Sélection d'une édition

    L’année de la grande noirceur

    La SHLM possède une importante collection de volumes anciens datant du début du siècle dernier et même du siècle précédent, dont plusieurs bulletins de sociétés d’histoire ou d’archivistes.

    Ces livres sont bondés de textes très intéressants sur l’histoire générale, sur des événements et des individus. Ils méritent d’être consultés lorsqu’on fait des recherches en généalogie, surtout lorsqu’on veut y greffer des notions d’histoire.

    « Le 15 octobre 1785, à une heure de l’après-midi, d’épaisses ténèbres, accompagnées de violents coups de tonnerre, changèrent tout à coup le jour en nuit.

    Le lendemain, qui était un dimanche, le phénomène se renouvela. Vers le milieu du jour, l’obscurité devint aussi intense qu’au milieu de la nuit. Les éclairs sillonnèrent la nue, et les coups de tonnerre se répercutèrent avec un fracas épouvantable.

    À Montréal, croyant la fin du monde sur le point d’arriver, le peuple se précipita dans les églises. La foule se porta surtout à l’église Notre-Dame de Bonsecours. Cependant les ténèbres continuaient toujours et le tonnerre se faisait entendre de minute en minute. Alors une pensée vint aux fidèles affolés :— allons chercher Madame d’Eschambault, s’écria-t-on de touts parts. Madame d’Eschambault était une octogénaire qui vivait comme une véritable religieuse dans sa maison située à l’endroit où a été bâti depuis le marché Bonsecours.

    “Quelques dames se rendent donc à son domicile, et la conjurent de venir. Cédant à leurs instances, madame d’Eschambault se rend à la chapelle, appuyée sur leurs bras. Arrivée dans l’antique sanctuaire, elle commence des prières auxquelles toute l’assistance répond. La confiance ne fut pas vaine. Ces prières n’étaient pas encore achevées, que le soleil reparut à l’horizon, faisant renaître la joie dans tous les coeurs.”

    À Québec, la frayeur ne fut pas moins grande. Une lettre de la mère Saint-Louis de Gonzague, religieuse ursuline, en date du 24 octobre 1785, nous apprend que ce phénomène fut l’occasion d’un grand nombre de conversions remarquables.

    C’est cette obscurité qui se renouvela par tout le pays à trois différentes reprises qui fit appeler l’année1785 l’année de la grande noirceur.»
     

    Extrait de Bulletins de Recherches historiques, 1898,Vol. 4, pp.83-84

    La SHLM possède une importante collection de volumes anciens datant du début du siècle dernier et même du siècle précédent, dont plusieurs bulletins de sociétés d’histoire ou d’archivistes. Ces livres sont bondés de textes très intéressants sur l’histoire générale, sur des événements et des individus. Ils méritent d’être consultés lorsqu’on fait des recherches en généalogie, surtout lorsqu’on veut y greffer des notions d’histoire. « Le 15 octobre 1785, à une heure de l’après-midi, d’épaisses ténèbres, accompagnées de violents coups de tonnerre, changèrent tout à coup le jour en nuit. Le lendemain, qui était un dimanche, le phénomène se renouvela. Vers le milieu du jour, l’obscurité devint aussi intense qu’au milieu de la nuit. Les éclairs sillonnèrent la nue, et les coups de tonnerre se répercutèrent avec un fracas épouvantable. À Montréal, croyant la fin du monde sur le point d’arriver, le peuple se précipita dans les églises. La foule se porta surtout à l’église Notre-Dame de Bonsecours. Cependant les ténèbres continuaient toujours et le tonnerre se faisait entendre de minute en minute. Alors une pensée vint aux fidèles affolés :— allons chercher Madame d’Eschambault, s’écria-t-on de touts parts. Madame d’Eschambault était une octogénaire qui vivait comme une véritable religieuse dans sa maison située à l’endroit où a été bâti depuis le marché Bonsecours. “Quelques dames se rendent donc à son domicile, et la conjurent de venir. Cédant à leurs instances, madame d’Eschambault se rend à la chapelle, appuyée sur leurs bras. Arrivée dans l’antique sanctuaire, elle commence des prières auxquelles toute l’assistance répond. La confiance ne fut pas vaine. Ces prières n’étaient pas encore achevées, que le soleil reparut à l’horizon, faisant renaître la joie dans tous les coeurs.” À Québec, la frayeur ne fut pas moins grande. Une lettre de la mère Saint-Louis de Gonzague, religieuse ursuline, en date du 24 octobre 1785, nous apprend que ce phénomène fut l’occasion d’un grand nombre de conversions remarquables. C’est cette obscurité qui se renouvela par tout le pays à trois différentes reprises qui fit appeler l’année1785 l’année de la grande noirceur.»   Extrait de Bulletins de Recherches historiques, 1898,Vol. 4, pp.83-84...

    Avis de recherche

    Je planifie un texte sur la « vache canadienne » qui fut longtemps la maîtresse de nos pâturages.

    Pour compléter cet article, je trouverais idéal d'y inclure une photographie d'une vache ou d'un troupeau prise sur notre territoire, plutôt qu'une photo des États-Unis.

    Le prêt d'une telle photo serait très apprécié, le temps de la numériser pour reproduction dans notre bulletin.

    Je planifie un texte sur la « vache canadienne » qui fut longtemps la maîtresse de nos pâturages. Pour compléter cet article, je trouverais idéal d'y inclure une photographie d'une vache ou d'un troupeau prise sur notre territoire, plutôt qu'une photo des États-Unis. Le prêt d'une telle photo serait très apprécié, le temps de la numériser pour reproduction dans notre bulletin....

    La tire Ste-Catherine

    Une tradition québécoise vieille de 350 ans se perpétue à l’arrivée du mois de novembre et plus particulièrement autour du 25 : celle de la tire Sainte-Catherine.

    Le Bulletin de recherches historique (vol. 6, 1900) écrit :

    « La fête de sainte Catherine est toujours un événement dans la province du Québec. Ce jour-là, les familles se réunissent, et l’un des agréments de la soirée est d’étirer la tire. D’où vient ce mot canadien de tire? On dit que ce bonbon fut ainsi nommé par la bienheureuse Marguerite Bourgeoys, première supérieure des sœurs de la Congrégation de Notre-Dame.

    La bonne religieuse aurait inventé le bonbon du pays, pour attirer à elle les petits sauvages qu’elle voulait instruire, et comme les jeunes indiens s’y laissaient prendre comme des oiseaux à la glu, sœur Bourgeoys aurait baptisé le sucre ainsi préparé et qui attirait si bien, du nom de tire. »

    Le texte n’est pas signé et la source qui appuierait l’opinion n’est pas indiquée.

    L’auteur avait sans doute de bonnes intentions, mais il s’est laissé emporter par ses sentiments.

    Pourtant, il tenait la réponse à son interrogation dans sa deuxième phrase : « … et l’un des agréments de la soirée est d’étirer la tire… »

    Ce bonbon est essentiellement fait de mélasse bouillie avec un peu de beurre et de farine. Le résultat est une pâte collante très foncée qui durcit à l’air et se cristallise en refroidissant.

    Pour obtenir le bonbon que l’on ne connaît plus aujourd’hui que sous une forme industrielle, il fallait étirer longuement et à plusieurs reprises, à la main, cette pâte lourde et noire.

    Le processus débutait par un brassage à la cuiller, comme pour le sucre à la crème, alors que le produit était encore chaud, une opération relativement fatigante lorsque le volume était important. Cela exigeait de partager l’effort et produisait un début de blondissement.

    Par la suite, rapidement pour ne pas que le futur bonbon durcisse, la famille entière était mise à l’ouvrage. Chacun s’enduisait les mains de beurre, saisissait une boule de pâte et l’étirait à bout de bras, repliant plusieurs fois sur lui-même le filet obtenu.

    L’appareil blondissait et s’amollissait au fur et à mesure de l’étirement. Satisfaction atteinte, on roulait la pâte en boudins qu’on coupait ensuite en bouchées. Quel plaisir c’était alors de se sucrer le bec!

    Il est fort probable que Marguerite Bourgeoys n’ait pas eu un instant pour trouver un nom à son bonbon, mais la tradition de l’opération s’est perpétuée dans la simplicité de l’action et du vocable.

    Une tradition québécoise vieille de 350 ans se perpétue à l’arrivée du mois de novembre et plus particulièrement autour du 25 : celle de la tire Sainte-Catherine. Le Bulletin de recherches historique (vol. 6, 1900) écrit : « La fête de sainte Catherine est toujours un événement dans la province du Québec. Ce jour-là, les familles se réunissent, et l’un des agréments de la soirée est d’étirer la tire. D’où vient ce mot canadien de tire? On dit que ce bonbon fut ainsi nommé par la bienheureuse Marguerite Bourgeoys, première supérieure des sœurs de la Congrégation de Notre-Dame. La bonne religieuse aurait inventé le bonbon du pays, pour attirer à elle les petits sauvages qu’elle voulait instruire, et comme les jeunes indiens s’y laissaient prendre comme des oiseaux à la glu, sœur Bourgeoys aurait baptisé le sucre ainsi préparé et qui attirait si bien, du nom de tire. » Le texte n’est pas signé et la source qui appuierait l’opinion n’est pas indiquée. L’auteur avait sans doute de bonnes intentions, mais il s’est laissé emporter par ses sentiments. Pourtant, il tenait la réponse à son interrogation dans sa deuxième phrase : « … et l’un des agréments de la soirée est d’étirer la tire… » Ce bonbon est essentiellement fait de mélasse bouillie avec un peu de beurre et de farine. Le résultat est une pâte collante très foncée qui durcit à l’air et se cristallise en refroidissant. Pour obtenir le bonbon que l’on ne connaît plus aujourd’hui que sous une forme industrielle, il fallait étirer longuement et à plusieurs reprises, à la main, cette pâte lourde et noire. Le processus débutait par un brassage à la cuiller, comme pour le sucre à la crème, alors que le produit était encore chaud, une opération relativement fatigante lorsque le volume était important. Cela exigeait de partager l’effort et produisait un début de blondissement. Par la suite, rapidement pour ne pas que le futur bonbon durcisse, la famille entière était mise à l’ouvrage. Chacun s’enduisait les mains de beurre, saisissait une boule de pâte et l’étirait à bout de bras, repliant plusieurs fois sur lui-même le filet obtenu. L’appareil blondissait et s’amollissait au fur et à mesure de l’étirement. Satisfaction atteinte, on roulait la pâte en boudins qu’on coupait ensuite en bouchées. Quel plaisir c’était alors de se sucrer le bec! Il est fort probable que Marguerite Bourgeoys n’ait pas eu un instant pour trouver un nom à son bonbon, mais la tradition de l’opération s’est perpétuée dans la simplicité de l’action et du vocable....

    Problème de pollution de l’air

    La pollution industrielle de notre environnement n’est pas une préoccupation de notre époque seulement. En 1903, le maire de La Prairie, le Docteur Brisson, négociait, au nom du conseil, suite à des plaintes des citoyens, particulièrement des Frères de l’Instruction chrétienne voisins de la fabrique et dans la ligne des vents dominants, avec la direction de l’entreprise La Prairie Bricks, la nécessité de modifier leur technique de cuisson pour diminuer la fumée et en changer la nature.

    Il eut des discussions avec le gérant de l’entreprise et fit même parvenir des recommandations au secrétaire général du manufacturier en s’appuyant sur un article récent de La Presse qui expliquait une méthode nouvelle prometteuse à cet effet.

    Dans une lettre du 23 mars 1903, il incitait fortement la compagnie à tout le moins tenter l’expérience de cette méthode et soulignait qu’il était préférable de faire cet essai et de constater son efficacité ou non, montrant ainsi leur bonne foi et surtout en évitant ou retardant une possibilité de poursuite judiciaire qui pourrait même viser la municipalité.

    Source : lettre du Dr Brisson transmise par Mme Charuest (59) qui effectue la transcription de la correspondance du Dr Brisson.

    La pollution industrielle de notre environnement n’est pas une préoccupation de notre époque seulement. En 1903, le maire de La Prairie, le Docteur Brisson, négociait, au nom du conseil, suite à des plaintes des citoyens, particulièrement des Frères de l’Instruction chrétienne voisins de la fabrique et dans la ligne des vents dominants, avec la direction de l’entreprise La Prairie Bricks, la nécessité de modifier leur technique de cuisson pour diminuer la fumée et en changer la nature. Il eut des discussions avec le gérant de l’entreprise et fit même parvenir des recommandations au secrétaire général du manufacturier en s’appuyant sur un article récent de La Presse qui expliquait une méthode nouvelle prometteuse à cet effet. Dans une lettre du 23 mars 1903, il incitait fortement la compagnie à tout le moins tenter l’expérience de cette méthode et soulignait qu’il était préférable de faire cet essai et de constater son efficacité ou non, montrant ainsi leur bonne foi et surtout en évitant ou retardant une possibilité de poursuite judiciaire qui pourrait même viser la municipalité. Source : lettre du Dr Brisson transmise par Mme Charuest (59) qui effectue la transcription de la correspondance du Dr Brisson....

    La Vie… de nos ancêtres

    Nos ancêtres, avant d’émigrer en Nouvelle-France, ne vivaient généralement pas dans la ouate — qui n’existait pas encore d’ailleurs. Leurs conditions étaient difficiles. Les guerres à répétition, celles des rois puis celles, plus locales des nobles entre eux pour la possession de territoire, les règlements de comptes, chicanes de familles ou d’héritage, etc., réduisaient régulièrement les populations d’hommes aptes à travailler, détruisaient les demeures et les champs. La propriété foncière reposait entièrement ou presque entre les mains du roi, des nobles et du clergé (évêchés, abbayes). Peut-on, dès lors, se surprendre de l’intérêt que plusieurs ont eu à s’expatrier sur la foi des promesses inouïes qu’on leur faisait.

    Poursuivons notre quête sur leur mode de vie avant leur prise de décision par des extraits du volume de Pierre GOUBERT, La vie quotidienne des paysans français au XVIIe siècle.

    Les intérieurs paysans (suite et fin)

    « Le plus inattendu dans ce que, après Balzac, on appellera plus tard les "inventaires de commissaire-priseur", c’est la présence d’armes : pas seulement de solides couteaux ou des faux qu’on peut renverser, mais des arquebuses, puis des mousquets, surtout ce qu’on désigne sous le nom alors vague de fuzil ; aux premières lectures, on peut croire au ramassage, en des lieux proches d’anciens champs de bataille, de quelques trophées plus ou moins hors de service; du fait qu’on s’est battu un peu partout durant les guerres de Religion, la Fronde et même un peu plus tard (mais alors aux frontières), le cas a dû être fréquent.

    Il y a tout de même bien trop d’armes, à moins de croire que tous les soldats abandonnaient les leurs ou les revendaient, cette seconde hypothèse n’étant pas absurde; mais des fusils se trouvent encore au XVIIIe siècle, alors que le royaume ne connaissait ni la guerre civile ni l’invasion (sauf locale et épisodique). On a pourtant bien du mal à déduire qu’il s’agissait là d’armes pour la chasse (et subsidiairement de défense contre les loups, nombreux, et les brigands, rares) : en effet, si le braconnage se révèle considérable et facile (et explique que le clapier fut très longtemps inconnu dans nos campagnes), on avait plutôt l’impression qu’on le pratiquait avec des collets, pièges, appeaux et autres habiles pratiques. Un petit mystère demeure donc, mais il ne pousse pas à soutenir que la vie des campagnes était idyllique, et sans danger.

    Une autre constatation, très générale, surprendra moins : même en des logis bien garnis de meubles et vêtements, on ne trouve jamais un sou vaillant, ou bien les héritiers déclarent que tout l’argent-monnoie (c’est le terme) a été employé pour les frais de maladie et de sépulture. Il est à noter que cette unanimité dans la déclaration de néant monétaire n’apparaît guère avant le milieu du siècle (en même temps que les impôts atteignent un niveau astronomique). Bien entendu, tout paysan, sauf les miséreux totaux (mais ils n’ont pas de maison) détient quelques pièces de billon (bronze) et même d’argent, ne serait-ce que pour payer l’impôt royal (et quelques petits autres) qu’il finit tout de même, gémissant et contraint, par régler sou à sou… Il est vrai qu’au lieu et place d’argent sont souvent déclarées, et décrites, quelques menues reconnaissances de dettes (envers un gros fermier, un parent, le curé, le seigneur, un usurier du secteur), couchées sur de petits bouts de solide papier et signées de "la marque" du défunt… Il vaut mieux déclarer son passif que son actif!

    L’inventaire d’intérieurs paysans qui vient d’être donné résulte rigoureusement de documents d’archives, propose en outre quelques interprétations et concerne strictement la partie la plus modeste (mais non pas la franchement misérable) et aussi la moins spécialisée (pour autant que ce mot ait alors un sens) de la paysannerie française; elle se trouvait la plus nombreuse, et de beaucoup : facilement la moitié des sujets du roi.

    Naturellement, cette évocation convient mal à tels groupes de ruraux un tant soit peu spécialisés, comme les vignerons ou les maraîchers, ou aux artisans-paysans pourvus d’un métier à tisser, d’une forge, d’un petit atelier, ou aubergistes, ou meuniers; encore moins aux grands laboureurs-fermiers-receveurs qui, sur leurs 100 hectares de terre à blé, meublaient presque bourgeoisement un grand bâtiment sur cour fermée, flanqué de plusieurs remises, hangars, étables, bergeries et écuries, et agrémenté d’un pigeonnier. Du moins retrouverons-nous, chemin faisant, une bonne partie des uns et des autres, dans leur cadre naturel et leurs milieux de vie.

    Avant d’y parvenir, tâchons d’accéder aux hommes eux-mêmes, leur famille, leur descendance, quasiment dans leur chair. »

    Nos ancêtres, avant d’émigrer en Nouvelle-France, ne vivaient généralement pas dans la ouate — qui n’existait pas encore d’ailleurs. Leurs conditions étaient difficiles. Les guerres à répétition, celles des rois puis celles, plus locales des nobles entre eux pour la possession de territoire, les règlements de comptes, chicanes de familles ou d’héritage, etc., réduisaient régulièrement les populations d’hommes aptes à travailler, détruisaient les demeures et les champs. La propriété foncière reposait entièrement ou presque entre les mains du roi, des nobles et du clergé (évêchés, abbayes). Peut-on, dès lors, se surprendre de l’intérêt que plusieurs ont eu à s’expatrier sur la foi des promesses inouïes qu’on leur faisait. Poursuivons notre quête sur leur mode de vie avant leur prise de décision par des extraits du volume de Pierre GOUBERT, La vie quotidienne des paysans français au XVIIe siècle. Les intérieurs paysans (suite et fin) « Le plus inattendu dans ce que, après Balzac, on appellera plus tard les "inventaires de commissaire-priseur", c’est la présence d’armes : pas seulement de solides couteaux ou des faux qu’on peut renverser, mais des arquebuses, puis des mousquets, surtout ce qu’on désigne sous le nom alors vague de fuzil ; aux premières lectures, on peut croire au ramassage, en des lieux proches d’anciens champs de bataille, de quelques trophées plus ou moins hors de service; du fait qu’on s’est battu un peu partout durant les guerres de Religion, la Fronde et même un peu plus tard (mais alors aux frontières), le cas a dû être fréquent. Il y a tout de même bien trop d’armes, à moins de croire que tous les soldats abandonnaient les leurs ou les revendaient, cette seconde hypothèse n’étant pas absurde; mais des fusils se trouvent encore au XVIIIe siècle, alors que le royaume ne connaissait ni la guerre civile ni l’invasion (sauf locale et épisodique). On a pourtant bien du mal à déduire qu’il s’agissait là d’armes pour la chasse (et subsidiairement de défense contre les loups, nombreux, et les brigands, rares) : en effet, si le braconnage se révèle considérable et facile (et explique que le clapier fut très longtemps inconnu dans nos campagnes), on avait plutôt l’impression qu’on le pratiquait avec des collets, pièges, appeaux et autres habiles pratiques. Un petit mystère demeure donc, mais il ne pousse pas à soutenir que la vie des campagnes était idyllique, et sans danger. Une autre constatation, très générale, surprendra moins : même en des logis bien garnis de meubles et vêtements, on ne trouve jamais un sou vaillant, ou bien les héritiers déclarent que tout l’argent-monnoie (c’est le terme) a été employé pour les frais de maladie et de sépulture. Il est à noter que cette unanimité dans la déclaration de néant monétaire n’apparaît guère avant le milieu du siècle (en même temps que les impôts atteignent un niveau astronomique). Bien entendu, tout paysan, sauf les miséreux totaux (mais ils n’ont pas de maison) détient quelques pièces de billon (bronze) et même d’argent, ne serait-ce que pour payer l’impôt royal (et quelques petits autres) qu’il finit tout de même, gémissant et contraint, par régler sou à sou... Il est vrai qu’au lieu et place d’argent sont souvent déclarées, et décrites, quelques menues reconnaissances de dettes (envers un gros fermier, un parent, le curé, le seigneur, un usurier du secteur), couchées sur de petits bouts de solide papier et signées de "la marque" du défunt... Il vaut mieux déclarer son passif que son actif! L’inventaire d’intérieurs paysans qui vient d’être donné résulte rigoureusement de documents d’archives, propose en outre quelques interprétations et concerne strictement la partie la plus modeste (mais non pas la franchement misérable) et aussi la moins spécialisée (pour autant que ce mot ait alors un sens) de la paysannerie française; elle se trouvait la plus nombreuse, et de beaucoup : facilement la moitié des sujets du roi. Naturellement, cette évocation convient mal à tels groupes de ruraux un tant soit peu spécialisés, comme les vignerons ou les maraîchers, ou aux artisans-paysans pourvus d’un métier à tisser, d’une forge, d’un petit atelier, ou aubergistes, ou meuniers; encore moins aux grands laboureurs-fermiers-receveurs qui, sur leurs 100 hectares de terre à blé, meublaient presque bourgeoisement un grand bâtiment sur cour fermée, flanqué de plusieurs remises, hangars, étables, bergeries et écuries, et agrémenté d’un pigeonnier. Du moins retrouverons-nous, chemin faisant, une bonne partie des uns et des autres, dans leur cadre naturel et leurs milieux de vie. Avant d’y parvenir, tâchons d’accéder aux hommes eux-mêmes, leur famille, leur descendance, quasiment dans leur chair. »...

    La Vie… de nos ancêtres

    Nos ancêtres, avant d’émigrer en Nouvelle-France, ne vivaient généralement pas dans la ouate – qui n’existait pas encore d’ailleurs. Leurs conditions étaient difficiles. Les guerres à répétition, celles des rois puis celles, plus locales des nobles entre eux pour la possession de territoire, les règlements de comptes, chicanes de familles ou d’héritage, etc., réduisaient régulièrement les populations d’hommes aptes à travailler, détruisaient les demeures et les champs. La propriété foncière reposait entièrement ou presque entre les mains du roi, des nobles et du clergé (évêchés, abbayes). Peut-on, dès lors, se surprendre de l’intérêt que plusieurs ont eu à s’expatrier sur la foi des promesses inouïes qu’on leur faisait.

    Poursuivons notre quête sur leur mode de vie avant leur prise de décision par des extraits du volume de Pierre GOUBERT, La vie quotidienne des paysans français au XVIIe siècle.

    Les intérieurs paysans

    « Nous sont décrits avec beaucoup plus d’abondance et donc de sécurité les intérieurs de ces maisons du XVIIe siècle, dont on ne peut le plus souvent que restituer… ou supposer les aspects externes – sauf les plus belles et les plus solides, ces exceptions.

    Habituellement, les greffiers du temps n’oublient ni une écuelle, ni une couverture trouée, ni une livre de laine à filer, pourvu que tout cela appartienne à la succession qu’il s’agit d’inventorier pour sauvegarder les droits des enfants mineurs (il y en a presque toujours) et prévoir parfois une vente aux enchères, car les objets nommés et décrits sont presque toujours estimés, suivant des usages rigoureux.

    Comme "meubles meublants" (style du temps) on découvre habituellement chez les paysans fort modestes – la majorité – une ou deux couchettes, une table, un ou deux bancs, un ou deux sièges bas du style trépied, un coffre ou deux, et c’est tout. Ni buffet ni armoire – ce dernier meuble apparaît pourtant vers la fin du siècle chez les Normands un peu cossus.

    La couchette, de bois, planches plus ou moins jointives, contient un lict (sens habituel, qui correspond vaguement à notre matelas), sorte d’étoffe grossière bourrée de paille (celle-ci parfois non protégée), dans quelques cas (basses-cours importantes, comme dans le Sud-Ouest), de plume (dans ce cas-là on dit parfois la couette). Des draps, pas toujours, on les garde pour les solennités et les linceuls; des couvertures, toujours, et plusieurs; souvent, il n’existe qu’une couchette – donc tout le monde partage la même chaleur, les mêmes puces et les mêmes épanchements; assez souvent tout de même, on en découvre deux, l’une parfois décrite nommément "à usage d’enfant". Serait-ce un berceau? Ce petit meuble apparaissant rarement, on peut supposer qu’on utilisait les hottes à vendange, suspendues, ou quelques planches grossièrement assemblées; le vrai berceau qui oscille au pied n’est presque jamais cité à la campagne, ou bien il est postérieur au XVIIe siècle.

    Le contenu des coffres – parfois, luxe suprême, l’un ferme à clé – est toujours précisé. Dans l’un, les provisions, blé ou farine; du sel (obligatoire, car vendu presque partout par les agents du roi) dans un pot, du lard plus ou moins rance dans un autre, mais pas toujours. Dans l’autre, les "hardes" et "nippes" (toujours le vocabulaire du temps) : au mieux, une paire de draps, bien sûr de chanvre; de nappes ou de serviettes, presque jamais; deux ou trois jupes souvent noires ou grises, autant de "corps", nos grands-mères disaient corsages, quelques chemises, toujours de chanvre, dont une ou deux d’enfants; de sous-vêtements, jamais; avec quelques chiffons ou morceaux d’étoffe usagés çà et là, ce devait être tout pour la lingerie. Des vêtements d’usage courant, du style manteau, blouse, tabliers, pendaient à des clous ou des chevilles; le tout fort usagé, jamais lavé, et qui semble avoir servi d’une génération à l’autre, chacune recousant ou rapiéçant avec ce qui pouvait se trouver – des morceaux provenant d’un autre vêtement enfin réformé, par exemple. Naturellement, dans les grosses fermes, on trouvait plus d’abondance et surtout de variété; mais ce ne sera qu’au siècle suivant, le XVIIIe, qu’au moins dans les campagnes du Nord les femmes parviendront à s’habiller mieux et d’étoffes plus brillantes, et commencer à rassembler un embryon de linge de toilette et de maison.

    Du côté de ce que nous appelons cuisine, un mot qui, à ce moment-là, ne pouvait désigner que la cuisson, il n’y avait que la cheminée, quelques marmites, pots et potains, généralement de terre, parfois de fonte, des assiettes, écuelles et bols de bois ou de terre, des cuillers de bois (chez les plus aisés d’étain commun), pas plus de fourchette qu’à la cour du roi, et quelques couteaux individuels, qu’on essuyait sur la manche ou la cuisse après usage. La "vaisselle", quand on la faisait, se lavait comme elle pouvait dans une sorte de baquet de bois, vieille futaille coupée en deux et plus ou moins rafistolée; on trouvait d’ailleurs des barriques de toute dénomination un peu partout, souvent vides ("à gueule bée", disait-on), où l’on pouvait recueillir l’eau de pluie (quand existait une gouttière), mettre quelques pommes, ou des fruits et baies cueillis le long des chemins et des bois pour devenir "boisson" après y avoir jeté de l’eau et laissé macérer quelque peu; vin ou cidre étaient généralement absents parce que non récoltés, déjà vendus ou trop chers. »

    Nos ancêtres, avant d’émigrer en Nouvelle-France, ne vivaient généralement pas dans la ouate – qui n’existait pas encore d’ailleurs. Leurs conditions étaient difficiles. Les guerres à répétition, celles des rois puis celles, plus locales des nobles entre eux pour la possession de territoire, les règlements de comptes, chicanes de familles ou d’héritage, etc., réduisaient régulièrement les populations d’hommes aptes à travailler, détruisaient les demeures et les champs. La propriété foncière reposait entièrement ou presque entre les mains du roi, des nobles et du clergé (évêchés, abbayes). Peut-on, dès lors, se surprendre de l’intérêt que plusieurs ont eu à s’expatrier sur la foi des promesses inouïes qu’on leur faisait. Poursuivons notre quête sur leur mode de vie avant leur prise de décision par des extraits du volume de Pierre GOUBERT, La vie quotidienne des paysans français au XVIIe siècle. Les intérieurs paysans « Nous sont décrits avec beaucoup plus d’abondance et donc de sécurité les intérieurs de ces maisons du XVIIe siècle, dont on ne peut le plus souvent que restituer... ou supposer les aspects externes – sauf les plus belles et les plus solides, ces exceptions. Habituellement, les greffiers du temps n’oublient ni une écuelle, ni une couverture trouée, ni une livre de laine à filer, pourvu que tout cela appartienne à la succession qu’il s’agit d’inventorier pour sauvegarder les droits des enfants mineurs (il y en a presque toujours) et prévoir parfois une vente aux enchères, car les objets nommés et décrits sont presque toujours estimés, suivant des usages rigoureux. Comme "meubles meublants" (style du temps) on découvre habituellement chez les paysans fort modestes – la majorité – une ou deux couchettes, une table, un ou deux bancs, un ou deux sièges bas du style trépied, un coffre ou deux, et c’est tout. Ni buffet ni armoire – ce dernier meuble apparaît pourtant vers la fin du siècle chez les Normands un peu cossus. La couchette, de bois, planches plus ou moins jointives, contient un lict (sens habituel, qui correspond vaguement à notre matelas), sorte d’étoffe grossière bourrée de paille (celle-ci parfois non protégée), dans quelques cas (basses-cours importantes, comme dans le Sud-Ouest), de plume (dans ce cas-là on dit parfois la couette). Des draps, pas toujours, on les garde pour les solennités et les linceuls; des couvertures, toujours, et plusieurs; souvent, il n’existe qu’une couchette – donc tout le monde partage la même chaleur, les mêmes puces et les mêmes épanchements; assez souvent tout de même, on en découvre deux, l’une parfois décrite nommément "à usage d’enfant". Serait-ce un berceau? Ce petit meuble apparaissant rarement, on peut supposer qu’on utilisait les hottes à vendange, suspendues, ou quelques planches grossièrement assemblées; le vrai berceau qui oscille au pied n’est presque jamais cité à la campagne, ou bien il est postérieur au XVIIe siècle. Le contenu des coffres – parfois, luxe suprême, l’un ferme à clé – est toujours précisé. Dans l’un, les provisions, blé ou farine; du sel (obligatoire, car vendu presque partout par les agents du roi) dans un pot, du lard plus ou moins rance dans un autre, mais pas toujours. Dans l’autre, les "hardes" et "nippes" (toujours le vocabulaire du temps) : au mieux, une paire de draps, bien sûr de chanvre; de nappes ou de serviettes, presque jamais; deux ou trois jupes souvent noires ou grises, autant de "corps", nos grands-mères disaient corsages, quelques chemises, toujours de chanvre, dont une ou deux d’enfants; de sous-vêtements, jamais; avec quelques chiffons ou morceaux d’étoffe usagés çà et là, ce devait être tout pour la lingerie. Des vêtements d’usage courant, du style manteau, blouse, tabliers, pendaient à des clous ou des chevilles; le tout fort usagé, jamais lavé, et qui semble avoir servi d’une génération à l’autre, chacune recousant ou rapiéçant avec ce qui pouvait se trouver – des morceaux provenant d’un autre vêtement enfin réformé, par exemple. Naturellement, dans les grosses fermes, on trouvait plus d’abondance et surtout de variété; mais ce ne sera qu’au siècle suivant, le XVIIIe, qu’au moins dans les campagnes du Nord les femmes parviendront à s’habiller mieux et d’étoffes plus brillantes, et commencer à rassembler un embryon de linge de toilette et de maison. Du côté de ce que nous appelons cuisine, un mot qui, à ce moment-là, ne pouvait désigner que la cuisson, il n’y avait que la cheminée, quelques marmites, pots et potains, généralement de terre, parfois de fonte, des assiettes, écuelles et bols de bois ou de terre, des cuillers de bois (chez les plus aisés d’étain commun), pas plus de fourchette qu’à la cour du roi, et quelques couteaux individuels, qu’on essuyait sur la manche ou la cuisse après usage. La "vaisselle", quand on la faisait, se lavait comme elle pouvait dans une sorte de baquet de bois, vieille futaille coupée en deux et plus ou moins rafistolée; on trouvait d’ailleurs des barriques de toute dénomination un peu partout, souvent vides ("à gueule bée", disait-on), où l’on pouvait recueillir l’eau de pluie (quand existait une gouttière), mettre quelques pommes, ou des fruits et baies cueillis le long des chemins et des bois pour devenir "boisson" après y avoir jeté de l’eau et laissé macérer quelque peu; vin ou cidre étaient généralement absents parce que non récoltés, déjà vendus ou trop chers. »...

    La Vie… de nos ancêtres

    Suite au numéro précédent, nous poursuivons notre exploration du monde que nos ancêtres ont choisi de quitter pour créer un pays neuf avec le plus mince des bagages.

    Nous essayons de saisir l’avantage que ce déplacement pratiquement sans retour représentait pour eux. Nous en sommes toujours à voir cet aspect important de la vie de nos ancêtres en France par un premier biais qui est celui de l’habitation du paysan à cette époque.

    La maison du paysan de France (suite)

    « Bien entendu, la maisonnette toute de pierre ne pouvait entraîner de tels inconvénients. [Perméabilité au froid, à la pluie, risques importants d’incendie, etc.] Ainsi ces bories de l’actuel Vaucluse, entièrement de pierre ou taillées dans le roc, habitées encore voici moins d’un siècle, et où, par surcroît, chaque compartiment avait reçu une sorte de spécialisation : cuisine, souillarde, chambre et salle, soue, bergerie, fenil, grenier… ce qui n’était en rien le propre des petites chaumières communes, accompagnées de rustiques et branlantes bâtisses mi-étables mi-hangars, qui n’abritaient pas grand-chose.

    Relativement préservées également du grand danger de brûlement, les maisons qualifiées de troglodytiques qui accompagnent encore les coteaux du Cher, de la Vienne, de la Loire tourangelle et angevine, et quelques autres lieux. Logées dans une grotte, avec une façade de belle pierre, la cheminée dépassant dans la prairie ou le bosquet du plateau faisant fonction de toiture, prolongées souvent par de profondes caves, ces demeures, sombres sans doute mais pas plus que les autres (de toute manière la chandelle coûtait cher), restaient fraîches l’été, tièdes l’hiver, à peu près ininflammables, et n’empiétaient en rien sur le sol agricole ou pastoral, ni surtout sur la pente viticole. Et puis, on pouvait toujours creuser un ou deux trous à côté pour y loger les futailles, l’âne, les moutons, la vache.

    Devant la plupart de ces maisons, une sorte de cour parfois close, avec le fumier, modeste, et qui laisse malencontreusement s’écouler son précieux suc, le purin parfois vers le puits; peu de volailles picorant (elles ont trop tendance à rechercher le blé si précieux à l’homme); quelques bâtiments sommairement construits et souvent croulants pour les outils, le bétail et d’hypothétiques provisions, fagots ou paille plus communément; des morceaux de bois et de potain (pots de terre cassés) gisant un peu partout, et que l’inventaire après décès n’oublie jamais d’évaluer; pas toujours de puits (ceux-ci sont souvent communaux, comme la fontaine et le four ou bien seigneuriaux); le four, assez souvent, soit au bout de la maison, soit dans un petit bâtiment très proche; parfois une mare, dangereuse et sale, puisqu’on y laisse rouir le chanvre, ce qui ajoute des parfums inexprimables à tous ceux de la crasse et des déjections. Presque toujours, l’indispensable jardin, domaine de la femme lorsque l’homme l’a retourné, avec ses carrés de choux, de raves et de fèves, plus quelques arbres fruitiers souvent à demi sauvages l’art de greffer ne semblant pas universel.

    Entre ces différents lieux et quelques autres, les paysans du XVIIe siècle comme longtemps leurs descendants se déplaçaient presque incessamment : aller quérir de l’eau, du bois, de l’herbe, sortir, rentrer ou curer (rarement) la vache; aller à son champ, ou au four banal (une fois la semaine ou le mois), au lavoir (plus rarement encore, la sueur et la crasse étant tenues pour réchauffantes et presque saines), au bois (et au braconnage), en journée chez le gros fermier, vers les grands travaux collectifs de moisson et de vendange, plus le marché de la ville voisine, au moins une fois par quinzaine (sauf veau, agneau, poulets, œufs à vendre). Itinéraires presque rituels, marqués par des arbres familiers, de vieux murs, des ronciers, une borne, une croix, (se signer en passant devant), le pigeonnier seigneurial, le presbytère, l’église et son enclos…

    Itinéraires accoutumés et fréquents travaux au-dehors amènent à se demander qui restait à la maison, et quand. Les vieux? nous verrons bientôt qu’ils disparaissaient très vite; les enfants? petits, la mère les emmenait; plus grands, le père les utilisait déjà. La maison est surtout l’endroit où l’on soupe où l’on dîne vers midi, plus rarement et celui où l’on dort, en tas pour se réchauffer; où l’on veille rarement trop chère, la lumière d’une chandelle ou d’un caleil; où l’on fornique l’hiver (l’été, il y a la nature); où l’on naît; où l’on meurt.

    Bien sûr, les plus vastes et plus solides demeures des paysans aisés et des gros fermiers (avec valets et servantes) présentaient ces spectacles maintes fois décrits et parfois peints ou gravés : de longues tablées de convives, le maître président (sic), et les femmes aux marmites, près du foyer; quelques veillées de travail (et, à l’occasion, de bavardage), chacun profitant de l’espace, du feu commun et de la lumière commune. Coutumes non générales, propres aux solides maisons des belles exploitations, qui seront présentées à leur place. »

    Tiré de La vie quotidienne des paysans français au XVIIe s. par Pierre GOUBERT, Editions Hachette

    Suite au numéro précédent, nous poursuivons notre exploration du monde que nos ancêtres ont choisi de quitter pour créer un pays neuf avec le plus mince des bagages. Nous essayons de saisir l’avantage que ce déplacement pratiquement sans retour représentait pour eux. Nous en sommes toujours à voir cet aspect important de la vie de nos ancêtres en France par un premier biais qui est celui de l’habitation du paysan à cette époque. La maison du paysan de France (suite) « Bien entendu, la maisonnette toute de pierre ne pouvait entraîner de tels inconvénients. [Perméabilité au froid, à la pluie, risques importants d’incendie, etc.] Ainsi ces bories de l’actuel Vaucluse, entièrement de pierre ou taillées dans le roc, habitées encore voici moins d’un siècle, et où, par surcroît, chaque compartiment avait reçu une sorte de spécialisation : cuisine, souillarde, chambre et salle, soue, bergerie, fenil, grenier... ce qui n’était en rien le propre des petites chaumières communes, accompagnées de rustiques et branlantes bâtisses mi-étables mi-hangars, qui n’abritaient pas grand-chose. Relativement préservées également du grand danger de brûlement, les maisons qualifiées de troglodytiques qui accompagnent encore les coteaux du Cher, de la Vienne, de la Loire tourangelle et angevine, et quelques autres lieux. Logées dans une grotte, avec une façade de belle pierre, la cheminée dépassant dans la prairie ou le bosquet du plateau faisant fonction de toiture, prolongées souvent par de profondes caves, ces demeures, sombres sans doute mais pas plus que les autres (de toute manière la chandelle coûtait cher), restaient fraîches l’été, tièdes l’hiver, à peu près ininflammables, et n’empiétaient en rien sur le sol agricole ou pastoral, ni surtout sur la pente viticole. Et puis, on pouvait toujours creuser un ou deux trous à côté pour y loger les futailles, l’âne, les moutons, la vache. Devant la plupart de ces maisons, une sorte de cour parfois close, avec le fumier, modeste, et qui laisse malencontreusement s’écouler son précieux suc, le purin parfois vers le puits; peu de volailles picorant (elles ont trop tendance à rechercher le blé si précieux à l’homme); quelques bâtiments sommairement construits et souvent croulants pour les outils, le bétail et d’hypothétiques provisions, fagots ou paille plus communément; des morceaux de bois et de potain (pots de terre cassés) gisant un peu partout, et que l’inventaire après décès n’oublie jamais d’évaluer; pas toujours de puits (ceux-ci sont souvent communaux, comme la fontaine et le four ou bien seigneuriaux); le four, assez souvent, soit au bout de la maison, soit dans un petit bâtiment très proche; parfois une mare, dangereuse et sale, puisqu’on y laisse rouir le chanvre, ce qui ajoute des parfums inexprimables à tous ceux de la crasse et des déjections. Presque toujours, l’indispensable jardin, domaine de la femme lorsque l’homme l’a retourné, avec ses carrés de choux, de raves et de fèves, plus quelques arbres fruitiers souvent à demi sauvages l’art de greffer ne semblant pas universel. Entre ces différents lieux et quelques autres, les paysans du XVIIe siècle comme longtemps leurs descendants se déplaçaient presque incessamment : aller quérir de l’eau, du bois, de l’herbe, sortir, rentrer ou curer (rarement) la vache; aller à son champ, ou au four banal (une fois la semaine ou le mois), au lavoir (plus rarement encore, la sueur et la crasse étant tenues pour réchauffantes et presque saines), au bois (et au braconnage), en journée chez le gros fermier, vers les grands travaux collectifs de moisson et de vendange, plus le marché de la ville voisine, au moins une fois par quinzaine (sauf veau, agneau, poulets, œufs à vendre). Itinéraires presque rituels, marqués par des arbres familiers, de vieux murs, des ronciers, une borne, une croix, (se signer en passant devant), le pigeonnier seigneurial, le presbytère, l’église et son enclos... Itinéraires accoutumés et fréquents travaux au-dehors amènent à se demander qui restait à la maison, et quand. Les vieux? nous verrons bientôt qu’ils disparaissaient très vite; les enfants? petits, la mère les emmenait; plus grands, le père les utilisait déjà. La maison est surtout l’endroit où l’on soupe où l’on dîne vers midi, plus rarement et celui où l’on dort, en tas pour se réchauffer; où l’on veille rarement trop chère, la lumière d’une chandelle ou d’un caleil; où l’on fornique l’hiver (l’été, il y a la nature); où l’on naît; où l’on meurt. Bien sûr, les plus vastes et plus solides demeures des paysans aisés et des gros fermiers (avec valets et servantes) présentaient ces spectacles maintes fois décrits et parfois peints ou gravés : de longues tablées de convives, le maître président (sic), et les femmes aux marmites, près du foyer; quelques veillées de travail (et, à l’occasion, de bavardage), chacun profitant de l’espace, du feu commun et de la lumière commune. Coutumes non générales, propres aux solides maisons des belles exploitations, qui seront présentées à leur place. » Tiré de La vie quotidienne des paysans français au XVIIe s. par Pierre GOUBERT, Editions Hachette ...

    La vie… de nos ancêtres

    Peu de documentation nous est parvenue sur la vie quotidienne des pionniers de la Nouvelle-France. La majorité des documents sont des échanges d’ordre administratif ou de la correspondance privée portant surtout sur les nouvelles des événements récents.

    Nos premiers ancêtres, généralement peu ou pas instruits, avaient, force des choses, bien d’autres préoccupations que d’écrire et conter leur vie.

    Grâce au régime notarial et autres prescriptions instaurées dans la colonie, nous profitons d’une manne exceptionnelle dans les nombreux actes qui ont été conservés. Ces actes – spécialement les inventaires après décès – nous aident à entrevoir certains aspects de la vie quotidienne de nos aïeux.

    Une question universelle demeure : pourquoi notre ancêtre a-t-il choisi de quitter son pays natal pour venir s’établir dans la colonie?

    Par l’étude de l’histoire générale, nous jonglons avec les notions de guerres, de surpopulation (?), de famines, de goût de l’aventure, etc. pour expliquer leur décision. Sans doute, tous ces facteurs tenaient-ils pour une bonne part dans leur choix.

    Si nous connaissions les conditions de vie de la population française et le contexte économique et politique local à l’époque de la colonisation, nous pourrions entrevoir d’abord la réponse à notre question et surtout comprendre ce que les émigrants ont certainement importé de leurs habitudes vestimentaires ou agricoles, de leur mode de vie, de leur culture générale, de leurs connaissances techniques, etc.

    Des chercheurs français ont exploré ce domaine en dépoussiérant des quantités de documents et actes anciens pendant des années.

    L’un de ceux-ci, Pierre GOUBERT, historien de l’Ancien Régime, a publié en 1982, aux Éditions Hachette, un volume intitulé La vie quotidienne des paysans français au XVIIe siècle. (Disponible dans notre bibliothèque sous la cote HIS FRA 009).

    Épisodiquement, nous publierons des extraits très intéressants de ce volume. Nous espérons que vous les apprécierez autant que nous.

    La maison du paysan de France

    « … les maisons rurales du XVIIe siècle français reflétaient généralement – on s’en doute – la pauvreté, la médiocrité ou l’aisance de qui les habitait.

    Au petit journalier, détenteur d’un jardin, d’un lopin, de deux brebis, travaillant en saison chez les autres, filant ou ouvrant le bois chez lui, la classique chaumière, la "chaumine enfumée" du précis Jean de la Fontaine, sans doute majoritaire dans l’ancienne France.

    De pierre ou de torchis selon la région, avec tout de même une cheminée solide, de la pierre autour de la porte et de la fenêtre, une charpente simple de bois du pays, et pardessus, du roseau, de la paille de seigle, de la brande ou de la fougère, avec quelques gros cailloux pour protéger la toiture du vent.

    Là-dessous, une seule pièce, trapue ou allongée (avec l’étable parfois dans un bout). Sous les pieds nus (on prend les sabots pour sortir), la terre battue avec parfois de la paille ou des branchages, le tout plus ou moins délavé de pluie, d’humidité descendue des murs, d’urine et de fientes de poule. Le "foyer", cœur de la maison, est habituellement garni d’une crémaillère et d’un pot; on s’y chauffe, quand la porte n’est pas ouverte pour assurer le tirage de la cheminée.

    Le vent, la pluie, le petit bétail et tous les parasites de la création – rampants, gratteurs, sauteurs – y entrent familièrement. Outre le froid (mais on s’en protège par de vieux manteaux, des couvertures puceuses et des "poches" – nos sacs) – l’ennemi principal est l’arsin, l’incendie si fréquent alors, mais qui procure au moins des dispenses d’impôts. Incendies d’autant plus brutaux que le chaume brûle très vite, et que l’eau du puits et de la fontaine est située souvent loin, et qu’on ne dispose guère que d’un seau (de bois cerclé de fer) pour la transporter. »

    Peu de documentation nous est parvenue sur la vie quotidienne des pionniers de la Nouvelle-France. La majorité des documents sont des échanges d’ordre administratif ou de la correspondance privée portant surtout sur les nouvelles des événements récents. Nos premiers ancêtres, généralement peu ou pas instruits, avaient, force des choses, bien d’autres préoccupations que d’écrire et conter leur vie. Grâce au régime notarial et autres prescriptions instaurées dans la colonie, nous profitons d’une manne exceptionnelle dans les nombreux actes qui ont été conservés. Ces actes – spécialement les inventaires après décès – nous aident à entrevoir certains aspects de la vie quotidienne de nos aïeux. Une question universelle demeure : pourquoi notre ancêtre a-t-il choisi de quitter son pays natal pour venir s’établir dans la colonie? Par l’étude de l’histoire générale, nous jonglons avec les notions de guerres, de surpopulation (?), de famines, de goût de l’aventure, etc. pour expliquer leur décision. Sans doute, tous ces facteurs tenaient-ils pour une bonne part dans leur choix. Si nous connaissions les conditions de vie de la population française et le contexte économique et politique local à l’époque de la colonisation, nous pourrions entrevoir d’abord la réponse à notre question et surtout comprendre ce que les émigrants ont certainement importé de leurs habitudes vestimentaires ou agricoles, de leur mode de vie, de leur culture générale, de leurs connaissances techniques, etc. Des chercheurs français ont exploré ce domaine en dépoussiérant des quantités de documents et actes anciens pendant des années. L’un de ceux-ci, Pierre GOUBERT, historien de l’Ancien Régime, a publié en 1982, aux Éditions Hachette, un volume intitulé La vie quotidienne des paysans français au XVIIe siècle. (Disponible dans notre bibliothèque sous la cote HIS FRA 009). Épisodiquement, nous publierons des extraits très intéressants de ce volume. Nous espérons que vous les apprécierez autant que nous. La maison du paysan de France « … les maisons rurales du XVIIe siècle français reflétaient généralement – on s’en doute – la pauvreté, la médiocrité ou l’aisance de qui les habitait. Au petit journalier, détenteur d’un jardin, d’un lopin, de deux brebis, travaillant en saison chez les autres, filant ou ouvrant le bois chez lui, la classique chaumière, la "chaumine enfumée" du précis Jean de la Fontaine, sans doute majoritaire dans l’ancienne France. De pierre ou de torchis selon la région, avec tout de même une cheminée solide, de la pierre autour de la porte et de la fenêtre, une charpente simple de bois du pays, et pardessus, du roseau, de la paille de seigle, de la brande ou de la fougère, avec quelques gros cailloux pour protéger la toiture du vent. Là-dessous, une seule pièce, trapue ou allongée (avec l’étable parfois dans un bout). Sous les pieds nus (on prend les sabots pour sortir), la terre battue avec parfois de la paille ou des branchages, le tout plus ou moins délavé de pluie, d’humidité descendue des murs, d’urine et de fientes de poule. Le "foyer", cœur de la maison, est habituellement garni d’une crémaillère et d’un pot; on s’y chauffe, quand la porte n’est pas ouverte pour assurer le tirage de la cheminée. Le vent, la pluie, le petit bétail et tous les parasites de la création – rampants, gratteurs, sauteurs – y entrent familièrement. Outre le froid (mais on s’en protège par de vieux manteaux, des couvertures puceuses et des "poches" – nos sacs) – l’ennemi principal est l’arsin, l’incendie si fréquent alors, mais qui procure au moins des dispenses d’impôts. Incendies d’autant plus brutaux que le chaume brûle très vite, et que l’eau du puits et de la fontaine est située souvent loin, et qu’on ne dispose guère que d’un seau (de bois cerclé de fer) pour la transporter. »...

    Généalogie : avis de recherche

    Lors de recherches généalogiques, il est courant de frapper un mur, de bloquer sur un personnage dont on ne peut retracer la descendance ou l’ascendance.

    Plusieurs membres s’adonnant à la généalogie, il est possible que quelqu’un ait rencontré le même problème et trouvé la réponse.

    Cette section est ouverte afin d’initier un réseau d’entraide entre les membres et autres lecteurs du bulletin.

    Pour y participer, il suffit de nous faire parvenir un cours résumé de votre questionnement en n’oubliant pas les éléments essentiels à bien identifier l’objet de votre recherche.

    Nous publierons l’objet de votre recherche dans cette chronique, ainsi que la réponse obtenue le cas échéant.

    Les questions et réponses seront numérotées successivement afin de les identifier adéquatement : Questions = Q 1, 2, 3… Réponses = R 1, 2, 3…

    Exceptionnellement, pour illustrer le genre de problème que vous pouvez rencontrer et soumettre, nous vous communiquerons quelques exemples un peu plus détaillés.

    Q. 4 François LANCTÔT

    Je suis à la recherche de l’ensemble des enfants de François LANCTÔT m. Josephte (Josette) GAGNÉ, La Prairie 8-02-1745 pour établir le tableau de famille.

    Des enfants trouvés, Susanne s’est mariée à La Prairie Marguerite à Saint-Constant, Alexis et Raphaël à Saint-Philippe.

    D’autres enfants sont-ils nés de cette union?

    Également, date et lieu de décès de François.

    Lors de recherches généalogiques, il est courant de frapper un mur, de bloquer sur un personnage dont on ne peut retracer la descendance ou l’ascendance. Plusieurs membres s’adonnant à la généalogie, il est possible que quelqu’un ait rencontré le même problème et trouvé la réponse. Cette section est ouverte afin d’initier un réseau d’entraide entre les membres et autres lecteurs du bulletin. Pour y participer, il suffit de nous faire parvenir un cours résumé de votre questionnement en n’oubliant pas les éléments essentiels à bien identifier l’objet de votre recherche. Nous publierons l’objet de votre recherche dans cette chronique, ainsi que la réponse obtenue le cas échéant. Les questions et réponses seront numérotées successivement afin de les identifier adéquatement : Questions = Q 1, 2, 3… Réponses = R 1, 2, 3… Exceptionnellement, pour illustrer le genre de problème que vous pouvez rencontrer et soumettre, nous vous communiquerons quelques exemples un peu plus détaillés. Q. 4 François LANCTÔT Je suis à la recherche de l’ensemble des enfants de François LANCTÔT m. Josephte (Josette) GAGNÉ, La Prairie 8-02-1745 pour établir le tableau de famille. Des enfants trouvés, Susanne s’est mariée à La Prairie Marguerite à Saint-Constant, Alexis et Raphaël à Saint-Philippe. D’autres enfants sont-ils nés de cette union? Également, date et lieu de décès de François....

    Kateri TEKAKWITHA (1656-1680). Le Lys des Mohawks

    Les fondateurs de la Nouvelle-France se divisaient en deux factions : ceux uniquement intéressés aux affaires – nommément le commerce des fourrures – et ceux qui partageaient des objectifs communs de colonisation et d’assurance du salut des aborigènes païens.

    Les missionnaires catholiques traversèrent avec le but de servir les colons et de convertir les indigènes.

    Ils voyageaient avec les explorateurs, apprenaient la langue de la plupart des tribus rencontrées et, en plus de soutenir la foi des voyageurs en célébrant régulièrement les offices religieux, attiraient par ces cérémonies les Amérindiens à la religion.

    Dès les premiers temps de la colonie, des centaines d’indigènes furent baptisés et plusieurs d’entre eux choisirent de demeurer près des agglomérations fondées par les colons.

    L’une de ces convertis brille comme une étoile au firmament nord-américain. Son nom : Kateri TEKAKWITHA.

    Sa mère, une jeune algonquine baptisée et élevée par des colons trifluviens, avait épousé un jeune chef iroquois. L’enfant naquit dans un village agnier nommé Ossernenon (aujourd’hui Auriesville) sur les berges de la rivière des Agniers (Mohawk River) à quelques kilomètres au nord-ouest d’Albany, état de New York.

    En 1666, le village fut brûlé suite à la fuite dans les bois de ses habitants lors d’un raid conduit par Alexandre De Prouville De Tracy. Une paix relative s’ensuivit dans la colonie, favorisant les actions des missionnaires.

    Une épidémie de petite vérole fit mourir plusieurs des habitants du village, dont les parents de notre jeune amérindienne. L’enfant survécut, mais resta toute sa vie physiquement marquée par la terrible maladie. Deux vieilles tantes aigries prirent Kateri dans leur hutte et en firent leur servante.

    Quelques-uns des survivants élirent de rejoindre leurs compatriotes partis à la mission de Lorette en banlieue de Québec alors que certains préférèrent la mission Saint-François-Xavier à La Prairie.

    Fille de chef, ayant conservé une bonne disposition malgré le traitement reçu de ses tantes et une faible constitution résultante de la maladie, l’adolescente s’est vue gratifiée de plusieurs propositions de mariage qu’elle refusa toutes, déclarant que cet état n’était pas son choix.

    En 1675, le P. Jacques De Lamberville, S.J., visita sa bourgade de Gandaonage sur la rivière des Agniers. Alors que les villageois, hôtes polis, assistaient à la messe organisée par le prêtre, Kateri demeurait clouée dans sa hutte suite à une blessure au pied subie dans les jours précédents.

    Le Jésuite, faisant la tournée dans les jours suivants, rencontra Kateri et reconnut en elle une personne spéciale. Plusieurs discussions et sermons conduisirent à son baptême le jour de Pâques (14 avril 1676) d’où son prénom chrétien de Catherine (Kateri).

    Son baptême, consécutif à ses refus répétés de se marier, la fit rejeter de ses pairs sous l’influence de ses tantes. Elle subit leur mépris et leurs persécutions.

    Conseillée par le P. De Lamberville, elle décida de s’enfuir à la mission Saint-François-Xavier récemment déménagée à l’ouest de La Prairie sur le territoire actuel de Ville Sainte-Catherine.

    Une lettre de présentation de De Lamberville au confrère en charge de la mission dit : « Je vous envoie un trésor. Prenez-en le plus grand soin. »

    Une vieille Amérindienne de la mission, Anastasie TAGONHATSIONGO, accueillit la fugitive et la prit sous son aile. Kateri se mit à assister aux trois messes quotidiennes (la première à 4 h, avant le départ des chasseurs).

    Elle se lia d’amitié avec une jeune veuve Onneyout et élabora avec elle le projet de fonder une congrégation de religieuses amérindiennes. Leur projet fut rejeté par les autorités religieuses. – Quelque 50 ans plus tard, un projet identique vit le jour au Mexique.

    Kateri fit sa première communion à Noël de 1677 et, à Pâques 1678, suite à sa deuxième communion, joignit les rangs de la Société de la Sainte-Famille qu’avait créée Mgr De Laval en 1671 pour les pieuses gens de la colonie.

    Le 25 mars 1679, elle prononça un vœu privé de virginité perpétuelle et se consacra à la Vierge Marie.

    En janvier suivant, bien que souffrant d’une forte fièvre, elle accompagna une co-paroissienne pour ses courses à La Prairie.

    Malheureusement, son état empira. Le mardi de la Semaine Sainte, on lui administra les derniers sacrements et elle s’éteint le lendemain après avoir fait ses adieux à ses amies et connaissances.

    Sa réputation s’est rapidement étendue et de nombreuses faveurs ont été attribuées à son intercession après sa mort.

    Le 3 janvier 1943, le Pape Pie XII lui décerna le titre de Vénérable, première étape vers la reconnaissance de sa sainteté.

    Source : Québec-Histoire, Vol. 1, Nº 3-4, 1971.

    religieuse
    Peinture du P. Claude Chauchetière, S. J.
    (Archives du Canada)

     

    Les fondateurs de la Nouvelle-France se divisaient en deux factions : ceux uniquement intéressés aux affaires – nommément le commerce des fourrures – et ceux qui partageaient des objectifs communs de colonisation et d’assurance du salut des aborigènes païens. Les missionnaires catholiques traversèrent avec le but de servir les colons et de convertir les indigènes. Ils voyageaient avec les explorateurs, apprenaient la langue de la plupart des tribus rencontrées et, en plus de soutenir la foi des voyageurs en célébrant régulièrement les offices religieux, attiraient par ces cérémonies les Amérindiens à la religion. Dès les premiers temps de la colonie, des centaines d’indigènes furent baptisés et plusieurs d’entre eux choisirent de demeurer près des agglomérations fondées par les colons. L’une de ces convertis brille comme une étoile au firmament nord-américain. Son nom : Kateri TEKAKWITHA. Sa mère, une jeune algonquine baptisée et élevée par des colons trifluviens, avait épousé un jeune chef iroquois. L’enfant naquit dans un village agnier nommé Ossernenon (aujourd’hui Auriesville) sur les berges de la rivière des Agniers (Mohawk River) à quelques kilomètres au nord-ouest d’Albany, état de New York. En 1666, le village fut brûlé suite à la fuite dans les bois de ses habitants lors d’un raid conduit par Alexandre De Prouville De Tracy. Une paix relative s’ensuivit dans la colonie, favorisant les actions des missionnaires. Une épidémie de petite vérole fit mourir plusieurs des habitants du village, dont les parents de notre jeune amérindienne. L’enfant survécut, mais resta toute sa vie physiquement marquée par la terrible maladie. Deux vieilles tantes aigries prirent Kateri dans leur hutte et en firent leur servante. Quelques-uns des survivants élirent de rejoindre leurs compatriotes partis à la mission de Lorette en banlieue de Québec alors que certains préférèrent la mission Saint-François-Xavier à La Prairie. Fille de chef, ayant conservé une bonne disposition malgré le traitement reçu de ses tantes et une faible constitution résultante de la maladie, l’adolescente s’est vue gratifiée de plusieurs propositions de mariage qu’elle refusa toutes, déclarant que cet état n’était pas son choix. En 1675, le P. Jacques De Lamberville, S.J., visita sa bourgade de Gandaonage sur la rivière des Agniers. Alors que les villageois, hôtes polis, assistaient à la messe organisée par le prêtre, Kateri demeurait clouée dans sa hutte suite à une blessure au pied subie dans les jours précédents. Le Jésuite, faisant la tournée dans les jours suivants, rencontra Kateri et reconnut en elle une personne spéciale. Plusieurs discussions et sermons conduisirent à son baptême le jour de Pâques (14 avril 1676) d’où son prénom chrétien de Catherine (Kateri). Son baptême, consécutif à ses refus répétés de se marier, la fit rejeter de ses pairs sous l’influence de ses tantes. Elle subit leur mépris et leurs persécutions. Conseillée par le P. De Lamberville, elle décida de s’enfuir à la mission Saint-François-Xavier récemment déménagée à l’ouest de La Prairie sur le territoire actuel de Ville Sainte-Catherine. Une lettre de présentation de De Lamberville au confrère en charge de la mission dit : « Je vous envoie un trésor. Prenez-en le plus grand soin. » Une vieille Amérindienne de la mission, Anastasie TAGONHATSIONGO, accueillit la fugitive et la prit sous son aile. Kateri se mit à assister aux trois messes quotidiennes (la première à 4 h, avant le départ des chasseurs). Elle se lia d’amitié avec une jeune veuve Onneyout et élabora avec elle le projet de fonder une congrégation de religieuses amérindiennes. Leur projet fut rejeté par les autorités religieuses. – Quelque 50 ans plus tard, un projet identique vit le jour au Mexique. Kateri fit sa première communion à Noël de 1677 et, à Pâques 1678, suite à sa deuxième communion, joignit les rangs de la Société de la Sainte-Famille qu’avait créée Mgr De Laval en 1671 pour les pieuses gens de la colonie. Le 25 mars 1679, elle prononça un vœu privé de virginité perpétuelle et se consacra à la Vierge Marie. En janvier suivant, bien que souffrant d’une forte fièvre, elle accompagna une co-paroissienne pour ses courses à La Prairie. Malheureusement, son état empira. Le mardi de la Semaine Sainte, on lui administra les derniers sacrements et elle s’éteint le lendemain après avoir fait ses adieux à ses amies et connaissances. Sa réputation s’est rapidement étendue et de nombreuses faveurs ont été attribuées à son intercession après sa mort. Le 3 janvier 1943, le Pape Pie XII lui décerna le titre de Vénérable, première étape vers la reconnaissance de sa sainteté. Source : Québec-Histoire, Vol. 1, Nº 3-4, 1971. Peinture du P. Claude Chauchetière, S. J. (Archives du Canada)  ...