Sélection d'une édition

    Un ancien dépotoir

    La collecte sélective, la récupération, le recyclage, le compostage et la réutilisation sont des gains écologiques récents dans l’histoire du traitement des déchets produits par l’homme. Il n’y a pas si longtemps les ordures étaient brûlées, déposées dans la nature ou encore jetées dans les cours d’eau.

    Aujourd’hui, ce qui ne peut être traité est dirigé vers d’immenses sites d’enfouissement qu’il faudra sous peu agrandir. En juillet 2019, le journal La Presse titrait : « Le compte à rebours est commencé. Le seul centre d’enfouissement de la région de Montréal n’aura plus de place dans 10 ans. Il est urgent de réduire la quantité de déchets que nous enfouissons, disent les autorités régionales, qui font pression sur Québec pour mettre les solutions en place. »

    À La Prairie, durant la décennie 1950, M. Philias Lanctôt (maire de La Prairie de 1950 à 1962) était propriétaire d’une concession automobile située là où est présentement l’édifice qui loge l’hôtel de ville. Tout le terrain qui s’étendait le long du boulevard Taschereau de son garage jusqu’à la rivière Saint-Jacques lui appartenait. M. Lanctôt fit de cet espace un dépotoir municipal.

    Avec les années, les odeurs qui s’en dégageaient devinrent si intolérables que le curé dut intervenir auprès du ministère concerné qui a fait fermer le site. En conséquence, pendant longtemps on a brûlé, enfoui et transporté les déchets qui s’y trouvaient.

    On remarquera sur les photos l’église à l’arrière-plan ainsi que l’enseigne de l’ancien restaurant Le Colonial disparu à la suite d’un incendie.

     

    La collecte sélective, la récupération, le recyclage, le compostage et la réutilisation sont des gains écologiques récents dans l’histoire du traitement des déchets produits par l’homme. Il n’y a pas si longtemps les ordures étaient brûlées, déposées dans la nature ou encore jetées dans les cours d’eau. Aujourd’hui, ce qui ne peut être traité est dirigé vers d’immenses sites d’enfouissement qu’il faudra sous peu agrandir. En juillet 2019, le journal La Presse titrait : « Le compte à rebours est commencé. Le seul centre d’enfouissement de la région de Montréal n’aura plus de place dans 10 ans. Il est urgent de réduire la quantité de déchets que nous enfouissons, disent les autorités régionales, qui font pression sur Québec pour mettre les solutions en place. » À La Prairie, durant la décennie 1950, M. Philias Lanctôt (maire de La Prairie de 1950 à 1962) était propriétaire d’une concession automobile située là où est présentement l’édifice qui loge l’hôtel de ville. Tout le terrain qui s’étendait le long du boulevard Taschereau de son garage jusqu’à la rivière Saint-Jacques lui appartenait. M. Lanctôt fit de cet espace un dépotoir municipal. Avec les années, les odeurs qui s’en dégageaient devinrent si intolérables que le curé dut intervenir auprès du ministère concerné qui a fait fermer le site. En conséquence, pendant longtemps on a brûlé, enfoui et transporté les déchets qui s’y trouvaient. On remarquera sur les photos l’église à l’arrière-plan ainsi que l’enseigne de l’ancien restaurant Le Colonial disparu à la suite d’un incendie.  ...

    La Prairie au temps des épidémies (suite de janvier 2021)

    Deux semaines plus tard, il est résolu que les conseillers Tancrède Sauvageau, Robert Duclos et John Dunn forment un comité de santé « à l’effet de visiter les cours, les terrains, les marais, ayant pleins pouvoirs de mettre les règlements en force pour tout ce qui concerne la salubrité du village, et autres dépens nécessaires à cet effet […] ». On voit également à améliorer l’écoulement des eaux de surface, source de contamination.

    Pour des raisons économiques, on a toujours maintenu la navigation à vapeur durant les épidémies et il y a souvent eu beaucoup de laxisme dans l’application des mesures de quarantaine. Malgré tout, il arrive que les épidémies s’effondrent d’elles-mêmes lorsque les agents pathogènes sont privés d’un nombre suffisant de personnes sensibles pour continuer à se propager. Les plus vulnérables sont morts et les survivants ont été immunisés.

    L’épidémie de variole de 1885-1886

    La variole, aussi nommée petite vérole ou picote, est une maladie très contagieuse et souvent mortelle (dans 3 cas sur 10) qui a été un véritable fléau dans plusieurs régions du monde. Bien que le vaccin antivariolique ait été mis au point par Edward Jenner en Angleterre en 1796, il faudra attendre jusqu’en 1980 pour que l'Organisation mondiale de la santé proclame son éradication, car aucun cas de cette maladie n'avait été déclaré depuis 1977.

    Les principaux symptômes de la maladie sont une fièvre élevée, des maux de tête, des vomissements et des   éruptions cutanées. Chez les survivants, les conséquences à long terme sont des cicatrices particulièrement visibles au visage, lesquelles peuvent dans certains cas affecter la vision.

    « C’est au début du 19e siècle qu’est utilisé par les médecins le premier vaccin (antivariolique) de l’histoire. Il est issu de l’observation que la variole des vaches transmise à des humains permet de les immuniser contre la variole humaine, maladie alors très meurtrière. […] Une loi favorise  cette nouvelle pratique préventive et une vaste campagne permet de vacciner, entre 1815 et 1822, près de 32 000 personnes au Canada. »

    En 1875, soucieuses d’enrayer l’épidémie de variole, les autorités rendent la vaccination obligatoire. Cette décision provoquera des émeutes et mènera à la création d’une ligue contre la vaccination.

    Dix ans plus tard, en 1885, à nouveau débordée par la nouvelle épidémie, la ville de Montréal rend la vaccination obligatoire.

    Or, les Canadiens français se méfient de la vaccination, d’autant que le camp anti-vaccin compte d’éminents médecins. Une partie de la population résiste à cette mesure ainsi qu’à l’isolement des malades, au placardage des maisons ou encore à l’obligation d’hospitaliser les enfants atteints. Des émeutes éclatent à nouveau. S’étonnera-t-on qu’aujourd’hui encore plusieurs s’opposent à la vaccination ainsi qu’aux règles les plus élémentaires de protection ; port du masque et distanciation sociale.

    À La Prairie en 1885, l’épidémie frappe durement et force les autorités municipales à réagir.

    Le curé Florent Bourgeault a attrapé la maladie et en est presque mort.

    En avril, le Dr Thomas Auguste Brisson, alors maire, a dû, avec les membres du comité de santé, se rendre en députation à Québec pour aviser des meilleurs moyens à prendre pour rendre efficace le travail du comité d’hygiène local. En mai, il est résolu que des mesures immédiates soient prises pour égoutter et assainir le village de manière à faire disparaître les mares et autres étangs d’eau croupie et qu’en conséquence tous les fossés et les canaux nécessaires à cette fin soient construits.

     

    Deux semaines plus tard, il est résolu que les conseillers Tancrède Sauvageau, Robert Duclos et John Dunn forment un comité de santé « à l’effet de visiter les cours, les terrains, les marais, ayant pleins pouvoirs de mettre les règlements en force pour tout ce qui concerne la salubrité du village, et autres dépens nécessaires à cet effet […] ». On voit également à améliorer l’écoulement des eaux de surface, source de contamination. Pour des raisons économiques, on a toujours maintenu la navigation à vapeur durant les épidémies et il y a souvent eu beaucoup de laxisme dans l’application des mesures de quarantaine. Malgré tout, il arrive que les épidémies s’effondrent d’elles-mêmes lorsque les agents pathogènes sont privés d’un nombre suffisant de personnes sensibles pour continuer à se propager. Les plus vulnérables sont morts et les survivants ont été immunisés. L’épidémie de variole de 1885-1886 La variole, aussi nommée petite vérole ou picote, est une maladie très contagieuse et souvent mortelle (dans 3 cas sur 10) qui a été un véritable fléau dans plusieurs régions du monde. Bien que le vaccin antivariolique ait été mis au point par Edward Jenner en Angleterre en 1796, il faudra attendre jusqu’en 1980 pour que l'Organisation mondiale de la santé proclame son éradication, car aucun cas de cette maladie n'avait été déclaré depuis 1977. Les principaux symptômes de la maladie sont une fièvre élevée, des maux de tête, des vomissements et des   éruptions cutanées. Chez les survivants, les conséquences à long terme sont des cicatrices particulièrement visibles au visage, lesquelles peuvent dans certains cas affecter la vision. « C’est au début du 19e siècle qu’est utilisé par les médecins le premier vaccin (antivariolique) de l’histoire. Il est issu de l’observation que la variole des vaches transmise à des humains permet de les immuniser contre la variole humaine, maladie alors très meurtrière. […] Une loi favorise  cette nouvelle pratique préventive et une vaste campagne permet de vacciner, entre 1815 et 1822, près de 32 000 personnes au Canada. » En 1875, soucieuses d’enrayer l’épidémie de variole, les autorités rendent la vaccination obligatoire. Cette décision provoquera des émeutes et mènera à la création d’une ligue contre la vaccination. Dix ans plus tard, en 1885, à nouveau débordée par la nouvelle épidémie, la ville de Montréal rend la vaccination obligatoire. Or, les Canadiens français se méfient de la vaccination, d’autant que le camp anti-vaccin compte d’éminents médecins. Une partie de la population résiste à cette mesure ainsi qu’à l’isolement des malades, au placardage des maisons ou encore à l’obligation d’hospitaliser les enfants atteints. Des émeutes éclatent à nouveau. S’étonnera-t-on qu’aujourd’hui encore plusieurs s’opposent à la vaccination ainsi qu’aux règles les plus élémentaires de protection ; port du masque et distanciation sociale. À La Prairie en 1885, l’épidémie frappe durement et force les autorités municipales à réagir. Le curé Florent Bourgeault a attrapé la maladie et en est presque mort. En avril, le Dr Thomas Auguste Brisson, alors maire, a dû, avec les membres du comité de santé, se rendre en députation à Québec pour aviser des meilleurs moyens à prendre pour rendre efficace le travail du comité d’hygiène local. En mai, il est résolu que des mesures immédiates soient prises pour égoutter et assainir le village de manière à faire disparaître les mares et autres étangs d’eau croupie et qu’en conséquence tous les fossés et les canaux nécessaires à cette fin soient construits.  ...

    La Prairie au temps des épidémies (suite 1)

    Plus tard, en octobre, le maire Brisson attire l’attention du public sur les précautions à prendre pour prévenir l’épidémie de la picote et recommande fortement la vaccination. En certains endroits, on fit appel au clergé pour convaincre les plus réticents.

    Bien qu’en novembre on constate que les ravages causés par la maladie diminuent, il est convenu que le secrétaire de la municipalité soit chargé de faire chanter une messe de première classe en l’honneur de Saint-Roch pour que la municipalité soit protégée contre la picote et de partager le coût de cette messe entre les conseillers et le secrétaire de la municipalité.

    Enfin, en décembre, sur recommandation expresse du Bureau central de santé, un bureau local de santé est formé. Il se compose des membres du comité de santé et du maire qui, en sa qualité de médecin, en est le président officiel.

    Le bilan des décès à La Prairie est sensiblement le même pour les années 1885 et 1886 durant lesquelles il y a eu 15 % de plus de morts en comparaison de 1884. Les statistiques permettent de croire que, sous toutes  réserves, l’épidémie amorcée en 1885, avec un pic en mars, se serait prolongée au moins durant la première moitié  de 1886. Pourtant la mortalité fut plus élevée, en chiffres absolus, en 1887 que dans les trois années précédentes. Sans doute par prudence, toutes les sépultures dues à la variole ont été regroupées à gauche de la façade de l’église (voir l’illustration ci-haut).  

     

    Plus tard, en octobre, le maire Brisson attire l’attention du public sur les précautions à prendre pour prévenir l’épidémie de la picote et recommande fortement la vaccination. En certains endroits, on fit appel au clergé pour convaincre les plus réticents. Bien qu’en novembre on constate que les ravages causés par la maladie diminuent, il est convenu que le secrétaire de la municipalité soit chargé de faire chanter une messe de première classe en l’honneur de Saint-Roch pour que la municipalité soit protégée contre la picote et de partager le coût de cette messe entre les conseillers et le secrétaire de la municipalité. Enfin, en décembre, sur recommandation expresse du Bureau central de santé, un bureau local de santé est formé. Il se compose des membres du comité de santé et du maire qui, en sa qualité de médecin, en est le président officiel. Le bilan des décès à La Prairie est sensiblement le même pour les années 1885 et 1886 durant lesquelles il y a eu 15 % de plus de morts en comparaison de 1884. Les statistiques permettent de croire que, sous toutes  réserves, l’épidémie amorcée en 1885, avec un pic en mars, se serait prolongée au moins durant la première moitié  de 1886. Pourtant la mortalité fut plus élevée, en chiffres absolus, en 1887 que dans les trois années précédentes. Sans doute par prudence, toutes les sépultures dues à la variole ont été regroupées à gauche de la façade de l’église (voir l’illustration ci-haut).    ...

    La Prairie au temps des épidémies (suite 2)

    De plus, en mai 1886, à cause des eaux nauséabondes qui percolent à travers les sépultures vers un fossé, le Bureau central de santé de Montréal force la fermeture du cimetière qui ceinture l’église actuelle.

    Partout, le clergé veille. À Montréal en septembre 1885, l'abbé Filiatrault fulmine. Selon lui, la ville est punie en raison de la conduite insouciante de sa population au carnaval de l'année précédente; il dénonce particulièrement la promiscuité sur les toboggans.

    « À terme, l’épidémie fauche près de 6 000 personnes, parmi lesquelles on compte plus de 3 000 victimes à Montréal. Pour l’ensemble du Québec, près de 20 000 personnes sont atteintes de la maladie et 13 000 demeurent défigurées pour la vie. » Denis Goulet, page 55, Brève histoire des épidémies auQuébec. Du choléra à la COVID-19, Septentrion, juin 2020, 176 pages

    La grippe espagnole de 1918

    On l’a appelée « grippe espagnole » parce que l'Espagne avait été massivement la cible d'une première vague, non mortelle, en juin 1918. Cette forte grippe causée par le virus H1N1 fera plus de 40 millions de morts à travers la planète.

    En fait, le virus serait venu de Chine où il a été observé dans la région de Canton au printemps 1918. Il a d'abord été amené par des militaires aux États-Unis, avec les tout premiers morts enregistrés à la mi-septembre et une fulgurante contagiosité.

    Au Québec, ce sont 2,7 % des malades qui décèdent dont la majorité se retrouve chez les 20-34 ans. Comme c’est souvent le cas, on a pu établir une relation étroite entre la pauvreté et la mortalité élevée. En 1918, on a recensé environ un demi-million de Québécois atteints de la maladie; au moins 14 000 en sont morts.

    Partout, le grand mot d'ordre sera le confinement. Dans les hôpitaux, on isole les malades par des draps tendus entre des lits. Le personnel soignant porte des masques ou des tampons de gaze, imprégnés de désinfectant.

    Tous les usagers des transports en commun du Québec devront porter un couvre-visage à compter du 13 juillet. Il n'y aura pas de police, mais on va demander aux gens qui gèrent les sociétés de transport d'interdire l'entrée aux gens qui n'ont pas de masque.

    Au Québec, la grippe espagnole provoque le décès inattendu d’un grand nombre chez les 18-35 ans. Le recours à l’hôpital est marginal et la plupart des victimes décèdent à leur domicile.

    « Les autorités ont décidé de fermer toutes les écoles, de diminuer autant que possible les services religieux dans les églises, de fermer les lieux d’amusement et d’interdire les assemblées publiques, afin de se prémunir contre les atteintes de la grippe. » Le Devoir, 7 octobre 1918, page 3

    À La Prairie, le nombre de décès sera particulièrement élevé pour les mois d’octobre et de novembre 1918, mais comparativement aux années 1917 et 1919, on enregistre seulement 30 décès de plus au total de l’année. Heureusement, ce ne fut pas l’hécatombe.

    Le 10 novembre, les églises sont rouvertes. Ce sont les jeunes et les personnes âgées qui ont le plus été touchés par la terrible maladie.

     

    De plus, en mai 1886, à cause des eaux nauséabondes qui percolent à travers les sépultures vers un fossé, le Bureau central de santé de Montréal force la fermeture du cimetière qui ceinture l’église actuelle. Partout, le clergé veille. À Montréal en septembre 1885, l'abbé Filiatrault fulmine. Selon lui, la ville est punie en raison de la conduite insouciante de sa population au carnaval de l'année précédente; il dénonce particulièrement la promiscuité sur les toboggans. « À terme, l’épidémie fauche près de 6 000 personnes, parmi lesquelles on compte plus de 3 000 victimes à Montréal. Pour l’ensemble du Québec, près de 20 000 personnes sont atteintes de la maladie et 13 000 demeurent défigurées pour la vie. » Denis Goulet, page 55, Brève histoire des épidémies auQuébec. Du choléra à la COVID-19, Septentrion, juin 2020, 176 pages La grippe espagnole de 1918 On l’a appelée « grippe espagnole » parce que l'Espagne avait été massivement la cible d'une première vague, non mortelle, en juin 1918. Cette forte grippe causée par le virus H1N1 fera plus de 40 millions de morts à travers la planète. En fait, le virus serait venu de Chine où il a été observé dans la région de Canton au printemps 1918. Il a d'abord été amené par des militaires aux États-Unis, avec les tout premiers morts enregistrés à la mi-septembre et une fulgurante contagiosité. Au Québec, ce sont 2,7 % des malades qui décèdent dont la majorité se retrouve chez les 20-34 ans. Comme c’est souvent le cas, on a pu établir une relation étroite entre la pauvreté et la mortalité élevée. En 1918, on a recensé environ un demi-million de Québécois atteints de la maladie; au moins 14 000 en sont morts. Partout, le grand mot d'ordre sera le confinement. Dans les hôpitaux, on isole les malades par des draps tendus entre des lits. Le personnel soignant porte des masques ou des tampons de gaze, imprégnés de désinfectant. Tous les usagers des transports en commun du Québec devront porter un couvre-visage à compter du 13 juillet. Il n'y aura pas de police, mais on va demander aux gens qui gèrent les sociétés de transport d'interdire l'entrée aux gens qui n'ont pas de masque. Au Québec, la grippe espagnole provoque le décès inattendu d’un grand nombre chez les 18-35 ans. Le recours à l’hôpital est marginal et la plupart des victimes décèdent à leur domicile. « Les autorités ont décidé de fermer toutes les écoles, de diminuer autant que possible les services religieux dans les églises, de fermer les lieux d’amusement et d’interdire les assemblées publiques, afin de se prémunir contre les atteintes de la grippe. » Le Devoir, 7 octobre 1918, page 3 À La Prairie, le nombre de décès sera particulièrement élevé pour les mois d’octobre et de novembre 1918, mais comparativement aux années 1917 et 1919, on enregistre seulement 30 décès de plus au total de l’année. Heureusement, ce ne fut pas l’hécatombe. Le 10 novembre, les églises sont rouvertes. Ce sont les jeunes et les personnes âgées qui ont le plus été touchés par la terrible maladie.  ...

    La Prairie au temps des épidémies (suite 3)

    Au moins jusqu’en 1960, face aux épidémies, le clergé continuera, à La Prairie comme ailleurs au Québec, à inviter les fidèles à demander une protection divine directe ou indirecte par l’intermédiaire de saints protecteurs.

    Aujourd’hui, la science médicale assure la relève avec un succès mitigé. Bien que l’hygiène et la médecine aient fait d’énormes progrès depuis un siècle et, malgré la mise au point de vaccins efficaces en moins d’un an, l’actuelle pandémie de COVID 19 nous oblige à reconnaître que la science a ses limites.

    Le monde scientifique doit dès maintenant se préparer à une prochaine pandémie. Des changements radicaux s’imposent dans l’approche future des maladies infectieuses. Il faut cesser d’attendre qu’une nouvelle pandémie s’installe et se lancer dès maintenant à la mise au point de nouveaux instruments médicaux (dépistage et soins hospitaliers), de médicaments adéquats et de vaccins efficaces.

    À La Prairie, comme ailleurs, de locale qu’elle était, la lutte aux épidémies est devenue une affaire planétaire.

     

    Au moins jusqu’en 1960, face aux épidémies, le clergé continuera, à La Prairie comme ailleurs au Québec, à inviter les fidèles à demander une protection divine directe ou indirecte par l’intermédiaire de saints protecteurs. Aujourd’hui, la science médicale assure la relève avec un succès mitigé. Bien que l’hygiène et la médecine aient fait d’énormes progrès depuis un siècle et, malgré la mise au point de vaccins efficaces en moins d’un an, l’actuelle pandémie de COVID 19 nous oblige à reconnaître que la science a ses limites. Le monde scientifique doit dès maintenant se préparer à une prochaine pandémie. Des changements radicaux s’imposent dans l’approche future des maladies infectieuses. Il faut cesser d’attendre qu’une nouvelle pandémie s’installe et se lancer dès maintenant à la mise au point de nouveaux instruments médicaux (dépistage et soins hospitaliers), de médicaments adéquats et de vaccins efficaces. À La Prairie, comme ailleurs, de locale qu’elle était, la lutte aux épidémies est devenue une affaire planétaire.  ...

    Un zouave à La Prairie

    En 1868, les états pontificaux sont menacés d’annexion par l’Italie. Le pape Pie IX, alors âgé de 75 ans, lance un appel à l’aide aux catholiques du monde entier. Au Québec, les autorités civiles et religieuses mettent rapidement sur pied une vaste organisation dont le but est d’enrôler des jeunes hommes volontaires prêts à aller défendre le pape.

    Environ 430 hommes issus de nombreuses paroisses du Québec s’enrôlent dans l’unité des zouaves pontificaux. Seulement la moitié d’entre eux serviront en Italie où ils combattirent jusqu’en 1871.

    À La Prairie, malgré les rappels insistants du curé Isidore Gravel et du vicaire P.O. Allaire, un seul homme, Ernest Hébert qui n’était pas né à La Prairie, se portera volontaire. Il fit partie du 2e détachement de 23 zouaves qui, après être passé par La Prairie et Saint-Jean, s’embarqua le 16 mai 1868 à New York à bord de la Ville-de-Paris. Le groupe parvint à Rome le 3 juin, à temps pour assister à l’inauguration des nouvelles salles du Cercle Canadien.

    Aucun zouave canadien n’a été tué durant les combats. À leur retour, quatorze d’entre eux se sont installés à Piopolis, sur les rives du lac Mégantic, sur des terres offertes par le gouvernement provincial. Ernest Hébert n’était pas du nombre de ces pionniers. Nous ignorons s’il est revenu à La Prairie, mais nous savons qu’il ne s’y est pas marié et qu’il n’est pas décédé ici.

     

    En 1868, les états pontificaux sont menacés d’annexion par l’Italie. Le pape Pie IX, alors âgé de 75 ans, lance un appel à l’aide aux catholiques du monde entier. Au Québec, les autorités civiles et religieuses mettent rapidement sur pied une vaste organisation dont le but est d’enrôler des jeunes hommes volontaires prêts à aller défendre le pape. Environ 430 hommes issus de nombreuses paroisses du Québec s’enrôlent dans l’unité des zouaves pontificaux. Seulement la moitié d’entre eux serviront en Italie où ils combattirent jusqu’en 1871. À La Prairie, malgré les rappels insistants du curé Isidore Gravel et du vicaire P.O. Allaire, un seul homme, Ernest Hébert qui n’était pas né à La Prairie, se portera volontaire. Il fit partie du 2e détachement de 23 zouaves qui, après être passé par La Prairie et Saint-Jean, s’embarqua le 16 mai 1868 à New York à bord de la Ville-de-Paris. Le groupe parvint à Rome le 3 juin, à temps pour assister à l’inauguration des nouvelles salles du Cercle Canadien. Aucun zouave canadien n’a été tué durant les combats. À leur retour, quatorze d’entre eux se sont installés à Piopolis, sur les rives du lac Mégantic, sur des terres offertes par le gouvernement provincial. Ernest Hébert n’était pas du nombre de ces pionniers. Nous ignorons s’il est revenu à La Prairie, mais nous savons qu’il ne s’y est pas marié et qu’il n’est pas décédé ici.  ...

    La Prairie au temps des épidémies (suite 1)

    La mortalité élevée s’explique par le fait que la population d’alors est très majoritairement née dans la colonie et n’a donc jamais été touchée par cette maladie. Ce qui explique qu’elle ne soit pas immunisée. C’est aussi le cas de plusieurs Français de souche qui ne l’ont jamais eue avant de venir habiter en Nouvelle-France.

    Selon le Sulpicien Villermaula curé de La Prairie depuis septembre 1702, « […] la picote [petite verole] commença a faire ses ravages dans les quartiers de montreal. elle dura tout l’hyver Suivant et tout le printems aussi bien que une bonne partie de l’été ce qui fut cause que l’année mil Sept cent troy Se passa a souffrir, les habitans n’etant pas en etat d’agir. tous ceux qui étoient natifs du païs Sentirent les rigueurs de cette cruelle  maladies et même plusieurs Francois exceptés quelques uns de plus agés en furent affligés. ainsi chacun ne passa qu’a Soy et le Curé n’eut point le tems de penser a d’autres affaires qu’aux besoins de Ses malades, dont la paroisse n’etoit qu’un hopital. »

    À notre grand étonnement et malgré le ton alarmiste du curé Louis-Michel de Villermaula, le registre des sépultures de la paroisse n’a enregistré que 4 décès pour l’année 1702 et 7 pour 1703. Ces derniers étant tous morts durant la première moitié de l’année 1703, cela ne ferait qu’au plus 7 victimes de la petite vérole à La Prairie sur 400 personnes, soit moins de 2 % de la population. Une statistique bien en deçà des 80 décès par 1 000 habitants pour l’ensemble de la colonie.

    Choléra et typhus

    Le choléra est une infection diarrhéique aiguë provoquée par l’ingestion d’aliments ou d’eau contaminés par le bacille Vibrio cholerae. Elle débute par des diarrhées très sévères et par une super déshydratation. On peut en mourir en quelques heures. Le choléra se transmet par ingestion d'eau ou d'aliments contaminés par les selles d'une personne infectée (transmission fécale orale).

    Au cours du 19e siècle, le choléra a rendu malades des centaines de millions de personnes, tuant plus de la moitié de ses victimes. C’était l’un des agents pathogènes les plus rapides et les plus redoutés au monde. C’est sans doute pourquoi dans certains pays on enterre les victimes du choléra avec de la chaux vive.

    À l’époque, plusieurs attribuent les épidémies à l’intervention du diable ou encore au châtiment divin. Le clergé organise des processions pour éloigner le choléra. L’eau bénite à l’entrée des églises, censée assurer une protection contre le mal, contribue au contraire à la contagion. D’autres cherchent des boucs émissaires; mendiants,  immigrants ou mauvais voisins.

    Dans les agglomérations du Québec au 19e siècle, les déficiences sont multiples en ce qui a trait à l’hygiène corporelle et domestique ainsi qu’à la gestion des excréments humains et animaux.

       
    À La Prairie, nombreux sont ceux qui gardent des porcs, des vaches et des poules dans leur cour arrière. Les latrines sont à proximité des puits, les premières ayant contaminé les seconds, car les déjections humaines et animales ne font pas bon ménage avec l’eau potable. Certains achètent de l’eau de vendeurs qui la puisent dans le fleuve.  Nous sommes loin de l’eau courante et des cabinets à chasse d’eau.

    Les meilleures mesures pour prévenir le choléra sont l’accès à l’eau propre, la gestion des eaux usées et des déchets, ainsi que l’établissement de règles de santé publique. Or, au milieu du 19e siècle on sait qu’à La Prairie on accusait de sérieux retards dans ces domaines et le virus du choléra arrivait ici dans un milieu favorable à son expansion.

     

    La mortalité élevée s’explique par le fait que la population d’alors est très majoritairement née dans la colonie et n’a donc jamais été touchée par cette maladie. Ce qui explique qu’elle ne soit pas immunisée. C’est aussi le cas de plusieurs Français de souche qui ne l’ont jamais eue avant de venir habiter en Nouvelle-France. Selon le Sulpicien Villermaula curé de La Prairie depuis septembre 1702, « […] la picote [petite verole] commença a faire ses ravages dans les quartiers de montreal. elle dura tout l’hyver Suivant et tout le printems aussi bien que une bonne partie de l’été ce qui fut cause que l’année mil Sept cent troy Se passa a souffrir, les habitans n’etant pas en etat d’agir. tous ceux qui étoient natifs du païs Sentirent les rigueurs de cette cruelle  maladies et même plusieurs Francois exceptés quelques uns de plus agés en furent affligés. ainsi chacun ne passa qu’a Soy et le Curé n’eut point le tems de penser a d’autres affaires qu’aux besoins de Ses malades, dont la paroisse n’etoit qu’un hopital. » À notre grand étonnement et malgré le ton alarmiste du curé Louis-Michel de Villermaula, le registre des sépultures de la paroisse n’a enregistré que 4 décès pour l’année 1702 et 7 pour 1703. Ces derniers étant tous morts durant la première moitié de l’année 1703, cela ne ferait qu’au plus 7 victimes de la petite vérole à La Prairie sur 400 personnes, soit moins de 2 % de la population. Une statistique bien en deçà des 80 décès par 1 000 habitants pour l’ensemble de la colonie. Choléra et typhus Le choléra est une infection diarrhéique aiguë provoquée par l’ingestion d’aliments ou d’eau contaminés par le bacille Vibrio cholerae. Elle débute par des diarrhées très sévères et par une super déshydratation. On peut en mourir en quelques heures. Le choléra se transmet par ingestion d'eau ou d'aliments contaminés par les selles d'une personne infectée (transmission fécale orale). Au cours du 19e siècle, le choléra a rendu malades des centaines de millions de personnes, tuant plus de la moitié de ses victimes. C’était l’un des agents pathogènes les plus rapides et les plus redoutés au monde. C’est sans doute pourquoi dans certains pays on enterre les victimes du choléra avec de la chaux vive. À l’époque, plusieurs attribuent les épidémies à l’intervention du diable ou encore au châtiment divin. Le clergé organise des processions pour éloigner le choléra. L’eau bénite à l’entrée des églises, censée assurer une protection contre le mal, contribue au contraire à la contagion. D’autres cherchent des boucs émissaires; mendiants,  immigrants ou mauvais voisins. Dans les agglomérations du Québec au 19e siècle, les déficiences sont multiples en ce qui a trait à l’hygiène corporelle et domestique ainsi qu’à la gestion des excréments humains et animaux.     À La Prairie, nombreux sont ceux qui gardent des porcs, des vaches et des poules dans leur cour arrière. Les latrines sont à proximité des puits, les premières ayant contaminé les seconds, car les déjections humaines et animales ne font pas bon ménage avec l’eau potable. Certains achètent de l’eau de vendeurs qui la puisent dans le fleuve.  Nous sommes loin de l’eau courante et des cabinets à chasse d’eau. Les meilleures mesures pour prévenir le choléra sont l’accès à l’eau propre, la gestion des eaux usées et des déchets, ainsi que l’établissement de règles de santé publique. Or, au milieu du 19e siècle on sait qu’à La Prairie on accusait de sérieux retards dans ces domaines et le virus du choléra arrivait ici dans un milieu favorable à son expansion.  ...

    La Prairie au temps des épidémies (suite 2)

    Au village, le premier aqueduc, un réseau privé de tuyaux de bois, verra le jour sur le tard en 1885. La chloration de l’eau ne sera implantée qu’en 1925. La construction du réseau d’égouts date de 1912, mais il faudra attendre 1989 pour que les déchets qu’ils transportent soient déviés du fleuve vers l’usine de traitement des eaux usées du bassin de La Prairie. Actuellement au Québec, 7 municipalités sur 10 contaminent toujours les cours d’eau.

    À travers la province, apportée par une vague d’immigrants irlandais en juin 1832, l’épidémie de choléra affecta la population jusqu’en octobre. À l’époque, la médecine ne connaissait pas l'origine du choléra ni ses voies de transmission. On croit que ce sont les miasmes (émanations dangereuses de matières en décomposition dégageant une odeur désagréable) et les nuages de gaz qui sont responsables de la maladie. Le choléra était vu comme une maladie de l’atmosphère.

    En l’absence de vaccins ou de médicaments efficaces, on connaissait la contagion et on savait qu’il valait mieux isoler les malades. John Snow, un anesthésiste de Londres en Angleterre, a prouvé, en 1854, que le choléra était transmis par l’eau contaminée. Hélas, les instances médicales n’accepteront ses conclusions qu’à la fin du 19e siècle avec l’apparition de la théorie microbienne.

    Bien qu’un poste de quarantaine fut installé dès 1832 sur Grosse-Île, une île située à environ 50 kilomètres à l’est de la ville de Québec pour contrôler l'arrivée des nouveaux immigrants, la maladie se répandit à travers tout le Bas-Canada.

    En 1832, « Pour l’ensemble de la province, on estime à près de 10 000 le nombre de décès. Le taux de mortalité pendant l’épidémie est de 46/1 000 habitants pour la province avec pointes de 74/1 000 à Montréal et de 82/1 000 à Québec, comparativement à 37/1 000 pour l’ensemble de l’année. » Denis Goulet, page 38,Brève histoire des épidémies au Québec. Du choléra à la COVID-19, Septentrion, juin 2020, 176 pages Le choléra a tué plus de 3 000 personnes dans les villes de Montréal et Québec.

    À La Prairie, le bilan est élevé et les écoles sont fermées. Le curé Boucher signale 39 morts du choléra en juin, 18 en juillet, 25 en août et 2 en septembre. Cela représente 84 décès pour 187 sépultures dans l’année soit 45 %.

    Dans l’édition du 18 juin 1832 de La Minerve on peut lire : « La semaine dernière on a transporté des troupes à Laprairie à cause du coléra. Hier il en est parti un fort détachement pour l’île Sainte-Hélène. Il est mort beaucoup de soldats et il y a eu un grand nombre d’attaqué. » Faut-il en conclure que les casernes militaires de La Prairie avaient alors servi de lieu d’isolement sanitaire?

    Le choléra, devenu l’unique sujet de discussion, sème la terreur dans toutes les classes de la société. Dans son édition du 18 juin 1832, La Minerve dresse un portrait lugubre de la situation à Montréal : « […] Les personnes qui en sont attaquées sont emportées en quelques heures. […] Le fléau a moissonné une foule considérable de nos meilleurs citoyens et la ville est dans un deuil général. […]

     

    Au village, le premier aqueduc, un réseau privé de tuyaux de bois, verra le jour sur le tard en 1885. La chloration de l’eau ne sera implantée qu’en 1925. La construction du réseau d’égouts date de 1912, mais il faudra attendre 1989 pour que les déchets qu’ils transportent soient déviés du fleuve vers l’usine de traitement des eaux usées du bassin de La Prairie. Actuellement au Québec, 7 municipalités sur 10 contaminent toujours les cours d’eau. À travers la province, apportée par une vague d’immigrants irlandais en juin 1832, l’épidémie de choléra affecta la population jusqu’en octobre. À l’époque, la médecine ne connaissait pas l'origine du choléra ni ses voies de transmission. On croit que ce sont les miasmes (émanations dangereuses de matières en décomposition dégageant une odeur désagréable) et les nuages de gaz qui sont responsables de la maladie. Le choléra était vu comme une maladie de l’atmosphère. En l’absence de vaccins ou de médicaments efficaces, on connaissait la contagion et on savait qu’il valait mieux isoler les malades. John Snow, un anesthésiste de Londres en Angleterre, a prouvé, en 1854, que le choléra était transmis par l’eau contaminée. Hélas, les instances médicales n’accepteront ses conclusions qu’à la fin du 19e siècle avec l’apparition de la théorie microbienne. Bien qu’un poste de quarantaine fut installé dès 1832 sur Grosse-Île, une île située à environ 50 kilomètres à l’est de la ville de Québec pour contrôler l'arrivée des nouveaux immigrants, la maladie se répandit à travers tout le Bas-Canada. En 1832, « Pour l’ensemble de la province, on estime à près de 10 000 le nombre de décès. Le taux de mortalité pendant l’épidémie est de 46/1 000 habitants pour la province avec pointes de 74/1 000 à Montréal et de 82/1 000 à Québec, comparativement à 37/1 000 pour l’ensemble de l’année. » Denis Goulet, page 38,Brève histoire des épidémies au Québec. Du choléra à la COVID-19, Septentrion, juin 2020, 176 pages Le choléra a tué plus de 3 000 personnes dans les villes de Montréal et Québec. À La Prairie, le bilan est élevé et les écoles sont fermées. Le curé Boucher signale 39 morts du choléra en juin, 18 en juillet, 25 en août et 2 en septembre. Cela représente 84 décès pour 187 sépultures dans l’année soit 45 %. Dans l’édition du 18 juin 1832 de La Minerve on peut lire : « La semaine dernière on a transporté des troupes à Laprairie à cause du coléra. Hier il en est parti un fort détachement pour l’île Sainte-Hélène. Il est mort beaucoup de soldats et il y a eu un grand nombre d’attaqué. » Faut-il en conclure que les casernes militaires de La Prairie avaient alors servi de lieu d’isolement sanitaire? Le choléra, devenu l’unique sujet de discussion, sème la terreur dans toutes les classes de la société. Dans son édition du 18 juin 1832, La Minerve dresse un portrait lugubre de la situation à Montréal : « […] Les personnes qui en sont attaquées sont emportées en quelques heures. […] Le fléau a moissonné une foule considérable de nos meilleurs citoyens et la ville est dans un deuil général. […]  ...

    La Prairie au temps des épidémies (suite 3)

    Des familles entières ont pris la fuite pour se réfugier dans les campagnes où elles espèrent être à l’abri du danger. « […] Quand des amis se rencontrent ils se font des adieux comme s’ils ne devaient plus se revoir. Jour et nuit on voit des voitures qui portent des corps au cimetière; la tristesse et la terreur règnent sur tous les visages. […] »

    « Les cadavres qui sont transportés d'une paroisse à une autre doivent être enfermés dans des cercueils métalliques remplis de désinfectants et fermés hermétiquement. La loi stipule aussi que de tels cadavres doivent être enterrés à au moins quatre pieds sous terre et dans une fosse séparée. » Denis Goulet, page 84,Brève histoire des épidémies au Québec. Du choléra à la COVID-19, Septentrion, juin 2020, 176 pages

    Une seconde épidémie en 1834 fera un grand nombre de morts à La Prairie. Sans doute que plusieurs des 56 décès pour le seul mois d’août en étaient des victimes.

    C’est en 1846 qu’est créée officiellement la municipalité de La Prairie. Aussitôt mis en place, le premier conseil   municipal s’empresse de voter en juin 1845 des règlements dont plusieurs concernent la salubrité : ne garder aucune ordure dans les cours, ne déposer aucune bête morte ou fumier sur la grève, ne jeter aucune ordure sur la grève et dans les ruisseaux, ne jeter aucun déchet par les fenêtres ou les portes, que ceux qui tuent des animaux ne pourront répandre le sang et les tripes dans les rues, les places   publiques et sur la grève, etc. Ces règlements nous permettent de croire que la situation antérieure n’était pas conforme aux principes les plus élémentaires de l’hygiène sociale.

    « L’épidémie de typhus de 1847 est liée à la terrible famine qui affecte l’Irlande depuis deux ans et qui entraîne le départ d’un million et demi d’émigrés. Parmi ceux-ci, près de 80 000 s’embarquent pour le Canada. » Denis Goulet, page 39,Brève histoire des épidémies au Québec. Du choléra à la COVID-19, Septentrion, juin 2020, 176 pages Cette fièvre est causée par un microbe transmis par les puces. Avec l’arrivée des nombreux navires, la maladie atteint Montréal en mai 1847 et se poursuivra jusqu’à la fin du mois d’août. Elle causera des dizaines de milliers de morts. Les registres de la paroisse ont enregistré 109 décès pour 1847 et seulement 69 pour l’année suivante.

    « L’émoi causé par l’épidémie réveille les pouvoirs publics.

    En effet, plusieurs bureaux de santé ont temporairement été mis sur pied dans les principales villes. […] Quelque 75 bureaux de santé sont ainsi formés à travers le Québec. » Denis Goulet, page 47,Brève histoire des épidémies au Québec. Du choléra à la COVID-19, Septentrion, juin 2020, 176 pages

    Bien que nécessaires, les mesures adoptées par le conseil municipal en 1846 n’empêcheront pas le retour du choléra qui se manifeste à nouveau entre le 4 et le 12   juillet 1849 et affecte la population jusqu’à la mi-octobre. Selon le curé Jean-Marie Hainguy s.j., cette nouvelle épidémie aurait fait 32 morts.

    Quelques années plus tard, l’épidémie de 1854 sera encore plus meurtrière, elle apparaît le 20 juin pour disparaître vers la mi-septembre. Le conseil municipal se voit de nouveau obligé de rappeler certaines règles à la population.

    Ainsi, le 1er mai, le Dr Alexander demande qu’il soit fait une criée à la porte de l’église à l’effet d’informer toutes les personnes qu’elles ont, sous peine d’amende, quinze jours pour faire nettoyer leurs cours et transporter les immondices.

    À suivre dans le prochain numéro …

     

    Des familles entières ont pris la fuite pour se réfugier dans les campagnes où elles espèrent être à l’abri du danger. « […] Quand des amis se rencontrent ils se font des adieux comme s’ils ne devaient plus se revoir. Jour et nuit on voit des voitures qui portent des corps au cimetière; la tristesse et la terreur règnent sur tous les visages. […] » « Les cadavres qui sont transportés d'une paroisse à une autre doivent être enfermés dans des cercueils métalliques remplis de désinfectants et fermés hermétiquement. La loi stipule aussi que de tels cadavres doivent être enterrés à au moins quatre pieds sous terre et dans une fosse séparée. » Denis Goulet, page 84,Brève histoire des épidémies au Québec. Du choléra à la COVID-19, Septentrion, juin 2020, 176 pages Une seconde épidémie en 1834 fera un grand nombre de morts à La Prairie. Sans doute que plusieurs des 56 décès pour le seul mois d’août en étaient des victimes. C’est en 1846 qu’est créée officiellement la municipalité de La Prairie. Aussitôt mis en place, le premier conseil   municipal s’empresse de voter en juin 1845 des règlements dont plusieurs concernent la salubrité : ne garder aucune ordure dans les cours, ne déposer aucune bête morte ou fumier sur la grève, ne jeter aucune ordure sur la grève et dans les ruisseaux, ne jeter aucun déchet par les fenêtres ou les portes, que ceux qui tuent des animaux ne pourront répandre le sang et les tripes dans les rues, les places   publiques et sur la grève, etc. Ces règlements nous permettent de croire que la situation antérieure n’était pas conforme aux principes les plus élémentaires de l’hygiène sociale. « L’épidémie de typhus de 1847 est liée à la terrible famine qui affecte l’Irlande depuis deux ans et qui entraîne le départ d’un million et demi d’émigrés. Parmi ceux-ci, près de 80 000 s’embarquent pour le Canada. » Denis Goulet, page 39,Brève histoire des épidémies au Québec. Du choléra à la COVID-19, Septentrion, juin 2020, 176 pages Cette fièvre est causée par un microbe transmis par les puces. Avec l’arrivée des nombreux navires, la maladie atteint Montréal en mai 1847 et se poursuivra jusqu’à la fin du mois d’août. Elle causera des dizaines de milliers de morts. Les registres de la paroisse ont enregistré 109 décès pour 1847 et seulement 69 pour l’année suivante. « L’émoi causé par l’épidémie réveille les pouvoirs publics. En effet, plusieurs bureaux de santé ont temporairement été mis sur pied dans les principales villes. […] Quelque 75 bureaux de santé sont ainsi formés à travers le Québec. » Denis Goulet, page 47,Brève histoire des épidémies au Québec. Du choléra à la COVID-19, Septentrion, juin 2020, 176 pages Bien que nécessaires, les mesures adoptées par le conseil municipal en 1846 n’empêcheront pas le retour du choléra qui se manifeste à nouveau entre le 4 et le 12   juillet 1849 et affecte la population jusqu’à la mi-octobre. Selon le curé Jean-Marie Hainguy s.j., cette nouvelle épidémie aurait fait 32 morts. Quelques années plus tard, l’épidémie de 1854 sera encore plus meurtrière, elle apparaît le 20 juin pour disparaître vers la mi-septembre. Le conseil municipal se voit de nouveau obligé de rappeler certaines règles à la population. Ainsi, le 1er mai, le Dr Alexander demande qu’il soit fait une criée à la porte de l’église à l’effet d’informer toutes les personnes qu’elles ont, sous peine d’amende, quinze jours pour faire nettoyer leurs cours et transporter les immondices. À suivre dans le prochain numéro …  ...

    La Prairie au temps des épidémies

    Depuis la naissance de l’humanité, la maladie a toujours été présente sous ses multiples manifestations. La dégradation et la morbidité sont inhérentes à la vie et en déterminent la durée.

    Outre les drames individuels, en certaines occasions le mal s’est répandu parmi de vastes populations sinon à travers l’humanité tout entière, provoquant des milliers voire des millions de morts.

    La première pandémie de peste bubonique connue fut répertoriée entre le 6e et le 8e siècle. Il s'agit de la peste de l’empereur Justinien qui se serait répandue grâce aux échanges commerciaux. Sur deux siècles, elle fit des millions de morts. Plus tard, la peste noire apparue au Moyen-Âge entre 1347 et 1353 aurait été responsable de la mort de 25 à 34 millions de personnes en Europe. Ce chiffre représente entre 25 % et 50 % de la population européenne d’alors.

    La médecine d’alors était impuissante. Afin d’apaiser la colère de Dieu, la population, prise de panique, avait recours aux prières et multipliait les processions.

    Au cours des siècles qui suivirent, l’humanité devait connaître d’autres épisodes d’épidémies, certains virus étant plus meurtriers que d’autres : la fièvre jaune, le choléra des années 1830, la grippe asiatique, la grippe espagnole, le sida, l’ebola, le zika etc. pour ne citer que celles-là. L’actuelle pandémie de COVID-19 est la dernière en ligne de cette longue suite de maladies fatales qui se répandent à travers les continents.

    Les agents pathogènes (virus, microbes, bactéries, etc.) n’ont aucune intention ni plan de dissémination. Ils doivent compter sur les humains qui, par leurs contacts sociaux et leurs modes de vie, favorisent leur expansion. Ainsi, plus la population est importante plus l’épidémie risque de durer longtemps. Les réseaux de transports jouent également un rôle majeur dans la propagation.

    Ainsi, sise au carrefour de grandes voies de communication et lieu de transit important, on comprendra facilement que, depuis sa fondation, La Prairie ait connu son lot d’épidémies. Selon la journaliste scientifique Sonia Shah, trois raisons ont contribué et contribuent toujours aux pandémies : les incertitudes médicales, l’absence de règles sanitaires claires et le manque de cohésion sociale (plusieurs refusent de suivre les consignes sanitaires).

    La variole

    Mise en garde : Au sujet des statistiques présentées plus bas, le lecteur voudra bien tenir compte que les registres de la paroisse de la Nativité de La Prairie indiquent les noms et la date du décès sans jamais en préciser la cause. Nous convenons cependant que plus il y a eu de morts plus la probabilité est grande que beaucoup de ces décès soient attribuables à l’épidémie en cours.

    Un premier fléau

    Alors que la seigneurie de La Prairie comptait à peine 400 habitants, une épidémie de petite vérole (variole ou picote) ravagea la région au cours de l’hiver 1702-1703. Cette épidémie fut, pour les populations de souche européenne, la plus meurtrière de toute l’histoire canadienne. La moitié de la population totale aurait été touchée et environ 10% des habitants décédèrent en six mois.

     

    Depuis la naissance de l’humanité, la maladie a toujours été présente sous ses multiples manifestations. La dégradation et la morbidité sont inhérentes à la vie et en déterminent la durée. Outre les drames individuels, en certaines occasions le mal s’est répandu parmi de vastes populations sinon à travers l’humanité tout entière, provoquant des milliers voire des millions de morts. La première pandémie de peste bubonique connue fut répertoriée entre le 6e et le 8e siècle. Il s'agit de la peste de l’empereur Justinien qui se serait répandue grâce aux échanges commerciaux. Sur deux siècles, elle fit des millions de morts. Plus tard, la peste noire apparue au Moyen-Âge entre 1347 et 1353 aurait été responsable de la mort de 25 à 34 millions de personnes en Europe. Ce chiffre représente entre 25 % et 50 % de la population européenne d’alors. La médecine d’alors était impuissante. Afin d’apaiser la colère de Dieu, la population, prise de panique, avait recours aux prières et multipliait les processions. Au cours des siècles qui suivirent, l’humanité devait connaître d’autres épisodes d’épidémies, certains virus étant plus meurtriers que d’autres : la fièvre jaune, le choléra des années 1830, la grippe asiatique, la grippe espagnole, le sida, l’ebola, le zika etc. pour ne citer que celles-là. L’actuelle pandémie de COVID-19 est la dernière en ligne de cette longue suite de maladies fatales qui se répandent à travers les continents. Les agents pathogènes (virus, microbes, bactéries, etc.) n’ont aucune intention ni plan de dissémination. Ils doivent compter sur les humains qui, par leurs contacts sociaux et leurs modes de vie, favorisent leur expansion. Ainsi, plus la population est importante plus l’épidémie risque de durer longtemps. Les réseaux de transports jouent également un rôle majeur dans la propagation. Ainsi, sise au carrefour de grandes voies de communication et lieu de transit important, on comprendra facilement que, depuis sa fondation, La Prairie ait connu son lot d’épidémies. Selon la journaliste scientifique Sonia Shah, trois raisons ont contribué et contribuent toujours aux pandémies : les incertitudes médicales, l’absence de règles sanitaires claires et le manque de cohésion sociale (plusieurs refusent de suivre les consignes sanitaires). La variole Mise en garde : Au sujet des statistiques présentées plus bas, le lecteur voudra bien tenir compte que les registres de la paroisse de la Nativité de La Prairie indiquent les noms et la date du décès sans jamais en préciser la cause. Nous convenons cependant que plus il y a eu de morts plus la probabilité est grande que beaucoup de ces décès soient attribuables à l’épidémie en cours. Un premier fléau Alors que la seigneurie de La Prairie comptait à peine 400 habitants, une épidémie de petite vérole (variole ou picote) ravagea la région au cours de l’hiver 1702-1703. Cette épidémie fut, pour les populations de souche européenne, la plus meurtrière de toute l’histoire canadienne. La moitié de la population totale aurait été touchée et environ 10% des habitants décédèrent en six mois.  ...