La cuisine en France au XVIIe siècle

Les goûts changent

Retraçant les tendances au fil des siècles, Pierre Couperie a constaté que les prix ne cessent de monter, sauf pour les aliments qui passent de mode. Étant donné que cette hausse continue est en opposition avec le déclin progressif des prix du grain durant cette période, on peut en déduire qu'il y a une forte demande pour les aliments que consomment les classes fortunées.

Les listes d'aliments figurant dans les marchés de pourvoierie semblent corroborer l'idée que c'est vers le milieu du XVIIe siècle que les goûts français en matière culinaire subissent un profond changement. Entre 1650 et 1670, on voit disparaître certains aliments restés à l'honneur depuis le Moyen Âge; ainsi le porc — même le cochon de lait — est beaucoup moins utilisé. À dater de cette période, les oiseaux sauvages les plus exotiques — les aigrettes, butors, cigognes, grues, hérons, oies sauvages, paons et autres cygnes — ne sont presque plus jamais mentionnés. Après 1650, la baleine et la lamproie ne figurent plus dans les tables des matières.

La mode sourit en revanche à d'autres mets: l'agneau est de plus en plus goûté, même si l'on préfère encore la saveur plus corsée du mouton; les poulets et chapons du Mans et de Bruges sont particulièrement estimés, tout comme le sont les poules de bruyère, les alouettes, les ortolans, les bécasses et les sarcelles; à partir de 1661, les crêtes de coqs (vendues à la livre) et les foies gras (que l'on peut acheter par demi-douzaine) font leur apparition. La morue salée, en provenance du Nouveau Monde, et le thon conservé dans l'huile ou la saumure sont de plus en plus demandés.
 

Un chef d’orchestre !

D'ordinaire, le maître d'hôtel est formé à la cuisine ou à l'office. Il a besoin, en effet, de connaître à fond le travail qui s'y effectue pour pouvoir ensuite maintenir l'ordre. Outre qu'il retient et congédie le personnel, il gère le budget et tient les comptes.

Il compose les menus, en consultant les goûts de son maître et en utilisant sa propre connaissance des mets à la mode.

Lorsqu'un repas spécial est prévu, il se charge des préparatifs. Après s'être entretenu avec les pourvoyeurs, quant à ce qu'il y a de «plus nouveau et meilleur» sur le marché, il établit son menu. Pour bien faire, il convient de présenter à table au moins trois services différents de préparations variées, symétriquement disposées. Après quoi, le maître d'hôtel entre en conciliabule avec les cuisiniers et les officiers d'office pour savoir de quel matériel ils auront besoin et s’assurer que celui-ci est effectivement disponible; le cas échéant, il s'occupera de louer ce qui fait défaut.

Il en va de même pour la vaisselle, le linge et la verrerie nécessaires pour dresser la table. Finalement, il engage, si besoin est, des extras pour la cuisine et le service. À la cuisine, les principaux subordonnés du maître d'hôtel sont «l'écuyer» ou «officier de cuisine», le «rôtisseur», les aides cuisiniers et les garçons de cuisine.

En récompense de ses talents, il reçoit trois cents livres de gages et bénéficie en outre de nombreux à-côtés. Tout comme la cuisinière bourgeoise, c'est à lui que reviennent de droit les cendres du feu et la graisse qui s'écoule de la viande rôtie, lesquelles, dans une grande maison, rapportent sans doute assez gros. Ses assistants se chargent du nettoyage de la cuisine et toutes les tâches fastidieuses, telles que dégraisser le pot, parer la viande, hacher, émincer, désosser, faire la vaisselle et entretenir le feu.

Ni les garçons de cuisine, ni la servante chargée de la vaisselle, qui se trouvent relégués tout en bas de la hiérarchie, n'ont- droit, semble-t-il, au moindre avantage. Selon Audiger, leurs gages se montent à soixante-quinze livres par an, mais certains marmitons ne sont pour ainsi dire pas payés, car on estime qu'en travaillant dans une grande cuisine, ils auront l'occasion d'apprendre leur métier et d'établir des contacts inestimables. C'est dans cette humble situation que la plupart des futurs cuisiniers apprennent à la fois les rudiments de leur art et les ficelles du métier.

Texte tiré de l’article « En cuisine sous l’ancien régime », par Barbara Ketcham-Wheaton ; Historia ; Janvier 1985 ; no 457, p. 102-104.

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