Sur les traces de l’emprise du premier chemin de fer au Canada

Construit en 1836, le premier chemin de fer au Canada a relié La Prairie à Saint-Jean. N’est-ce pas un événement unique dans l’histoire de La Prairie? On en trouve des rappels dans les monuments qui ont été érigés au fil du temps dont le plus important est sans doute celui situé à l’angle des rues Saint-Ignace et Saint-Henri. Mais, au-delà de ces commémorations, on peut se demander ce qu’il reste aujourd’hui du chemin de fer de 1836. Eh bien, sachons qu’il reste encore des traces très impressionnantes et si bien conservées qu’elles peuvent être mises en valeur. Les voies ferrées ont certes disparu, mais l’emprise sur laquelle elles ont été construites a laissé des traces, et elles sont toujours là.

La première question qui vient à l’esprit : mais où donc passait ce premier chemin de fer ? On sait que dans le territoire de la ville de La Prairie il suivait une ligne droite à partir du fleuve d’où arrivaient les passagers et les marchandises en bateau à vapeur. Il couvrait une distance de 8,3 km jusqu’à la jonction où, en 1851, il sera remplacé par une voie ferrée qui se rendra à Saint-Lambert pour y enjamber plus tard le pont Victoria. Or, 6,8 km de ces 8,3 km sont toujours repérables sur le territoire de La Prairie, soit près de 80 %.

On peut distinguer quatre tronçons. Le premier relie l’A-132 à la rue du Maire sur une distance d’environ 1 km dans l’axe de la rue de la Levée. Le second prend le relai sur 1 km derrière le collège Jean de la Mennais en ligne droite avec la piste cyclable qui longe l’ancienne briqueterie. L’emprise disparaît malheureusement par la suite, effacée lors de l’aménagement des quartiers du Grand Boisé et Symbiocité. Le troisième tronçon réapparaît au-delà de l’A-30 sur 2,3 km, jusqu’à la limite de l’ancienne commune, dont 1,5 km bien conservé. Le dernier tronçon, d’une longueur de 2,5 km, relie la frontière de l’ancienne commune à l’intersection avec la voie ferrée actuelle menant au pont Victoria située à 400 mètres au nord du chemin de la Bataille.

À qui appartiennent ces tronçons ? La ville est le principal propriétaire. Elle possède 51 % des 6,8 km de l’emprise repérable, suivi par Poirier, un entrepreneur immobilier, avec 34 %, et, finalement, le collège Jean de la Mennais et la Société d’agriculture du coté de La Prairie qui, ensemble, totalisent 15 %. La carte ci-dessus et le tableau suivant résument l’importance de chacun des tronçons repérables et précisent le nom du propriétaire.

Tronçon Longueur km Propriétaire Longueur

%

Du village 1,0 Ville de La Prairie  

51

Chemin de la Bataille 2,5 Ville de La Prairie
Fontarabie 2,3 Poirier (entrepreneur) 34
Jean de la Mennais 1,0 Collège Jean de la Mennais et Société d’agriculture du comté de La Prairie  

15

TOTAL EMPRISE 6,8 100

Le tronçon du village

Cette partie de l’emprise comprend deux sections. La première, longue de plus de 300 mètres et se terminant à la rue Notre-Dame, est de loin la plus importante puisqu’on y retrouvait en 1836 les infrastructures qui ont marqué la révolution des transports du début du XIXe siècle : le chemin de fer, la gare, le quai où arrivaient et partaient les bateaux à vapeur. Il faut y ajouter le moulin seigneurial des Jésuites. Bien qu’il ait été construit à la fin du XVIIe siècle, il faisait partie de ce qui formait alors le pôle d’activité le plus important de La Prairie.

L’illustration ci-dessus montre l’emplacement vraisemblable de la gare et du moulin en 1836.

La deuxième section se confond avec la rue de la Levée et relie la rue Notre-Dame à la rue du Maire sur près de 700 mètres. Elle rappelle la renaissance du chemin de fer à La Prairie après son interruption en 1851.

Plus tard, en 1936, les Entreprises Lallemand de Montréal, encore aujourd’hui un leader mondial de la levure, implantent une usine dans la zone industrielle du village. Elle y restera jusqu’en 1971. Plusieurs citoyens de La Prairie qui ont vécu dans cette partie de la ville se rappellent avoir traversé cette voie ferrée.

Le tronçon Jean de la Mennais

Le tronçon Jean de la Mennais (JDLM) fait le lien entre la rue du Maire et la limite sud du quartier du Grand Boisé. Il se déploie sur environ un kilomètre entre d’un côté la briqueterie et, de l’autre, le collège JDLM et des installations sportives de la ville de La Prairie.

Une première section se confond avec une aire de conservation que le collège vient d’aménager (plantation d’arbres). Elle conduit à une deuxième section où elle prend la forme d’une piste cyclable menant vers le quartier du Grand Boisé.

Ici, l’emprise est en grande partie située sur la propriété de la Société d’agriculture du comté de La Prairie qui possède également les terrains du Marché des jardiniers, du parc Lucie-Roussel et de Botanix. La ville détient un bail à long terme. Cette piste est reliée à celle qui borde le chemin de Saint-Jean, puis bifurque à droite en côtoyant Botanix pour rejoindre finalement l’emprise.

 

 

 

 

 

 

 

 

Le tronçon Fontarabie

Ce tronçon est situé entre la route 217 et la limite sud de l’ancienne commune. Il est traversé par la rivière Saint-Jacques presque en son milieu. Ce tronçon comprend deux sections. La première relie la route 217 à la rivière Saint-Jacques sur une distance de 770 mètres. Les traces de l’emprise et du pont qui enjambait la rivière sont à peine perceptibles.

Une photo du pont datant de 1971 montre que les piliers étaient encore en bon état à cette époque.

Photo saisissante datant de 1971 des vestiges du pont qui enjambait la rivière Saint-Jacques. Source: PELLETIER, Michel, Histoire des chemins de fer du Québec, Les Éditions GID, 2014, page 35 (750 pages).

 

La deuxième section fait le lien entre la rivière Saint-Jacques et la limite sud de l’ancienne commune.

C’est dans cette partie longue de 1,7 kilomètre que l’on peut admirer l’emprise dans l’état qui s’approche beaucoup sans doute de ce qu’elle était à l’origine. Elle est actuellement utilisée par des amateurs de VTT et de motoneiges qui en assurent l’entretien en vertu d’une entente avec le propriétaire.

On y accède par un sentier à partir du chemin de Saint-Jean, vis-à-vis du chemin de Fontarabie.

Cette photo montre les traces de l’emprise menant à la rivière Saint-Jacques. Source: Albert Juneau

Le tronçon chemin de la Bataille

Long de 2,5 km, le tronçon du chemin de la Bataille relie la frontière de la commune à la voie ferrée qui assure le lien entre Saint-Jean et Saint-Lambert. Il est unique en ce qu’il traverse des terres agricoles sur toute sa longueur. L’emprise est nettement visible sur un kilomètre dans sa partie surélevée. La ville de La Prairie en est le propriétaire.

Ce tronçon est particulièrement riche sur le plan patrimonial, non seulement en raison de la qualité de la partie surélevée de l’emprise, mais aussi parce qu’elle fait le lien entre le passé et le présent.

En effet, le segment de 425 mètres entre le chemin de la Bataille et la voie ferrée actuelle impressionne par la surélévation très nette de l’emprise et le fait qu’elle ait été bien conservée. Il s’agit d’un héritage exceptionnel.

Une grande partie du corridor de l’emprise de 1836 a été protégée. Il reste maintenant à mettre en valeur ce patrimoine unique.

 

 

 

 

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