    Comme la Corporation des Président et Syndics ne comptait plus alors que 2 membres et se trouvait de ce fait dans l’illégalité, les censitaires ont donc sur le champ procédé à la formation légale d’un corps de syndics composé de 5 membres; messieurs Donat Duquette, Pierre Gagnon, Lucien Ferdais, Robert Coupal et Ildège Brosseau, ont été proposés et élus par acclamation formant la “Corporation des Président et Syndics” maintenant légalement constituée. Une fois élus les syndics ont nommé M. Donat Duquette président et réengagé Me Paul Boucher à titre de notaire et greffier.

    Par la suite, les 2 représentants de la Cie de Jésus, dont le Père Dubois chargé de pouvoirs ont exposé l’essentiel du contenu du Bill 195; à savoir 200 000,00$ à titre de compensation. Suite à cet exposé les censitaires se réunirent afin de délibérer sur la pertinence d’accepter ou de refuser cette somme. S’ensuivit une proposition par Clément Brosseau à l’Effet que la somme ne devrait pas être moindre que 350 000,00$; l’assemblée acquiesça à l’unanimité. Cette demande n’a pas été acceptée séance tenante, les deux parties se sont rencontrées par la suite et c’Est seulement en juin 1963 que la Compagnie de Jésus a accepté de verser cette somme aux censitaires comme compensation finale. Compte tenu que le père Dubois croyait que la répartition s’avérait impraticable et que le greffier de la Corporation des Syndics abondait dans le même sens, c’est à ce moment que le Président et les Syndics ont proposé que M. Ildège Brosseau, syndic, soit nommé assistant-greffier et il a accepté, étant ainsi désigné, de faire tous les efforts qui s’imposeraient pour en arriver à une juste répartition.

    Au cours des années 1963 et 1964 l’assistant-greffier a fait le recensement de tous les censitaires habitant dans la Ville de Laprairie et dans les autres paroisses concernés; ce qui a demandé un travail très considérable. Consulter les rôles municipaux de chaque paroisse, les bureaux d’enregistrements de Laprairie et de St-Jean, nombreux voyages à Québec, rencontres avec le notaire Richard attaché au service des Rentes seigneuriales, pour vérification de la rente de chaque propriétaire de la Ville de Laprairie, confection du bordereau de distribution, préparation des avis publics, réunions de la Corporation souventes fois et rencontre avec Me Denis Durocher avocat pour le bill 104 qui a été accepté au Comité des bills privés le 15 juillet 1965.

    Enfin l’assistant-greffier Ildège Brosseau déclare que le bill 104 suit son cours tel que rédigé; à savoir qu’un bordereau de distribution des biens de la Corporation indique les noms des personnes qui ont droit à un paiement, ainsi que le montant de ce paiement. Qu’un avis a été donné le 17 septembre 1965 dans toutes les paroisses concernées afin que chaque personne intéressée puisse porter plainte, si c’est sa volonté, dans les trente jours à partir du 18 octobre 1965 et que la somme mentionnée sur le bordereau de distribution sera remise à chaque intéressé. Qu’un acte authentique de quittance dans lequel apparaît la signature de toutes les personnes qui ont reçu paiement a été fait par le greffier de la Corporation des président et syndic Me Paul Boucher notaire et que cet acte sera remis à qui de droit.

    Cette déclaration prouve que l’échéancier a suivi son cours et que les 350 000,00$ ont été partagés et payés aux 713 censitaires mentionnés au bordereau de distribution, tel que précisé au bill 104 et décrit à l’article 1 a) b) c) et d). Par la suite le syndic et assistant-greffier Ildège Brosseau prouva que la somme de 350 000,00$ fut partagée entre le 713 censitaires d’une façon satisfaisante pour chacun : en fait foi le rapport du comptable Gilles Lussier c.a., demeurant à Laprairie, et communiqué au Ministère du Revenu du Québec, confirmant l’acquittement complet des dettes d’impôts envers ce même Ministère dans les rapports T2 et C17 pour les années 1965-1966.

    Le 30 mai 1966 l’assistant-greffier Ildège Brosseau faisait parvenir à Me Louis Gravel notaire une missive l’informant que le 10 mars 1966 les représentants de la “Corporation des Président et Syndics de la Commune de LaPrairie de la Magdeleine” accompagnés du greffier Paul Boucher notaire, s’étaient présentés au secrétariat de la Province de Québec, pour demander la dissolution de la dite Corporation ci-haut mentionnée et que c’est Me Lalonde qui les avait alors reçus.

    “Ce même jour nous avons remis à Me Lalonde le bordereau de distribution sur lequel apparaissaient les noms de tous les censitaires de la dite Corporation, ainsi que le montant désignant la part de chacun, et aussi l’acte de quittance préparé par le greffier Paul Boucher, notaire, sur lequel acte apparaît la signature de chaque censitaire qui a participé au partage des biens de la Corporation.”

    Par la suite monsieur Gilles Lussier, comptable, a communiqué avec le Ministère du Revenu du Québec déclarant que toutes dettes avaient été acquittées envers le dit Ministère.

    “C’est la raison pour laquelle avec l’autorisation du président Donat Duquette, je vous adresse la présente, pour que demande soit faite à l’honorable Secrétaire de la Province de Québec, d’accorder la dissolution de la Corporation des Président et Syndics de la Commune de Laprairie de la Magdeleine.” Le 8 juillet 1966 le greffier Me Paul Boucher recevait la lettre suivante : “Nous accusons réception de votre lettre du 18 mars dernier ainsi qu’une requête et autres documents concernant la dissolution de la Corporation ci-haut mentionnée. Nous désirons vous informer que la requête pour dissolution de cette Corporation a été acceptée et qu’un avis de dissolution de cette Corporation sera publié une fois par l’Honorable Secrétaire de la Province dans la Gazette officielle de Québec et que la Corporation cessera d’exister, et que sa charte sera annulée à compter de la date fixée dans cet avis, conformément à l’article 5 de la loi concernant les Président et Syndics de la Commune de Laprairie de la Magdeleine, 12-13 Elizabeth II chapitre 114.” Et c’est signé : Louis de B. Gravel, notaire, Directeur du Service des Compagnies.

    Ainsi prend fin, en 1966, l’existence de la Commune de Laprairie de la Magdeleine. La Compagnie de Jésus se trouve donc par voie de conséquence libérée des droits accordés aux censitaires depuis 1694. Soulagée de ces contraintes, elle peut donc disposer de ces terrains comme bon lui semble.

    Ildège Brosseau

    N.D.L.R. Le texte qui précède est conservé aux archives de la SHLM dans sa forme originale et manuscrite.

    Un livre a déjà été écrit par l’abbé Élisée Choquet, lequel a pour titre “Les Communes de Laprairie”, “Communes” dont l’origine remonte au 19 mars 1694 lors d’un contrat passé devant Me Adhémar notaire. Dans ce livre l’auteur a fourni de nombreux détails sur à peu près tout ce qui s’est passé depuis la date d’acquisition des Communes par la Compagnie de Jésus jusqu’au 25 mars 1936. Si j’ai songé à donner une suite au livre de l’abbé Choquet, c’est dans le seul but de compléter l’histoire de la Commune de Laprairie de la Magdeleine de 1935 jusqu’à sa phase finale à laquelle j’ai participé avec beaucoup d’intensité. Toute l’affaire s’est terminée le 8 juillet 1966 après dissolution de la Corporation des Président et Syndics et annulation de la charte. Ildège Brosseau Syndic et assistant greffier. Ainsi de 1935 à 1941 tout se passe de façon habituelle, c’est-à-dire que les censitaires font paître leurs animaux dans la dite commune alors que les Président et Syndics exercent une surveillance et voient à l’entretien des clôtures afin de s’assurer que les animaux soient toujours gardés à l’intérieur des limites de la commune. Cependant en octobre 1941, l’honorable Ministre des Munitions et Approvisionnements a requis pour fins de mesures de guerre, (il devait s’agir d’exercices de tir et de cible pour les aviateurs attachés au champ d’aviation de St-Jean P.Q.) l’occupation d’un certain emplacement sis près de Laprairie dans le Comté de Laprairie. L’emplacement précité faisait partie du terrain communément appelé la Commune de Laprairie, c’est-à-dire de toute la partie du lot 673 contenant en superficie 900 arpents plus ou moins. La durée de l’occupation des dits lieux fut fixée à toute la période de la guerre ainsi qu’à l’année qui devait suivre, avec effet rétroactif depuis la prise de possession en date du 19 novembre 1941. Le bail prévoyait des versements de 2,00$ par arpent en superficie par année ce qui représentait un loyer annuel de 1 800,00$ pour toute la durée de la guerre. Cependant comme le bail fut prolongé jusqu’au 31 décembre 1943, la Corporation reçut donc du gouvernement fédéral un montant total de 4 193,00$. L’acte fut signé le 20 juillet 1944 devant Me Émile Gravel, notaire, résidant et pratiquant en la cité de St-Lambert; étaient présents le président Arthur Lanctot et les syndics Clovis Page, Raoul Lussier, Roch Dupuis et Ernest Régnier ainsi que le greffier Paul Boucher, notaire. Faut-il ajouter ici qu’à partie de 1941 les censitaires n’ont plus usé de leur droit de pacage s’étant départis d’un grand nombre d’animaux, et ce pour la durée de la guerre et par la suite, pour un temps illimité. Or le 11 juin 1948 la Corporation des Président et Syndics, d’un commun accord avec la Compagnie de Jésus, cède pour la somme de 1,00$ à la Communauté des Frères de l’Instruction chrétienne de Laprairie, pour fins éducationnelles seulement, un lopin de terre mesurant environ huit cents pieds de front, par une profondeur d’environ quatorze cents pieds plus ou moins. Ledit lopin est prélevé sur le lot partie 673 de la Commune de Laprairie. L’année suivante la Commune devait subir une nouvelle amputation puisque le 13 juillet 1949 la Corporation des Président et Syndics et la Compagnie de Jésus consentaient à une vente de terrain à la ville de Laprairie pour la somme de 1,00$ et ce pour tous les terrains achetés dans la Commune de Laprairie. Or comme il existait une loi qui stipulait que la Corporation des Président et Syndics de la Commune de Laprairie était autorisée à consentir ces ventes pour les ayants droit, à la condition expresse que la ville paie aux dits syndics une somme de 20,00$ pour chaque arpent vendu. Et tout porte à croire que la Ville de Laprairie a bel et bien payé cette somme. Considérant que les censitaires n’usaient plus de leur droit de pacage dans la Commune de Laprairie depuis quelques années et que par voie de conséquence les Jésuites n’en touchaient plus aucun revenu; la Compagnie de Jésus résolut en 1952 de s’adresser au premier ministre Maurice Duplessis afin d’obtenir qu’elle soit désignée comme  la seule propriétaire de la Commune de Laprairie. C’est ainsi qu’en 1953 l’honorable Duplessis fit voter le Bill 204 qui retirait aux ayants droit l’accès au pacage, mais obligeait par contre les Jésuites, au moment de la vente totale de la Commune, à verser 20% du produit de la vente aux censitaires en compensation de la perte de leur droit de pacage. Plusieurs ignoraient sans doute que de 1953 à 1963 des acheteurs sérieux s’étaient présentés à la Compagnie de Jésus avec le dessein d’acheter la dite Commune de Laprairie. Or la Compagnie de Jésus ne pouvait donner suite aux offres d’achat sans au préalable avoir conclu une entente définitive avec les censitaires. Par contre le président de l’organisme légal qui naguère les représentait n’avait tenu aucune assemblée des Syndics depuis au moins 10 ans et n’avait tenu non plus aucune élection, alors que le statut juridique exigeait des élections à tous les 2 ans. Qu’il soit bien clair ici que le désir de la Compagnie de Jésus était de mettre fin de façon équitable et définitive à un régime qui ne correspondait plus ni aux besoins, ni aux conditions économiques du temps. À noter que déjà, à titre de compensation partielle pour la perte des droits de pâturage des censitaires, la Compagnie de Jésus avait cédé une ferme à la Société d’Agriculture du Comté de Laprairie, à une prix nominal de six mille dollars (6 000,00$). C’est ainsi que le 23 février 1963 la Cie de Jésus par l’entremise de son chargé de pouvoirs le révérend père Arthur Dubois s.j., s’adressait au premier Ministre Jean Lesage, et qu’en conséquence le paragraphe 4 du Bill 204 qui obligeait la Cie à verser 20% du produit de la vente de la Commune, fut abrogé et remplacé par le suivant : “la Compagnie de Jésus versera au comptant aux Président et Syndics de la Commune de Laprairie de la Magdeleine, ou à défaut de tel organisme légalement constitué à Me Paul Boucher notaire et greffier dudit organisme, la somme de 200 000,00$. Le versement de la dite somme entraînera l’acquittement de toute redevance aux censitaires pouvant résulter du bail à cens du 19 mai 1694 devant Me Adhémar, par le représentant des Jésuites”. Par voie de conséquence une période de neuf mois fut par la suite accordée aux censitaires pour s’identifier légalement et ce à la satisfaction de Me Denis Durocher avocat à Laprairie. Plus tard le 5 avril 1963 la Compagnie de Jésus convoquait les censitaires à une assemblée générale à la salle du Bureau d’Enregistrement de Laprairie, à laquelle assemblée, un très grand nombre de censitaires étaient présents. Comme la Corporation des Président et Syndics ne comptait plus alors que 2 membres et se trouvait de ce fait dans l’illégalité, les censitaires ont donc sur le champ procédé à la formation légale d’un corps de syndics composé de 5 membres; messieurs Donat Duquette, Pierre Gagnon, Lucien Ferdais, Robert Coupal et Ildège Brosseau, ont été proposés et élus par acclamation formant la “Corporation des Président et Syndics” maintenant légalement constituée. Une fois élus les syndics ont nommé M. Donat Duquette président et réengagé Me Paul Boucher à titre de notaire et greffier. Par la suite, les 2 représentants de la Cie de Jésus, dont le Père Dubois chargé de pouvoirs ont exposé l’essentiel du contenu du Bill 195; à savoir 200 000,00$ à titre de compensation. Suite à cet exposé les censitaires se réunirent afin de délibérer sur la pertinence d’accepter ou de refuser cette somme. S’ensuivit une proposition par Clément Brosseau à l’Effet que la somme ne devrait pas être moindre que 350 000,00$; l’assemblée acquiesça à l’unanimité. Cette demande n’a pas été acceptée séance tenante, les deux parties se sont rencontrées par la suite et c’Est seulement en juin 1963 que la Compagnie de Jésus a accepté de verser cette somme aux censitaires comme compensation finale. Compte tenu que le père Dubois croyait que la répartition s’avérait impraticable et que le greffier de la Corporation des Syndics abondait dans le même sens, c’est à ce moment que le Président et les Syndics ont proposé que M. Ildège Brosseau, syndic, soit nommé assistant-greffier et il a accepté, étant ainsi désigné, de faire tous les efforts qui s’imposeraient pour en arriver à une juste répartition. Au cours des années 1963 et 1964 l’assistant-greffier a fait le recensement de tous les censitaires habitant dans la Ville de Laprairie et dans les autres paroisses concernés; ce qui a demandé un travail très considérable. Consulter les rôles municipaux de chaque paroisse, les bureaux d’enregistrements de Laprairie et de St-Jean, nombreux voyages à Québec, rencontres avec le notaire Richard attaché au service des Rentes seigneuriales, pour vérification de la rente de chaque propriétaire de la Ville de Laprairie, confection du bordereau de distribution, préparation des avis publics, réunions de la Corporation souventes fois et rencontre avec Me Denis Durocher avocat pour le bill 104 qui a été accepté au Comité des bills privés le 15 juillet 1965. Enfin l’assistant-greffier Ildège Brosseau déclare que le bill 104 suit son cours tel que rédigé; à savoir qu’un bordereau de distribution des biens de la Corporation indique les noms des personnes qui ont droit à un paiement, ainsi que le montant de ce paiement. Qu’un avis a été donné le 17 septembre 1965 dans toutes les paroisses concernées afin que chaque personne intéressée puisse porter plainte, si c’est sa volonté, dans les trente jours à partir du 18 octobre 1965 et que la somme mentionnée sur le bordereau de distribution sera remise à chaque intéressé. Qu’un acte authentique de quittance dans lequel apparaît la signature de toutes les personnes qui ont reçu paiement a été fait par le greffier de la Corporation des président et syndic Me Paul Boucher notaire et que cet acte sera remis à qui de droit. Cette déclaration prouve que l’échéancier a suivi son cours et que les 350 000,00$ ont été partagés et payés aux 713 censitaires mentionnés au bordereau de distribution, tel que précisé au bill 104 et décrit à l’article 1 a) b) c) et d). Par la suite le syndic et assistant-greffier Ildège Brosseau prouva que la somme de 350 000,00$ fut partagée entre le 713 censitaires d’une façon satisfaisante pour chacun : en fait foi le rapport du comptable Gilles Lussier c.a., demeurant à Laprairie, et communiqué au Ministère du Revenu du Québec, confirmant l’acquittement complet des dettes d’impôts envers ce même Ministère dans les rapports T2 et C17 pour les années 1965-1966. Le 30 mai 1966 l’assistant-greffier Ildège Brosseau faisait parvenir à Me Louis Gravel notaire une missive l’informant que le 10 mars 1966 les représentants de la “Corporation des Président et Syndics de la Commune de LaPrairie de la Magdeleine” accompagnés du greffier Paul Boucher notaire, s’étaient présentés au secrétariat de la Province de Québec, pour demander la dissolution de la dite Corporation ci-haut mentionnée et que c’est Me Lalonde qui les avait alors reçus. “Ce même jour nous avons remis à Me Lalonde le bordereau de distribution sur lequel apparaissaient les noms de tous les censitaires de la dite Corporation, ainsi que le montant désignant la part de chacun, et aussi l’acte de quittance préparé par le greffier Paul Boucher, notaire, sur lequel acte apparaît la signature de chaque censitaire qui a participé au partage des biens de la Corporation.” Par la suite monsieur Gilles Lussier, comptable, a communiqué avec le Ministère du Revenu du Québec déclarant que toutes dettes avaient été acquittées envers le dit Ministère. “C’est la raison pour laquelle avec l’autorisation du président Donat Duquette, je vous adresse la présente, pour que demande soit faite à l’honorable Secrétaire de la Province de Québec, d’accorder la dissolution de la Corporation des Président et Syndics de la Commune de Laprairie de la Magdeleine.” Le 8 juillet 1966 le greffier Me Paul Boucher recevait la lettre suivante : “Nous accusons réception de votre lettre du 18 mars dernier ainsi qu’une requête et autres documents concernant la dissolution de la Corporation ci-haut mentionnée. Nous désirons vous informer que la requête pour dissolution de cette Corporation a été acceptée et qu’un avis de dissolution de cette Corporation sera publié une fois par l’Honorable Secrétaire de la Province dans la Gazette officielle de Québec et que la Corporation cessera d’exister, et que sa charte sera annulée à compter de la date fixée dans cet avis, conformément à l’article 5 de la loi concernant les Président et Syndics de la Commune de Laprairie de la Magdeleine, 12-13 Elizabeth II chapitre 114.” Et c’est signé : Louis de B. Gravel, notaire, Directeur du Service des Compagnies. Ainsi prend fin, en 1966, l’existence de la Commune de Laprairie de la Magdeleine. La Compagnie de Jésus se trouve donc par voie de conséquence libérée des droits accordés aux censitaires depuis 1694. Soulagée de ces contraintes, elle peut donc disposer de ces terrains comme bon lui semble. Ildège Brosseau N.D.L.R. Le texte qui précède est conservé aux archives de la SHLM dans sa forme originale et manuscrite....