Sélection d'une édition

    L’histoire du Café Instantané (suite 4)

    Comme artisane du Café, Ginette Duphily joue entre autres le rôle de dépisteuse artistique à Montréal. À l’automne 1981, elle allait voir, au Café Campus, un humoriste en tournée depuis plus d’un an au Québec : Daniel Lemire. Celui-ci donnera deux spectacles lors d’une fin de semaine à l’hiver 1982 et il sera de retour comme un des invités spéciaux lors de la semaine des festivités du premier anniversaire du Café.

    La deuxième saison du Café Instantané, de juin 1982 à mai 1983, est inaugurée par des récitals de chansons : Gaston Dussault, Clairette et ses élèves, Normand Boyer, avec la douce complicité de Jocelyne Carrier et de Claude Léonard. L’été 1982 s’annonce chaud avec le spectacle Parlez-moi d’humour! de Daniel Lemire. La première se déroule un 1er juillet et, durant les cinq semaines suivantes, les jeudis, vendredis et samedis, le Café fait un tabac. Les billets sont à 5 $. Ce rodage permettra à Daniel Lemire de se lancer à l’automne sur la scène montréalaise dans le cadre des « Lundis des Ha! Ha! ».

    Comme événement marquant à l’automne 1982, le Café obtient après de chaudes luttes son permis d’alcool, mais garde sa vocation première. Comme à son habitude, la boîte à chansons fait se succéder des artistes émergents et des artistes connus (Michel Lalonde [du groupe Garolou], Richard Cyr [du groupe Breton-Cyr], Gaston Mandeville, Renée Claude dans son récital hommage à Georges Brassens J’ai rendez-vous avec vous, Raoul Duguay, Geneviève Paris, Jacques Michel, Raymond Desmarteau et Jim Zeller). Afin que le Café remplisse sa mission de tremplin pour la relève, Pierrot met sur pied une Semaine de la jeune chanson, permettant à douze auteurs-compositeurs-interprètes de se produire sur scène.

    En formule café-théâtre, on présente le spectacle Le sexe et l’argent avec Pierre Lebeau. On poursuit les soirées de jazz, les projections de films. Le Groupe participe également à une émission de la télévision communautaire, le Café se transformant en plateau télé le temps de treize émissions pour Télé-Câble Vidéotron.

     

    Comme artisane du Café, Ginette Duphily joue entre autres le rôle de dépisteuse artistique à Montréal. À l’automne 1981, elle allait voir, au Café Campus, un humoriste en tournée depuis plus d’un an au Québec : Daniel Lemire. Celui-ci donnera deux spectacles lors d’une fin de semaine à l’hiver 1982 et il sera de retour comme un des invités spéciaux lors de la semaine des festivités du premier anniversaire du Café. La deuxième saison du Café Instantané, de juin 1982 à mai 1983, est inaugurée par des récitals de chansons : Gaston Dussault, Clairette et ses élèves, Normand Boyer, avec la douce complicité de Jocelyne Carrier et de Claude Léonard. L’été 1982 s’annonce chaud avec le spectacle Parlez-moi d’humour! de Daniel Lemire. La première se déroule un 1er juillet et, durant les cinq semaines suivantes, les jeudis, vendredis et samedis, le Café fait un tabac. Les billets sont à 5 $. Ce rodage permettra à Daniel Lemire de se lancer à l’automne sur la scène montréalaise dans le cadre des « Lundis des Ha! Ha! ». Comme événement marquant à l’automne 1982, le Café obtient après de chaudes luttes son permis d’alcool, mais garde sa vocation première. Comme à son habitude, la boîte à chansons fait se succéder des artistes émergents et des artistes connus (Michel Lalonde [du groupe Garolou], Richard Cyr [du groupe Breton-Cyr], Gaston Mandeville, Renée Claude dans son récital hommage à Georges Brassens J’ai rendez-vous avec vous, Raoul Duguay, Geneviève Paris, Jacques Michel, Raymond Desmarteau et Jim Zeller). Afin que le Café remplisse sa mission de tremplin pour la relève, Pierrot met sur pied une Semaine de la jeune chanson, permettant à douze auteurs-compositeurs-interprètes de se produire sur scène. En formule café-théâtre, on présente le spectacle Le sexe et l’argent avec Pierre Lebeau. On poursuit les soirées de jazz, les projections de films. Le Groupe participe également à une émission de la télévision communautaire, le Café se transformant en plateau télé le temps de treize émissions pour Télé-Câble Vidéotron.  ...

    L’histoire du Café Instantané (suite 5)

    Dans la tradition du théâtre des matinées du dimanche, les enfants et leurs parents assistent au spectacle du clown Timoté Lachance et aux pièces Une lune entre deux maisons du Théâtre le Carrousel et À l’eau, mes héros de la troupe La pige à clowns.

    Soulignons une soirée consacrée à Hélène Monette, qui publie à compte d’auteure ses poèmes-affiches Juin et Promenade au zoo, le poème-chemise La grande caresse et le recueil Passions-poésie manifeste aux Éditions de la P’tite voisine. Elle donne aussi un récital poésie et chansons, accompagnée par la pianiste Louise Blais.

    Dans les vernissages et les expositions, retenons les expositions de Richard Cyr, de trois artistes majeurs de l’art contemporain québécois ? Serge Lemoyne, Denis Forcier et Michel Leclair ?, de Carole Bibeau, du graveur Tin-Yum Lau, de Raymond Lacombe et de la photographe attitrée des spectacles du Café, Françoise Lemoyne.

    Même si certains spectacles attirent certains soirs entre 80 et 100 personnes, les succès éclatants masquent des difficultés financières importantes. En effet, les spectacles d’artistes connus, les pièces de théâtre ou les soirées d’artistes de la région, à quelques exceptions près, sont rentables. Toutefois, les récitals de la relève, toutes disciplines confondues, et les concerts de jazz, de musique classique, les soirées de cinéma, etc., font rarement salle comble. En outre, l’effet de nouveauté s’essouffle, le taux de fréquentation décline. La bouffe santé rapidement périssable et coûteuse n’aide pas non plus. Même si tout le personnel est bénévole depuis les débuts et que les pourboires sont remis dans la cagnotte, la santé financière est en piteux état. Et la vie n’en est plus aux « amours de nos vingt ans » : les couples pensent à fonder une famille, à trouver un emploi stable, à acheter une maison. Les priorités changent.

    Au tournant de la troisième saison 1983-1984, le Groupe traverse une autre tempête : deux clans durcissent leur position. D’un côté, Pierrot et Ginette qui ne veulent pas remettre en question la vocation du Café et, de l’autre, ceux qui veulent le rentabiliser. Un certain nombre de compromis seront mis à l’essai. À l’été, le Café se tourne vers le théâtre d’été en présentant la pièce Fais-moi mal juste un peu d’Elizabeth Bourget. À l’automne, on lui refait un look : ambiance de bar avec éclairage à l’avenant pour laisser plus de place à la danse après 23 heures. On forme également une nouvelle équipe de serveurs et de serveuses, rémunérés avec leurs seuls pourboires. Et enfin, on donne accès aux chansonniers-animateurs. La boîte à chansons se transforme alors en                        « 2 Pierrots ».

     

    Dans la tradition du théâtre des matinées du dimanche, les enfants et leurs parents assistent au spectacle du clown Timoté Lachance et aux pièces Une lune entre deux maisons du Théâtre le Carrousel et À l’eau, mes héros de la troupe La pige à clowns. Soulignons une soirée consacrée à Hélène Monette, qui publie à compte d’auteure ses poèmes-affiches Juin et Promenade au zoo, le poème-chemise La grande caresse et le recueil Passions-poésie manifeste aux Éditions de la P’tite voisine. Elle donne aussi un récital poésie et chansons, accompagnée par la pianiste Louise Blais. Dans les vernissages et les expositions, retenons les expositions de Richard Cyr, de trois artistes majeurs de l’art contemporain québécois ? Serge Lemoyne, Denis Forcier et Michel Leclair ?, de Carole Bibeau, du graveur Tin-Yum Lau, de Raymond Lacombe et de la photographe attitrée des spectacles du Café, Françoise Lemoyne. Même si certains spectacles attirent certains soirs entre 80 et 100 personnes, les succès éclatants masquent des difficultés financières importantes. En effet, les spectacles d’artistes connus, les pièces de théâtre ou les soirées d’artistes de la région, à quelques exceptions près, sont rentables. Toutefois, les récitals de la relève, toutes disciplines confondues, et les concerts de jazz, de musique classique, les soirées de cinéma, etc., font rarement salle comble. En outre, l’effet de nouveauté s’essouffle, le taux de fréquentation décline. La bouffe santé rapidement périssable et coûteuse n’aide pas non plus. Même si tout le personnel est bénévole depuis les débuts et que les pourboires sont remis dans la cagnotte, la santé financière est en piteux état. Et la vie n’en est plus aux « amours de nos vingt ans » : les couples pensent à fonder une famille, à trouver un emploi stable, à acheter une maison. Les priorités changent. Au tournant de la troisième saison 1983-1984, le Groupe traverse une autre tempête : deux clans durcissent leur position. D’un côté, Pierrot et Ginette qui ne veulent pas remettre en question la vocation du Café et, de l’autre, ceux qui veulent le rentabiliser. Un certain nombre de compromis seront mis à l’essai. À l’été, le Café se tourne vers le théâtre d’été en présentant la pièce Fais-moi mal juste un peu d’Elizabeth Bourget. À l’automne, on lui refait un look : ambiance de bar avec éclairage à l’avenant pour laisser plus de place à la danse après 23 heures. On forme également une nouvelle équipe de serveurs et de serveuses, rémunérés avec leurs seuls pourboires. Et enfin, on donne accès aux chansonniers-animateurs. La boîte à chansons se transforme alors en                        « 2 Pierrots ».  ...

    L’histoire du Café Instantané (suite 6 et fin)

    Malgré tous ces efforts, le Café Instantané ferme ses portes le 5 avril 1984.

    Les raisons de la fermeture ont nourri nombre de discussions. La proximité avec Montréal ne parvenait pas à attirer les résidents de La Prairie et des villes avoisinantes. En effet, un grand nombre des spectateurs du Café provenaient de Longueuil et de Montréal. Ce type d’espace culturel semblait mieux survivre en région très éloignée des grands centres. Certains artistes et spectateurs avaient du mal à trouver l’endroit via la 132 en raison du détour à effectuer. Au verso des cartes professionnelles du Café, on avait d’ailleurs cru bon de dessiner le fameux itinéraire. De plus, le Café a reçu peu d’aide gouvernementale et le permis d’alcool est peut-être arrivé trop tard. Enfin, en raison du contexte économique difficile au début des années 1980, on peut penser que les sorties culturelles n’étaient pas dans le haut de la liste pour la clientèle, le taux de chômage ayant grimpé à 14 % et un jeune sur cinq étant sans emploi.

    Comme plusieurs autres travailleurs culturels en région, ceux du Groupe Astheur ont dû s’exiler dans une grande ville afin d’essayer de vivre de leur art. Et ils étaient une poignée à vouloir continuer dans cette voie. Leur droit au travail comme artiste est demeuré difficile, parfois impossible, tout au long de leur parcours. Mais ils ont toujours été reconnaissants à l’égard du Café ou nostalgiques… Plus nombreux sont les spectateurs qui ont vécu leurs petites épiphanies lors des événements culturels en tous genres, comme certains récitals de chansons où des publics en feu ont entendu « battre des cœurs à l’unisson ».

    Durant près de trois ans, des centaines de personnes se sont attachées au lieu comme espace de création des membres du Groupe, comme espace de diffusion de spectacles, qui se sont chiffrés à 250 environ, et bien sûr comme espace de détente et de convivialité. Se sentir bien dans un café, échanger avec d’autres citoyens et refaire le monde, se laisser toucher par une œuvre d’art accrochée au mur ou le cachet historique du lieu, lire une bande dessinée ou siroter son énième café, succomber à une viennoiserie et rêvasser, le temps d’une chanson ou d’une partie d’échecs. C’était là tout l’art de vivre au Café Instantané.

     

    Malgré tous ces efforts, le Café Instantané ferme ses portes le 5 avril 1984. Les raisons de la fermeture ont nourri nombre de discussions. La proximité avec Montréal ne parvenait pas à attirer les résidents de La Prairie et des villes avoisinantes. En effet, un grand nombre des spectateurs du Café provenaient de Longueuil et de Montréal. Ce type d’espace culturel semblait mieux survivre en région très éloignée des grands centres. Certains artistes et spectateurs avaient du mal à trouver l’endroit via la 132 en raison du détour à effectuer. Au verso des cartes professionnelles du Café, on avait d’ailleurs cru bon de dessiner le fameux itinéraire. De plus, le Café a reçu peu d’aide gouvernementale et le permis d’alcool est peut-être arrivé trop tard. Enfin, en raison du contexte économique difficile au début des années 1980, on peut penser que les sorties culturelles n’étaient pas dans le haut de la liste pour la clientèle, le taux de chômage ayant grimpé à 14 % et un jeune sur cinq étant sans emploi. Comme plusieurs autres travailleurs culturels en région, ceux du Groupe Astheur ont dû s’exiler dans une grande ville afin d’essayer de vivre de leur art. Et ils étaient une poignée à vouloir continuer dans cette voie. Leur droit au travail comme artiste est demeuré difficile, parfois impossible, tout au long de leur parcours. Mais ils ont toujours été reconnaissants à l’égard du Café ou nostalgiques… Plus nombreux sont les spectateurs qui ont vécu leurs petites épiphanies lors des événements culturels en tous genres, comme certains récitals de chansons où des publics en feu ont entendu « battre des cœurs à l’unisson ». Durant près de trois ans, des centaines de personnes se sont attachées au lieu comme espace de création des membres du Groupe, comme espace de diffusion de spectacles, qui se sont chiffrés à 250 environ, et bien sûr comme espace de détente et de convivialité. Se sentir bien dans un café, échanger avec d’autres citoyens et refaire le monde, se laisser toucher par une œuvre d’art accrochée au mur ou le cachet historique du lieu, lire une bande dessinée ou siroter son énième café, succomber à une viennoiserie et rêvasser, le temps d’une chanson ou d’une partie d’échecs. C’était là tout l’art de vivre au Café Instantané.  ...

    L’histoire du Café Instantané

    Du 22 mai 1981 au 5 avril 1984, le Café Instantané, sis au 102, rue Saint-Georges, dans le Vieux-La Prairie, a été un lieu de création et de diffusion de la culture en région. Il doit sa naissance au travail d’un groupe d’animation culturelle de La Prairie, le Groupe Astheur inc.

    Le fondateur de ce groupe est Pierre Grimard, surnommé Pierrot (1955-2010). En 1978, il réunit en collectif de production des artistes de la Rive-Sud qui veulent vivre de leur métier dans leur coin de pays. Ces artistes deviennent ainsi des            « travailleurs culturels ». À l’époque, le territoire desservi par le Groupe incluait les villes suivantes : Brossard, Candiac, Delson, La Prairie, Saint-Constant, Saint-Mathieu, Saint-Philippe et Sainte-Catherine. Pierrot nommait cette région               « Bassin Laprairie » probablement parce que ses concitoyens utilisaient souvent ce toponyme géographique pour désigner les villes riveraines.

    À l’automne 1980, dix-neuf membres sont officiellement signataires : ils sont graphistes, poètes, comédiens, musiciens, peintres, etc. Ils ont plusieurs réalisations à leur actif et des projets plein la tête. Parmi leurs réalisations, mentionnons Au pied d’la crampe lousse, un spectacle de gags culturels par la troupe de théâtre Les Manches de pelle; le récital de chansons de Pierrot et ses musiciens dans plusieurs villes de la Montérégie; une pièce de théâtre d’intervention sur le recyclage et l’écologie au Cégep Édouard-Montpetit; la production de cartes de Noël. Pour ce qui est des projets, celui d’un café-théâtre, décrit comme un centre d’animation socioculturelle, est de loin le plus porteur.

    Des dix-neuf travailleurs culturels du Groupe, les Normand Boyer, Ginette Duphily, Lison Grimard (1957-2005), Pierrot, Annie Marleau, Paola Masutti, Hélène Monette (1960-2015), Sonia Morin et Daniel Roussel participent régulièrement aux assemblées ou à des rencontres informelles et deviennent les artisans du Café Instantané.

    Mais au cœur de cette équipe bouillonnante de vingtenaires, Pierrot demeure le porte-flambeau du Groupe.

    Comédien à 16 ans à l’option-théâtre de son école secondaire à La Prairie, Pierrot devient metteur en scène et dramaturge à 17 ans. Il écrit plusieurs pièces dont Viens souper Ti-Toff, qu’il présente avec sa troupe La barouette à Ben dans les écoles primaires. Il donne des ateliers de théâtre et d’improvisation, et entre 16 et 19 ans, il expose ses peintures et publie deux recueils de poésie : D’abîme d’amour, en 1975, et Le rat dans la matrice, en 1976. En 1977, Pierrot quitte les bancs d’école, assume son choix d’autodidacte et de travailleur culturel et communautaire du « Bassin Laprairie ». Il s’investit dans tous les regroupements à caractère social, culturel et même politique de sa région.

    Perçu par les uns comme un idéaliste, par les autres comme un battant, le président-fondateur du Groupe aura pu convaincre les plus sceptiques de passer du rêve à la réalité en ouvrant un établissement qui allierait boîte à chansons et café-théâtre.

     

    Du 22 mai 1981 au 5 avril 1984, le Café Instantané, sis au 102, rue Saint-Georges, dans le Vieux-La Prairie, a été un lieu de création et de diffusion de la culture en région. Il doit sa naissance au travail d’un groupe d’animation culturelle de La Prairie, le Groupe Astheur inc. Le fondateur de ce groupe est Pierre Grimard, surnommé Pierrot (1955-2010). En 1978, il réunit en collectif de production des artistes de la Rive-Sud qui veulent vivre de leur métier dans leur coin de pays. Ces artistes deviennent ainsi des            « travailleurs culturels ». À l’époque, le territoire desservi par le Groupe incluait les villes suivantes : Brossard, Candiac, Delson, La Prairie, Saint-Constant, Saint-Mathieu, Saint-Philippe et Sainte-Catherine. Pierrot nommait cette région               « Bassin Laprairie » probablement parce que ses concitoyens utilisaient souvent ce toponyme géographique pour désigner les villes riveraines. À l’automne 1980, dix-neuf membres sont officiellement signataires : ils sont graphistes, poètes, comédiens, musiciens, peintres, etc. Ils ont plusieurs réalisations à leur actif et des projets plein la tête. Parmi leurs réalisations, mentionnons Au pied d’la crampe lousse, un spectacle de gags culturels par la troupe de théâtre Les Manches de pelle; le récital de chansons de Pierrot et ses musiciens dans plusieurs villes de la Montérégie; une pièce de théâtre d’intervention sur le recyclage et l’écologie au Cégep Édouard-Montpetit; la production de cartes de Noël. Pour ce qui est des projets, celui d’un café-théâtre, décrit comme un centre d’animation socioculturelle, est de loin le plus porteur. Des dix-neuf travailleurs culturels du Groupe, les Normand Boyer, Ginette Duphily, Lison Grimard (1957-2005), Pierrot, Annie Marleau, Paola Masutti, Hélène Monette (1960-2015), Sonia Morin et Daniel Roussel participent régulièrement aux assemblées ou à des rencontres informelles et deviennent les artisans du Café Instantané. Mais au cœur de cette équipe bouillonnante de vingtenaires, Pierrot demeure le porte-flambeau du Groupe. Comédien à 16 ans à l’option-théâtre de son école secondaire à La Prairie, Pierrot devient metteur en scène et dramaturge à 17 ans. Il écrit plusieurs pièces dont Viens souper Ti-Toff, qu’il présente avec sa troupe La barouette à Ben dans les écoles primaires. Il donne des ateliers de théâtre et d’improvisation, et entre 16 et 19 ans, il expose ses peintures et publie deux recueils de poésie : D’abîme d’amour, en 1975, et Le rat dans la matrice, en 1976. En 1977, Pierrot quitte les bancs d’école, assume son choix d’autodidacte et de travailleur culturel et communautaire du « Bassin Laprairie ». Il s’investit dans tous les regroupements à caractère social, culturel et même politique de sa région. Perçu par les uns comme un idéaliste, par les autres comme un battant, le président-fondateur du Groupe aura pu convaincre les plus sceptiques de passer du rêve à la réalité en ouvrant un établissement qui allierait boîte à chansons et café-théâtre.  ...

    L’histoire du Café Instantané (suite 1)

    Dans le Québec des années 1980, on assiste à une vague de cafés-théâtres et à un renouveau des boîtes à chansons faisant cohabiter plusieurs disciplines artistiques. Le projet du Café profite de ce contexte. Le Café se veut un tremplin non seulement pour les membres du Groupe qui y présenteront leurs propres spectacles, mais aussi pour les artistes connus et moins connus œuvrant dans la chanson, le théâtre, la musique, la peinture, la poésie, etc. Pour le décor et l’ambiance est retenue l’idée d’un lieu intimiste favorisant l’interaction avec le public, soit une petite salle d’une soixantaine de personnes, avec un soutien scénique minimal.

    Les membres du Groupe veulent aussi offrir aux gens de la région leur premier café, soit un lieu de rassemblement ou de détente, un petit resto où l’on sert évidemment la boisson caféinée, des pâtisseries alléchantes, des repas légers (croque-monsieur, pince-madame, salades, assiettes de pâtés, de fromages), des boissons rafraîchissantes comme des boissons chaudes et réconfortantes, et ce, avant ou après les spectacles. Ils rêvent de créer un lieu qui permettrait aux clients de s’y sentir comme dans leur salon : une petite bibliothèque dans un coin contenant livres, journaux, revues, jeux de société, etc.; des œuvres accrochées au mur, réalisées par des artisans ou des artistes de la région.

    Commence alors la recherche d’un espace, d’un nom, de temps et… de financement.

    C’est dans le site patrimonial de La Prairie que le Groupe Astheur trouve un espace pour son Café. Aujourd’hui nommé « Maison Leclerc », l’édifice actuel à toit mansardé d’esprit américain à trois étages du 102, rue Saint-Georges a du style. Construit dans les années 1880, il a servi principalement de magasin général de 1890 aux années 1960. En 1978, il est la propriété d’un ébéniste, Michel Thibert, qui en fait sa résidence et son atelier. Le Café Instantané occupera le grand local du rez-de-chaussée, l’étage même de l’ancien magasin général.

    Pour ce qui est du nom du Café, Ginette Duphily parle un jour d’un spectacle vu dans une salle du pavillon J.-A.-DeSève de l’Université de Montréal. Cette salle a pour nom « Café Instantané »! Les membres s’approprient le nom et ne se formalisent pas de le choisir même s’il est déjà attribué à un autre lieu de spectacles.

    Le temps? C’est ce que les membres ont le plus à offrir. Et l’argent? À défaut de subventions, un prêt à la Caisse populaire permet de démarrer le projet.

    À l’aube de l’ouverture du Café, le Groupe a beaucoup changé : il est formé moitié-moitié de travailleurs culturels et de membres de la famille de Pierrot. Sa sœur Lison est le maître d’œuvre du design ? de la couleur des murs (lilas et vert pomme) à celle des nappes, des chaises et des tabliers, jusqu’à la signature même du Groupe (logo, dessin, etc.) ? et avec l’ébéniste Michel, ils conçoivent l’aménagement : construction de la scène, du bar, de la petite cuisine, des tables et des chaises; peinture et vernis; etc.

    Annie, Ginette, Hélène, Normand, Paola et Sonia s’attellent également à la tâche : travail manuel et domestique, restauration, publicité, régie technique, choix de la musique d’ambiance, etc. On s’improvise préposés à la cuisine et au service aux tables, et on accueille deux nouvelles recrues : Nicole Grimard et Claude Plante.

     

    Dans le Québec des années 1980, on assiste à une vague de cafés-théâtres et à un renouveau des boîtes à chansons faisant cohabiter plusieurs disciplines artistiques. Le projet du Café profite de ce contexte. Le Café se veut un tremplin non seulement pour les membres du Groupe qui y présenteront leurs propres spectacles, mais aussi pour les artistes connus et moins connus œuvrant dans la chanson, le théâtre, la musique, la peinture, la poésie, etc. Pour le décor et l’ambiance est retenue l’idée d’un lieu intimiste favorisant l’interaction avec le public, soit une petite salle d’une soixantaine de personnes, avec un soutien scénique minimal. Les membres du Groupe veulent aussi offrir aux gens de la région leur premier café, soit un lieu de rassemblement ou de détente, un petit resto où l’on sert évidemment la boisson caféinée, des pâtisseries alléchantes, des repas légers (croque-monsieur, pince-madame, salades, assiettes de pâtés, de fromages), des boissons rafraîchissantes comme des boissons chaudes et réconfortantes, et ce, avant ou après les spectacles. Ils rêvent de créer un lieu qui permettrait aux clients de s’y sentir comme dans leur salon : une petite bibliothèque dans un coin contenant livres, journaux, revues, jeux de société, etc.; des œuvres accrochées au mur, réalisées par des artisans ou des artistes de la région. Commence alors la recherche d’un espace, d’un nom, de temps et... de financement. C’est dans le site patrimonial de La Prairie que le Groupe Astheur trouve un espace pour son Café. Aujourd’hui nommé « Maison Leclerc », l’édifice actuel à toit mansardé d’esprit américain à trois étages du 102, rue Saint-Georges a du style. Construit dans les années 1880, il a servi principalement de magasin général de 1890 aux années 1960. En 1978, il est la propriété d’un ébéniste, Michel Thibert, qui en fait sa résidence et son atelier. Le Café Instantané occupera le grand local du rez-de-chaussée, l’étage même de l’ancien magasin général. Pour ce qui est du nom du Café, Ginette Duphily parle un jour d’un spectacle vu dans une salle du pavillon J.-A.-DeSève de l’Université de Montréal. Cette salle a pour nom « Café Instantané »! Les membres s’approprient le nom et ne se formalisent pas de le choisir même s’il est déjà attribué à un autre lieu de spectacles. Le temps? C’est ce que les membres ont le plus à offrir. Et l’argent? À défaut de subventions, un prêt à la Caisse populaire permet de démarrer le projet. À l’aube de l’ouverture du Café, le Groupe a beaucoup changé : il est formé moitié-moitié de travailleurs culturels et de membres de la famille de Pierrot. Sa sœur Lison est le maître d’œuvre du design ? de la couleur des murs (lilas et vert pomme) à celle des nappes, des chaises et des tabliers, jusqu’à la signature même du Groupe (logo, dessin, etc.) ? et avec l’ébéniste Michel, ils conçoivent l’aménagement : construction de la scène, du bar, de la petite cuisine, des tables et des chaises; peinture et vernis; etc. Annie, Ginette, Hélène, Normand, Paola et Sonia s’attellent également à la tâche : travail manuel et domestique, restauration, publicité, régie technique, choix de la musique d’ambiance, etc. On s’improvise préposés à la cuisine et au service aux tables, et on accueille deux nouvelles recrues : Nicole Grimard et Claude Plante.  ...

    L’histoire du Café Instantané (suite 2)

    Daniel se propose comme technicien du son et éclairagiste; Lison prête son piano droit; Pierrot demeure le coordonnateur du Groupe, ainsi que le directeur artistique et l’administrateur du Café.

    C’est ainsi que dans le journal régional Le Reflet, 51e édition de la 14e année, le 27 mai 1981, la une titrait : « Le Groupe Astheur célèbre l’ouverture du Café Instantané à La Prairie ». L’événement s’est tenu le vendredi 22 mai, en pleine floraison des lilas.

    Comme l’écrivait Pierrot : « Ce qui devait être un petit café tranquille où une fois de temps en temps nous présenterions un spectacle s’est automatiquement transformé en une espèce de tourbillon de folie culturelle. En tout et pour tout, 154 spectacles différents pour un total de 6298 spectateurs pour la saison 1981-1982. »

    De mai à décembre 1981 et en janvier 1982, le Café Instantané en formule boîte à chansons reçoit Jocelyn Bérubé, qui donne le coup d’envoi, Claude Gauthier,     Raymond Lévesque, Priscilla, Sylvain Lelièvre, Marie-Claire Séguin, Gilles Valiquette, Alain Lamontagne, Bertrand Gosselin, Richard Séguin.

    Pour la majorité des spectacles, le prix des billets varie entre 6 $ et 8 $ à la porte, mais entre 5 $ et 7 $ si le public réserve. Fait à noter, le public peut réserver en appelant au Café et aussi à l’appartement de Pierrot à Saint-Philippe!

    Toujours dans les premiers temps du Café, la boîte à chansons se transforme souvent en café-théâtre. Sont  présentées les pièces Eh! Qu’mon chum est platte! d’André Boulanger et Sylvie Prégent par le Théâtre de ma Blonde est au Boutte ainsi que Les extravagantes et voluptueuses aventures du baron de Crac avec Réjean Wagner.

     

    Daniel se propose comme technicien du son et éclairagiste; Lison prête son piano droit; Pierrot demeure le coordonnateur du Groupe, ainsi que le directeur artistique et l’administrateur du Café. C’est ainsi que dans le journal régional Le Reflet, 51e édition de la 14e année, le 27 mai 1981, la une titrait : « Le Groupe Astheur célèbre l’ouverture du Café Instantané à La Prairie ». L’événement s’est tenu le vendredi 22 mai, en pleine floraison des lilas. Comme l’écrivait Pierrot : « Ce qui devait être un petit café tranquille où une fois de temps en temps nous présenterions un spectacle s’est automatiquement transformé en une espèce de tourbillon de folie culturelle. En tout et pour tout, 154 spectacles différents pour un total de 6298 spectateurs pour la saison 1981-1982. » De mai à décembre 1981 et en janvier 1982, le Café Instantané en formule boîte à chansons reçoit Jocelyn Bérubé, qui donne le coup d’envoi, Claude Gauthier,     Raymond Lévesque, Priscilla, Sylvain Lelièvre, Marie-Claire Séguin, Gilles Valiquette, Alain Lamontagne, Bertrand Gosselin, Richard Séguin. Pour la majorité des spectacles, le prix des billets varie entre 6 $ et 8 $ à la porte, mais entre 5 $ et 7 $ si le public réserve. Fait à noter, le public peut réserver en appelant au Café et aussi à l’appartement de Pierrot à Saint-Philippe! Toujours dans les premiers temps du Café, la boîte à chansons se transforme souvent en café-théâtre. Sont  présentées les pièces Eh! Qu’mon chum est platte! d’André Boulanger et Sylvie Prégent par le Théâtre de ma Blonde est au Boutte ainsi que Les extravagantes et voluptueuses aventures du baron de Crac avec Réjean Wagner.  ...

    L’histoire du Café Instantané (suite 3)

    Le Café reçoit également des troupes de théâtre amateur, de nouvelles formations musicales, les auteurs-compositeurs-interprètes de la relève du temps, Marcel (Max) Décoste, Céline Delisle, André Landriault, Normand Perron, Yvan Porcheron, Pierre Shea dans son spectacle Les clients, ainsi que les chanteuses Denise Duford, Danielle Jasmin et Geneviève Mauffette.

    L’équipe du Café souligne aussi les fêtes officielles et non officielles en organisant des soirées de danse et de musique pour la Fête nationale, une épluchette de blé d’Inde, une nuit de la poésie, une fête costumée pour l’Halloween, des lancements de livres, la Semaine de jazz.

    Fidèles à leur vocation première, les membres du Groupe Astheur donnent périodiquement des spectacles multidisciplinaires, qu’on annonce comme des happenings en raison des numéros humoristiques qui alternent avec ceux, plus sérieux, de poésie, de jazz et de chansons. Sur un ton bon enfant, Pierrot est l’animateur de la soirée, offre ses monologues ou ses chansons. Hélène livre ses textes en chantant ou en expérimentant des interprétations de poèmes avec des amis musiciens; Sonia et Paola jouent des saynètes. Afin de permettre les changements de costumes, de décors ou d’ambiance, des musiciens du Groupe improvisent entre les numéros.

    De février 1982 au premier anniversaire, des nouveautés s’ajoutent à la programmation : les concerts de musique classique les mardis soirs au coût de 2,50 $, les soirées-rencontres d’écrivains les mercredis soirs et les concerts de jazz les jeudis soirs au même tarif, ainsi que le théâtre pour enfants le dimanche matin au coût de 2 $ pour les enfants et de 3 $ pour les adultes. Des personnalités qui ont foulé les planches du Café durant les semaines les plus intensives de son histoire du mercredi au dimanche, mentionnons les écrivains Madeleine Ferron, Michel Garneau, Gaston Miron, Denise Boucher, Louky Bersianik et les éditeurs du Noroît, les musiciens Karen Young et Vic Vogel, les troupes Petit à Petit, La Cannerie et le Théâtre de Quartier.

    Se poursuit, bien sûr, la programmation régulière des vendredis et samedis soirs, où la boîte à chansons reçoit Danielle Oddera dans le spectacle Je persiste et signe… Brel, Claude Landré, Renée Claude dans son spectacle hommage à Clémence Desrochers Moi c’est Clémence que j’aime le mieux, Michel McLean (ex-Karrik, ex-Engoulevent), Jim Corcoran, Jean-Guy Moreau, Lucie Tremblay, Claude Léveillée1, Manuel Brault, Pierre Létourneau, Yves Cloutier et François Guy. En formule café-théâtre, le Café offre la pièce Mosus de mosus de mosus de Denise Guénette avec Jacqueline Payette.

     

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    1. Dans son récit Mon ami Pierrot, publié chez Linguatech éditeur en 2016, Ginette Duphily relate plusieurs anecdotes savoureuses sur la venue des artistes au Café Instantané, dont celle émouvante du spectacle de Claude Léveillée.

     

    La suite de cet article dans notre prochain numéro….

     

    Le Café reçoit également des troupes de théâtre amateur, de nouvelles formations musicales, les auteurs-compositeurs-interprètes de la relève du temps, Marcel (Max) Décoste, Céline Delisle, André Landriault, Normand Perron, Yvan Porcheron, Pierre Shea dans son spectacle Les clients, ainsi que les chanteuses Denise Duford, Danielle Jasmin et Geneviève Mauffette. L’équipe du Café souligne aussi les fêtes officielles et non officielles en organisant des soirées de danse et de musique pour la Fête nationale, une épluchette de blé d’Inde, une nuit de la poésie, une fête costumée pour l’Halloween, des lancements de livres, la Semaine de jazz. Fidèles à leur vocation première, les membres du Groupe Astheur donnent périodiquement des spectacles multidisciplinaires, qu’on annonce comme des happenings en raison des numéros humoristiques qui alternent avec ceux, plus sérieux, de poésie, de jazz et de chansons. Sur un ton bon enfant, Pierrot est l’animateur de la soirée, offre ses monologues ou ses chansons. Hélène livre ses textes en chantant ou en expérimentant des interprétations de poèmes avec des amis musiciens; Sonia et Paola jouent des saynètes. Afin de permettre les changements de costumes, de décors ou d’ambiance, des musiciens du Groupe improvisent entre les numéros. De février 1982 au premier anniversaire, des nouveautés s’ajoutent à la programmation : les concerts de musique classique les mardis soirs au coût de 2,50 $, les soirées-rencontres d’écrivains les mercredis soirs et les concerts de jazz les jeudis soirs au même tarif, ainsi que le théâtre pour enfants le dimanche matin au coût de 2 $ pour les enfants et de 3 $ pour les adultes. Des personnalités qui ont foulé les planches du Café durant les semaines les plus intensives de son histoire du mercredi au dimanche, mentionnons les écrivains Madeleine Ferron, Michel Garneau, Gaston Miron, Denise Boucher, Louky Bersianik et les éditeurs du Noroît, les musiciens Karen Young et Vic Vogel, les troupes Petit à Petit, La Cannerie et le Théâtre de Quartier. Se poursuit, bien sûr, la programmation régulière des vendredis et samedis soirs, où la boîte à chansons reçoit Danielle Oddera dans le spectacle Je persiste et signe… Brel, Claude Landré, Renée Claude dans son spectacle hommage à Clémence Desrochers Moi c’est Clémence que j’aime le mieux, Michel McLean (ex-Karrik, ex-Engoulevent), Jim Corcoran, Jean-Guy Moreau, Lucie Tremblay, Claude Léveillée1, Manuel Brault, Pierre Létourneau, Yves Cloutier et François Guy. En formule café-théâtre, le Café offre la pièce Mosus de mosus de mosus de Denise Guénette avec Jacqueline Payette.   _________________________ 1. Dans son récit Mon ami Pierrot, publié chez Linguatech éditeur en 2016, Ginette Duphily relate plusieurs anecdotes savoureuses sur la venue des artistes au Café Instantané, dont celle émouvante du spectacle de Claude Léveillée.   La suite de cet article dans notre prochain numéro….  ...