Sélection d'une édition

    L’héritage perdu

    Les années passent et souvent les souvenirs deviennent de moins en moins précis jusqu’à quelquefois, et avec un peu d’imagination, prendre une tournure de quelque chose qui ressemble plus à un mythe ou une légende. James Baldwin, célèbre auteur américain du 20e siècle avait écrit ‘’Sachez d’où vous venez. Si vous savez d’où vous venez, il n’y a aucune limite à l’endroit où vous pouvez aller’’.

    Récemment, et ce, de manière inattendue, j’ai pris connaissance d’une information d’apparence anodine, mais qui me ramène à un événement de ma jeunesse oublié depuis longtemps. Cette information a ravivé des images claires de cet événement et m’a rappelé que ce n’est pas impossible de sortir d’une situation embarrassante, voire dangereuse, et d’en sortir avec le sourire. En voici la petite histoire.

    La Prairie et la SHLM

    Ayant toujours été fascinés par l’histoire et à la suggestion de Céline, mon épouse, nous prenons la décision de nous joindre comme membres et bénévoles pour la Société d’histoire de La Prairie-de-la-Magdeleine comme projet de semi-retraités. Coïncidence, La Prairie est l’endroit de prédilection pour rencontrer un Lamarre, la tribu dont je fais partie grâce à ma mère Béatrice.

    Nous avions déjà en main, au moment de notre première visite au local de la SHLM, une bonne connaissance de nos ascendances respectives (la mienne, celle des Lemay / Lamarre * et pour celle de Céline, les Chauvette / Raymond). Dans mon cas et malgré ceci, j’étais désireux de voir si les archives de la Société pouvaient m’en apprendre plus sur la vie de mon grand-père, Émile Lamarre.

    J’ai connu Émile Lamarre, qui a vécu avec nous durant quelques années au domicile de mes parents durant mon enfance, avec mon frère Daniel, ma sœur Louise et mon frère Jean. Autre que quelques faits divers de la vie d’Émile, je n’en savais pas beaucoup sur lui et ma curiosité l’emporte. Je décide d’en savoir plus en l’utilisant comme sujet de recherche dans le contexte de mon apprentissage comme bénévole / assistant recherchiste.

    Émile et Victor

    En débutant mes recherches, celles-ci m’amènent avant tout chez Victor Lamarre, mon arrière-grand-père. Je le connaissais de nom seulement et autre qu’il était mon arrière-grand-père et de la place qu’il occupe sur notre arbre généalogique, ce que j’apprends sur lui est «du neuf».

    Grâce à un texte sur des personnages de La Prairie publié par Gaétan Bourdages sur Roger Lupien, le barbier de La Prairie, j’apprends que Victor Lamarre était barbier et photographe. Le texte se lit comme suit :

    «Peu avant l’ouverture de ce premier salon (celui de Roger Lupien), l’ancien barbier et photographe Victor Lamarre lui avait proposé de lui vendre son vieux matériel, dont une magnifique chaise de bois. M. Lupien déclina l’offre , préférant démarrer son entreprise avec du matériel neuf ».

    À ce moment, l’image m’est venue comme un éclair : la lanière de cuir servant à aiguiser la lame de rasoir de Victor, normalement affixée à la chaise du barbier, a sûrement passé aux mains d’Émile qui en retour, a ramené cette calamité chez mes parents. Voici donc l’élément de terreur que mes parents appelaient « la strappe ».

     

    Deux frères avec une mission

    La discipline pour les garçons de mon époque variait de forme et d’intensité. Chez nous, c’était selon la détermination et le degré de tolérance que nos parents avaient, lorsqu’ils devaient décider de l’intensité du châtiment à nous infliger, suite aux écarts de conduite de mon frère Daniel et moi. Chez les vieux de la génération d’Émile, gare à vous… Mes parents par contre faisaient preuve de plus de tolérance. Ceci faisait l’objet d’échanges intéressants entre Émile et mes parents.

    Victor Lamarre dans son salon de barbier.

     

    Un jour, Daniel et moi nous sommes mis dans une situation à risque et avons dû faire face à la musique : c’est ici que notre première expérience regrettable avec « la strappe » a eu lieu. Suite à ceci, nous avons formulé un plan pour une élimination radicale de cette formule disciplinaire questionnable.

    Profitant d’une belle journée de printemps où tout le monde se prélassait à l’extérieur dans le beau jardin créé par Émile, nous nous sommes saisis de cette horreur et à l’aide d’une lame de rasoir, l’avons transformée en un amas de petits carreaux prêts pour la poubelle. J’entends encore Émile lorsqu’il en fit la découverte : «Ah ben bocorne», (son patois favori). Pour Béatrice et Jean-Maurice, ce fut différent : « les pt’its maudits… », en se retenant pour ne pas pouffer de rire.

    Conclusion

    Et bien voilà. La discipline à partir de ce moment a pris une tournure plus civilisée si on peut dire et depuis lors, Daniel et moi avons pu avancer dans la vie avec nos derrières intacts. Baldwin avait raison, en ayant réglé ce petit problème à l’origine, ceci m’a permis de perfectionner une approche de développeur de solutions, croyez-le ou non, un atout qui m’a bien servi pour la carrière que j’ai choisie par la suite. Quant à l’héritage physique de Victor, tout ce qui restait de lui est perdu. Il me reste encore, par contre, le plaisir d’en découvrir plus sur lui et sur Émile, en explorant les archives de la SHLM, ce merveilleux témoin du passé de La Prairie.

    Les années passent et souvent les souvenirs deviennent de moins en moins précis jusqu’à quelquefois, et avec un peu d’imagination, prendre une tournure de quelque chose qui ressemble plus à un mythe ou une légende. James Baldwin, célèbre auteur américain du 20e siècle avait écrit ‘’Sachez d’où vous venez. Si vous savez d’où vous venez, il n’y a aucune limite à l’endroit où vous pouvez aller’’. Récemment, et ce, de manière inattendue, j’ai pris connaissance d’une information d’apparence anodine, mais qui me ramène à un événement de ma jeunesse oublié depuis longtemps. Cette information a ravivé des images claires de cet événement et m’a rappelé que ce n’est pas impossible de sortir d’une situation embarrassante, voire dangereuse, et d’en sortir avec le sourire. En voici la petite histoire. La Prairie et la SHLM Ayant toujours été fascinés par l’histoire et à la suggestion de Céline, mon épouse, nous prenons la décision de nous joindre comme membres et bénévoles pour la Société d’histoire de La Prairie-de-la-Magdeleine comme projet de semi-retraités. Coïncidence, La Prairie est l’endroit de prédilection pour rencontrer un Lamarre, la tribu dont je fais partie grâce à ma mère Béatrice. Nous avions déjà en main, au moment de notre première visite au local de la SHLM, une bonne connaissance de nos ascendances respectives (la mienne, celle des Lemay / Lamarre * et pour celle de Céline, les Chauvette / Raymond). Dans mon cas et malgré ceci, j’étais désireux de voir si les archives de la Société pouvaient m’en apprendre plus sur la vie de mon grand-père, Émile Lamarre. J’ai connu Émile Lamarre, qui a vécu avec nous durant quelques années au domicile de mes parents durant mon enfance, avec mon frère Daniel, ma sœur Louise et mon frère Jean. Autre que quelques faits divers de la vie d’Émile, je n’en savais pas beaucoup sur lui et ma curiosité l’emporte. Je décide d’en savoir plus en l’utilisant comme sujet de recherche dans le contexte de mon apprentissage comme bénévole / assistant recherchiste. Émile et Victor En débutant mes recherches, celles-ci m’amènent avant tout chez Victor Lamarre, mon arrière-grand-père. Je le connaissais de nom seulement et autre qu’il était mon arrière-grand-père et de la place qu’il occupe sur notre arbre généalogique, ce que j’apprends sur lui est «du neuf». Grâce à un texte sur des personnages de La Prairie publié par Gaétan Bourdages sur Roger Lupien, le barbier de La Prairie, j’apprends que Victor Lamarre était barbier et photographe. Le texte se lit comme suit : «Peu avant l’ouverture de ce premier salon (celui de Roger Lupien), l’ancien barbier et photographe Victor Lamarre lui avait proposé de lui vendre son vieux matériel, dont une magnifique chaise de bois. M. Lupien déclina l’offre , préférant démarrer son entreprise avec du matériel neuf ». À ce moment, l’image m’est venue comme un éclair : la lanière de cuir servant à aiguiser la lame de rasoir de Victor, normalement affixée à la chaise du barbier, a sûrement passé aux mains d’Émile qui en retour, a ramené cette calamité chez mes parents. Voici donc l’élément de terreur que mes parents appelaient « la strappe ».   Deux frères avec une mission La discipline pour les garçons de mon époque variait de forme et d’intensité. Chez nous, c’était selon la détermination et le degré de tolérance que nos parents avaient, lorsqu’ils devaient décider de l’intensité du châtiment à nous infliger, suite aux écarts de conduite de mon frère Daniel et moi. Chez les vieux de la génération d’Émile, gare à vous… Mes parents par contre faisaient preuve de plus de tolérance. Ceci faisait l’objet d’échanges intéressants entre Émile et mes parents. Victor Lamarre dans son salon de barbier.   Un jour, Daniel et moi nous sommes mis dans une situation à risque et avons dû faire face à la musique : c’est ici que notre première expérience regrettable avec « la strappe » a eu lieu. Suite à ceci, nous avons formulé un plan pour une élimination radicale de cette formule disciplinaire questionnable. Profitant d’une belle journée de printemps où tout le monde se prélassait à l’extérieur dans le beau jardin créé par Émile, nous nous sommes saisis de cette horreur et à l’aide d’une lame de rasoir, l’avons transformée en un amas de petits carreaux prêts pour la poubelle. J’entends encore Émile lorsqu’il en fit la découverte : «Ah ben bocorne», (son patois favori). Pour Béatrice et Jean-Maurice, ce fut différent : « les pt’its maudits… », en se retenant pour ne pas pouffer de rire. Conclusion Et bien voilà. La discipline à partir de ce moment a pris une tournure plus civilisée si on peut dire et depuis lors, Daniel et moi avons pu avancer dans la vie avec nos derrières intacts. Baldwin avait raison, en ayant réglé ce petit problème à l’origine, ceci m’a permis de perfectionner une approche de développeur de solutions, croyez-le ou non, un atout qui m’a bien servi pour la carrière que j’ai choisie par la suite. Quant à l’héritage physique de Victor, tout ce qui restait de lui est perdu. Il me reste encore, par contre, le plaisir d’en découvrir plus sur lui et sur Émile, en explorant les archives de la SHLM, ce merveilleux témoin du passé de La Prairie....